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HTA, dyslipidémie et risque cardiovasculaire



Hypertension artérielle


version du  25/01/2023 (explications "Pour traiter l'HTA, tu fais quoi ?" )

1/ Recommandations

2023: Les dernières recommandations au sujet de l'hypertension artérielle dataient de 2020, voici les nouvelles publiées par la société européenne d'HTA. Alors, l'HTA est définie par une PA > 140/90mmHg (contrairement au 130/80 américain). La mesure au cabinet est recommandée car c'est là dessus que reposent les seuils d'efficacité démontrés des traitements (à faire aux 2 bras, si différence > 15-20mmHg: sur-risque CV). Sinon, il faut des mesures ambulatoires au diagnostic en privilégiant l'AMT pour le suivi des patients et améliorer l'observance (à faire sur 3 à 7 jours matin et soir, et SANS compter la 1ère journée de mesure), et les MAPA si on cherche une HTA masqué/nocturne. Un suivi tous les 3 mois la 1ère année est recommandé (car associé à moins d'évènement CV) puis tous les 6 mois.

Il y est défini 3 grades: 

  • Grade 1: <160/100 mmHg 
  • Grade 2 : <180/110 mmHg
  • Grade 3:  >180/110 mmHg
Et 3 stades: 
  • Stade 1: non compliquée
  • Stade 2: atteinte d'organe ou diabète 
  • Stade 3: maladie cardiovasculaire établie ou DFG < 30 mL/min. 

Le bilan initial est classique. 

  • Au laboratoire : NFS-plaquettes, EAL, glycémie à jeun, Na, K, créatininémie, BU et calcémie et acide urique. 
  • On y ajoute un ECG systématiquement et tout un tas d'examens non hiérarchisée "basiques" pour rechercher les atteintes d'organes cibles et évaluer le risque CV (dans une partie non évaluée par le système "GRADE" qui serait de grade très faible): ETT, score calcique, écho de TSA, Doppler Aorte, IPS, écho rénale et Doppler artères rénales, fond d'oeil, MMSE, IRM cérébrale, lp(a) et nt-pro-BNP. 
  • Le bilan d'HTA secondaire :
    • Indications: HTA stade 2 avant 40 ans, toute suspicion d'HTA secondaire, HTA résistante, HTA s'aggravant brutalement, HTA grade 3, anomalies au bilan initial. 
    • Contenu: entre 19 et 65 ans : Doppler des artères rénales (donc DAR plutôt que le TDM), rapport aldo/rénine, métanéphrines urinaires, test de freinage à la DXM pour mesure du cortisol et cortisol libre urinaire sur 24h. Le TDM surrénalien n'est pas un examen de 1ère attention. Après 65 ans, les causes étant l'athérosclérose réno-vasculaire et les maladies du parenchyme rénal, les bilans hormonaux ne semblent pas recommandés (donc juste DAR).

Concernant le traitement, il y a bien sur les RHD sur lesquelles on ne reviendra pas. Avant 80 ans, le seuil d'initiation thérapeutique est 140/90mmHg (mais on peut commencer à 130/80 si prévention secondaire). Après 80 ans, le seuil d'initiation thérapeutique est 160mmHg de PAS (mais on peut commencer a 140 si on veut). La cible de PA à atteindre se mesure au cabinet (en AMT c'est pas étudié) et est de 130/80 entre 18 et 64 ans (pas merci à SPRINT qui ne correspond pas à des mesures au cabinet en vrai), de 140/90 entre 64 et  79 ans, et de  140-150 après 80 ans (mais <140 si bien toléré, ça va aussi). Enfin, ne JAMAIS viser une systolique <  120mmHg. Une bithérapie initiale est recommandée avec IEC (ou ARAII) + calcique/diurétique. La monothérapie s'envisage si grade 1 et faible risque, ou patient âgés/fragiles. En cas d'échec de bithérapie, la trithérapie est recommandée. Les BB- sont à mettre si une autre indication que l'HTA existe. En cas d'HTA résistante et après exclusion d'une HTA secondaire, la spironolactone est à ajouter, puis BB- ou alpha-bloquant, puis anti-HTA central. En cas de DFG < 30ml/min, la spironolactone est CI et ils recommandent un diurétique de l'anse en plus du thiazidique (mouais, vu que le thizidique est aussi CI si DFG < 30 normalement... on peut utiliser la chlorthalidone si DFG < 30 mais non dispo en France), et penser à ajouter l'inhibiteur de SGLT2 (voire la finerenone si diabète).

Enfin, voici quelques cas particuliers:

  • Sujets noirs: préférer calcique si monothérapie ou calcique + IEC et calcique + thiazidique si bithérapie. 
  • Grossesse: seuil et cible 140/90mmHg, avec labetalol ou alpha-methyl-dopa (2eme intention: nifedipine LP) + aspirine 100mg/j si risque de prééclampsie. 
  • HTA maligne: labetalol ou nicardipine (2ème intention: urapidil) (le nejm disait pas tout à fait ça). 
  • Coronaropathie: iec+BB- avec cible < 80bpm et si TA insuffisamment contrôlée, ajouter calcique dihydropiridine (=DHP, car on associe pas un BB- et un calcique bradycardisant) si angor et calcique DHP ou thiazidique en l'absence d'angor (faudra revoir car les BB- sont pas systématique en l'absence d'IC dans les recos ESC). 
  • FA: les BB- sont une classe de choix avec un objectif < 110 bpm voire  < 80 ppm si symptomatique. Eviter diltiazem et verapamil qui interfèrent avec les AOD. 
  • BPCO/Asthme: les BB- cardiosélectifs réduisent la mortalité en cas de coronaropathie, et ne sont donc pas contre indiqués.


2023: L'Académie américaine des médecins de famille a publié des recommandations concernant les cibles tensionnelles. Les auteurs recommandent une cible inférieure à 140/90 qui est l'objectif ayant démontré une réduction de mortalité. Ils proposent néanmoins d'avoir une cible inférieure à  135/85 dans le but d'obtenir une réduction des infarctus du myocarde, mais sans bénéfice sur les AVC ou la mortalité.

 2021: De son coté, la société européenne d'HTA a émis des recommandations concernant la mesure de la pression artérielle. Il n'y a rien de très neuf. Les mesures au cabinet doivent être confirmées par des mesures ambulatoires. Les indications de la MAPA sont : détecter l'HTA masquée et l'HTA blouse blanche, diagnostiquer l'HTA nocturne, confirmer des hypotensions liées à un surtraitement, et en cas de discordance entre les mesures au cabinet et les automesures tensionnelles. La MAPA est considérée comme étant la méthode préférentielle pour le diagnostic d'HTA, les AMT étant celles de choix pour le suivi (on ne va pas pouvoir faire des MAPA à tout le monde...)



2020: Commençons par parler des nouvelles recommandations concernant l'HTA chez l'enfant et l'adolescent de la SFHTA. Il faut noter que la plupart de ces recommandations sont de grade C (soit le plus faible niveau de preuve). Commençons par ce qui en a surpris plus d'un il y a quelques semaines: il est recommandé de mesurer la PA tous les ans à partir de l'âge de 3 ans, au bras droit (On a vu il y a quelques semaines qu'il n'y avait pas de preuves pour cette pratique d'après l'USPSTF). C'est recommandé avant 3 ans chez les patients avec des antécédents de pathologie cardiaque ou endocrinologiques. L'HTA est confirmée par 3 mesures anormales à 1 mois d’intervalle. Si l'enfant mesure moins de 120cm, ça suffit. S'il mesure plus de 120cm, une MAPA  est recommandée. Les automesures ne sont pas recommandées faute de valeurs de référence dans ces conditions. Voici les valeurs seuils simplifiées au cabinet (il y a les liens vers les tableaux précis selon le poids et la taille en fin de reco)

Le bilan initial comporte: une kaliémie, une créatininémie (DFG par formule de Schwartz), une recherche d'hématurie et un rapport protéinurie/créatininurie  (normale  <50  mg/mmol avant 2 ans et <20 mg/mmol après 2 ans). On y ajoute si obésité ou antécédent familial de dyslipidémie: une glycémie à jeun, un bilan  lipidique et un dosage des ASAT et ALAT.

Après le bilan, il est recommandé d'adresser car la suite relève d'un suivi spécialisé à cet âge. Les traitements seront en premier lieu des inhibiteurs calciques ou des IEC/ARAII. Les auteurs rappellent les contre indications à la contraception oestro-progestative en cas d'HTA.
 
 
2020: L'USPSTF (équivalent américain de la HAS) retrouve qu'il n'y a pas de preuves suffisantes pour évaluer la balance bénéfice risque d'un dépistage de l'HTA chez l'enfant et l'adolescent. Pour mémoire, en France le dépistage est recommandé annuellement à partir de l'âge de 3 ans...
 
2020: Après les recos européennes 2018 et les recos NICE 2019, voici les nouvelles recommandations concernant l'HTA par la société internationale d'hypertension qui produit les recos sous une forme originale et intéressante: elles sont développées en 2 niveau: les recos en version "essentielles" et en version "optimales".

Concernant le diagnostic, rien de neuf, le seul est à 140/90 au cabinet (moyenne des 2 dernières mesure sur 3 à 1 min d'intervalles, la 1ère suffit si <130/85) à confirmer par mesures au domicile du patient par MAPA ou automesures tensionnelles (2 mesures à 1 min d'intervalles matin avant prise du traitement et soir pendant 3 à 7 jours, là, c'est différent des recos de la SFHTA). Petit rappel sur les traitements auxquels on ne pense pas mais faisant monter la tension: les contraceptions combinées, les antidépresseurs, le paracetamol.

Concernant le bilan, il comprend systématiquement: Na, K, créatininémie, bandelette urinaire à la recherche de protéinurie et ECG; et si disponible EAL et glycémie à jeun (et non Hba1C comme les recos européennes). On peut ajouter l'acide urique et le bilan hépatique. Le reste n'est recommandé qu'en cas de suspicion d'atteinte d'organe cibles. A noter que la TSH fait partie du bilan d'HTA secondaire, et qu'il faut suspecter une HTA secondaire si: début < 30ans, hypokaliémie spontanée ou induite par les diurétiques, HTA résistante, urgence hypertensive ou atteinte d'organe cible.
Concernant les objectifs tensionnels, ils sont simples. 

  • En "essential": une baisse de 20/10mmHg, idéalement pour atteindre 140/90. 
  • En "optimal": Avant 65 ans: 130/80 (mais >120/70), et après 65 ans: 140/90 mais on peut faire plus bas si les traitements sont tolérés (donc on revient à des cibles moins élevées après 65 ans et non 80 ans). La bithérapie est recommandée d'emblée avec une association en 1 comprimé sauf TA < 160/100 ET absence d'autre facteur de risque (âge>65 ans, FC>80/min, IMC>25, diabète, dyslipidémie, antécédent familial cardiovasculaire, ménopause précoce, tabagisme, contexte psychosocial défavorable)

Concernant les molécules:

  • 1ère ligne: IEC (ou ARA2) +inhibiteur calcique faible dose puis pleine dose si besoin.
  • Puis trithérapie en ajoutant un thiazidique like plutôt qu'un thiazidique (c'est cohérent avec la littérature)
  • Si non contrôle, c'est une HTA résistante: ajout spironolactone (si K<4,5 et DFG>45)
  • Et si besoin, on peut utiliser: amiloride, doxazozine, eplerenone, clonidine ou les bêta bloquants (qui sont indiqués avant s'il y a une indication  type coronaropathie, fibrillation auriculaire ou insuffisance cardiaque, grossesse...)
D'après ce qu'on a vu dans les dernières revues du Lancet et du JAMA (ici), les thiazidiques sont les plus coût-efficaces, on regrette donc que l'association IEC+thiazidique like ne soit favorisée que si AVC, insuffisance cardiaque et sujet très âgés (j'aurais pas favorisé les diurétiques chez le très âgé...). Pour les sujets noirs, une alternative possible en 1ère ligne est inhibiteurs calciques+thiazidique like. (mais les thiazidiques étant une vieille classe peu rentable, ça m'étonnerait pas qu'il y a un lobby pour les évincer par rapport aux autres classes)

Concernant les autres traitements:

  • les antiaggrégants plaquettaire ne sont recommandés qu'en prévention secondaire quelque soient les autres co-morbidités
  • les objectifs de LDL: < 0.55g/L ou < 0,7g/L si coronaropathie (selon le paragraphe...), <0,7g/L si post AVC, diabète ou haut risque, < 1,15g/L si risque cardiovasculaire modéré
  • pas de traitement de l'hyperuricémie en l'absence de symptômes.

Concernant les urgences hypertensives, ils recommandent le labetalol (ça c'est consensuel) ou la nicardipine (ça l'est un peu moins)



2019 : Le BMJ revient sur l'hypertension artérielle en parlant des nouvelles recommandations britanniques du NICE (qui ne suivent pas vraiment les recos européennes de 2018). L'HTA est toujours définie comme une tension supérieure à 140/90, qui doit être confirmée en ambulatoire préférentiellement par une MAPA par rapport à des AMT (norme < 135/85). Une recherche d'hypotension orthostatique est recommandée si diabète, âge >80 ans ou symptômes d'hypotension orthostatique La nouveauté consiste dans l'évaluation du risque cardiovasculaire par le QRisk et le bilan des complications: bandelette urinaire, ionogramme, créatininémie, EAL, ECG et examen du fond d'oeil. Un traitement médicamenteux d'emblée est recommandé à partir du stade 2 (TA en ambulatoire > 150/95) ou à partir du stade 1 si atteinte d'organe et/ou risque cardiovasculaire >10% selon le Qrisk. 

Au niveau des traitements, la grande nouveauté est le fait de recommander un inhibiteur calcique chez les plus de 55 ans (pourquoi 55?) non diabétiques et chez les sujets noirs (et non un thiazidique alors que les britanniques étaient les premiers à favoriser ce traitement dans les précédents recos). Ensuite, quand la monothérapie n'est plus efficace, et qu'une bithérapie est proposée, c'est un thiazidique like et non un thiazidique qui est à proposer, ce qui est probablement justifié en effet (au choix avec les autres classes, cf l'algorithme). Enfin, en cas d'HTA résistante la trithérapie recommandée comprend la spironoactone si la kaliémie est inférieure à 4,5mmol/L, et un bêta-bloquant si elle est supérieure.

Quelques détails: quand un bloqueur du système rénine angiotensine, les ARAII sont à privilégier sur les IEC chez les sujets noirs (c'est concordant avec ce que dit la SFHTA sur un sur-risque d'angio-oedème, mais ils ne diminuent quand même pas la mortalité...)

Un bilan spécialisé urgent est recommandé si TA >180/120 et atteinte d'organe cible, sinon un bilan d'HTA secondaire doit quand même être fait si âge < 40 ans ou HTA résistante.

Les objectifs sont de 140/90 chez les moins de 80 ans et 150/90 chez les plus de 80 ans.

Bref, des recos qui reviennent sur des objectifs tensionnels classiques et la monothérapie initiale. Mais les molécules proposées sont discutables étant donné l'absence des diurétiques en 1ère intention (à cause des effets secondaires malgré le bénéfice net supérieur aux inhibiteurs calciques et semblable à celui des IEC qu'il faudrait peut être alors privilégier, cf ici) et le retour des bêtabloquants (mais c'est peut être pas mal de les placer là en cas de contre-indication à la spironolactone)



2018 : Moins de 2 ans après la publication des recos HAS de 2016 copiant les recos européenne, de nouvelles recommandations européennes (ESC et ESH) ont été présentées au congrès européen d'HTA. Enormément de changements sont à prévoir:
- le diagnostic de l'HTA se fait toujours par automesures tensionnelles (en général) ou MAPA qui doit être préférée en cas de suspicion d'HTA nocturne (bilan de SAOS, de néphropathie, de diabète...)
- une tension < 120/80 peut être contrôlée tous les 5 ans, inférieure à 125/85 tous les 3 ans et < 139/89 tous les ans, pour ce qui est des valeurs en cabinet. Si la tension au cabinet est > 140/90, c'est là qu'il faut effectuer une mesure ambulatoire.
- en cas d'HTA blouse blanche, un traitement peut être indiqué en présence d'atteinte d'organe pouvant correspondre à de l'HTA (néphropathie, HVG, rétinopathie)
- le bilan du retentissement doit comprendre un ECG, créatininémie, protéinurie/créatininurie et un fond d'oeil surtout pour les grades 2 et 3 (ça c'est nouveau. Le reste du bilan initial: NFS plaquettes, EAL, glycémie à jeun et HbA1C (comme aux USA!), Na, K, acide urique, bilan hépatique 
- comme dans les reco américaines, il est recommandé de traiter dès 130/85 les patients en prévention secondaire ou à très haut risque. Pour les autres, entre 140/90 et 159/99 le traitement est à débuter après 3 à 6 mois de règles hygiénodiététiques, et au delà de 160/100, un traitement est à débuter d'emblée.
- nouveau gros changement: traiter, avec quel objectif: Il faut savoir que les études n'ont pas étudié d'objectif sur des mesures ambulatoires, donc ce sont des objectifs AU CABINET:

  • Avant 65 ans: < 130mmHg (mais > 120)
  • Entre 65 et 80 ans: <140mmHg (mais > 120) 
  • Après 80 ans: < 140mmHg (mais > 130) (alors que les anciennes recos disaient <150 sans hypotension)
  • Et pour les diastoliques: entre 70 et 80mmHg
- par quel médicament commencer? Pour une fois, les auteurs prennent leurs responsabilités et conseillent enfin des classes! autre gros changement: il faut débuter par une BITHERAPIE en 1 comprimé. Exceptions à l'introduction d'une bithérapie initiale: TAS<150mmHg et faible risque CV ou patient fragile. En effet, même si ça peut sembler plus lourd, il faut préférer des multithérapies faibles doses aux des thérapies forte doses qui donnent davantage d'effets indésirables:

  • commencer par IEC/ARAII+thiazidique ou IEC/ARAII+inhibiteur calcique.
  • les bêta bloquants peuvent être utilisés dans l'association initiale s'ils sont indiqué pour une autre raison (ACFA, post-infarctus...) 
  • si la tension n'est pas contrôlée: IEC/ARAI+inhibiteur calcique+thiazidique (de préférence en 1 comprimé, mais ça n'existe pas en France de façon remboursée, donc faudrait que la sécu se mette à jour).
  • si la TA n'est pas contrôlée, c'est une HTA résistante, et on pourra ajouter: spironolactone (ou a défaut un autre diurétique épargneur potassique, ou un thiazidique forte dose ou un bêta bloquant (bisoprolol et nébivolol semblent les mieux éprouvés) ou un alphabloquant (la doxazosine est la seule citée, hors AMM)
- Concernant les molécules :

  • le choix IEC ou ARAII: pas de différence d'efficacité d'après les recos (et pas de molécule recommandée), un peu plus d'arrêt de traitements sous IEC, et éviter les IEC chez les sujets noirs qui seraient plus sujets à l'angio-oedeme et donc préférer un ARAII d'emblée si on doit en mettre un. Mais bon, même si en comparaison directe il n'y a pas de différence d'efficacité, les IEC sont les seuls à avoir montré un gain de mortalité globale versus placebo...
  • Pour les inhibiteurs calcique, c'est l'amlodipine qui est principalement recommandée car c'est le seul avec une efficacité bien prouvée. (éventuellement verapamil et diltiazem) 
  • Pour les diurétiques, les thiazidiques-like (indapamide) seraient un peu plus efficace que l'hydrochlorothiazide mais il y a peu de comparaisons directes. 



2018 : La Société Française d'HTA a publié de bonnes recommandations sur plusieurs sujet! La première concerne la mesure de la pression artérielle: les automesures sont indispensables, et les mesures au cabinet doivent être effectuées de préférence avec des appareils automatisé et de préférence au niveau brachial plutôt qu'au poignet (car variabilité plus grande à cause de la position précise que doit avoir le bras). Concernant la mesure au cabinet, elle s'appelle maintenant MRC (mesure répétée au cabinet): 3 mesures de suite et la valeur à retenir est la moyenne des 2 dernières mesures, prise au bras avec la tension la plus élevée. La MAPA est indiquée en l'absence d'AMT possible, de suspicion d'HTA nocturne, d'HTA résistante et de suspicion de grande variabilité tensionnelle

2018 : Une autre reco de la SFHTA s'appelle "HTA, hormones et femmes", et a été faite en collaboration avec un bon nombre de sociétés savantes de gynécologie. A part les trucs classiques (mesures habituelles, risque cardiovasculaire et contraception...) des notions très intéressantes y sont abordées: 

  • en post ménopause avec risque de fracture: thiazidiques a préférer (et chez les autres aussi en fait, mais la SFHTA met enfin des noms de molécule!)
  • en cas de migraines: bêta bloquants en 1ère intention, mais candesartan en 2ème (première fois que le candesartan apparait pour les migraines dans une reco française)
  • si SOPK: spironolactone

Il y a ensuite des recommandations sur quand il ne faut pas donner de THM: en gros, il faut éviter tout le temps.

2018 : Des recommandations axées HTA et sportif en compétition ont été publiées par l'ESC dans la lignée des nouvelles recos. Pour faire simple, c'est comme pour les autres patients et on évite encore plus bêta bloquants car considérés comme dopants. Ce qui est intéressant, c'est l'algorithme pour savoir si on peut signer le certificat. 

  • Tant que la TA n'est pas contrôlée: pas de compétition, 
  • Le temps que la TA soit contrôlée, on fait le bilan pour rechercher une atteinte d'organe cible et le retentissement (echo coeur, épreuve d'effort). 
  • Si tout est normal: compétition pour tous les sports
  • Si atteinte d'organe cible (TOD sur la figure) ou comorbidité cardiologique (ACC sur la figure = coronaropathie, AOMI, AVC, insuffisance cardiaque, ACFA, rétinopathie sévère, insuffisance rénale): ok sports SAUF les sports de force (athlétisme, ski/snowboard/bobsleigh, sport de combat)


2018 : La Société française d'HTA a publié des recommandations concernant l'HTA chez les sujets noirs. Le document est plutôt mal fait, pas de points reco clairs, mais un long texte avec des questions. On arrive quand même à trouver que les freinateurs du SRA (IEC, ARAII et bêta bloquants) sont moins efficaces que les autres traitements, mais que ceux ci se trouve potentialisés en cas de bithérapie avec un diurétique thiazidique ou un inhibiteurs calcique. C'est assez en faveur des recos de l'ESC qui prônent une bithérapie d'emblée, particulièrement importante pour que l'effet protecteur vasculaires des IEC et ARAII soit présent.

2017: En effet, des nouvelles recommandations sur l'HTA font parler d'elles à cause du nouveau seuil diagnostique: 130/80! ( >130/80: stade 1, >140/90: stade 2, >180/120: poussée hypertensive). Les recos du JNC8 (et leur cible de 150/90 chez les plus de 60 ans) ont été totalement zappées à cause de SPRINT dont les mesures de tension étaient proches de mesures à domicile et non de mesure "classiques en cabinet". En réalité, il n'y a pas tant de chose qui changent. Il faut d'abord rappeler que l'HTA est un facteur de risque cardiovasculaire et non une maladie, il n'y a donc pas plus de "malades" au nouveau seuil, mais il y a plus de patients avec un facteur de risque. Le diagnostic repose soit sur des mesures ambulatoires soit au cabinet, avec une attention particulière pour l'HTA masquée, c'est à dire : des patients hypertendus qui ont des tensions normales au cabinet voire même sur des automesures à domicile, mais qu'il faut investiguer par MAPA en cas de tableau évocateur (céphalées, asthénie, nycturie...) avec atteinte d'organe (protéinurie, hypertrophie cardiaque....).
Le bilan au diagnostic est un peu plus étendu dans leurs recommandations:

  • NFS-plaquettes, EAL, glycémie à jeun, Na, K, calcémie, créatininémie, TSH, BU et ECG systématiquement,
  • albuminémie/créatininurie , acide urique, échocardiographie de façon optionnelle
Ce qui chance surtout c'est l'indication de traitement avec ce nouveau seuil:

  • pour des patients à risque cardiovasculaire élevé (score AHA >10%, ce qui correspondait à un SCORE européen > 5%) ou en prévention secondaire: traiter à partir de 130/80
  • pour les patients à risque non élevé (AHA < 10%, donc SCORE < 5%): traiter à partir de 140/90.
Pour ce qui est des objectifs tensionnels, c'est 130/80 pour tout le monde, une fois le traitement débuté.
Les auteurs proposent une bithérapie d'emblée en cas d'écart à l'objectif supérieur à 20/10mmHg. Dans ces recommandations, les bêtabloquants ne sont pas des traitements à utiliser avant d'avoir épuiser les autres classes classiques, la spironolactone est indiquée dans l'HTA résistante malgré une trithérapie, et les antihypertenseurs centraux sont à utiliser en dernier recours.
Je ne m'étendrai pas plus sur ces recos, PUAutomne l'a déjà fait! 


2017: Ainsi, l'académie de médecine américaine a donné ses recommandations sur la prise en charge de l'HTA du patient de plus de 60 ans: objectif 150/90, sauf si le patient présente un haut risque cardiovasculaire ou s'il est en prévention secondaire (antécédent d'infarctus, d'AVC ou d'AIT) auquel cas il faut cibler 140/90. (Bien évidemment ces objectifs sont à discuter avec le patient selon le principe de la décision partagée)

2017: Les sociétés françaises d'HTA, d'endocrinologie et de chirurgie endocrine ont publié des recommandations dans l'hyperaldostéronisme primaire (une VF intégrale est dispo sur BMLweb). Elles sont longues et subdivisées en chapitre mais on va essayer de résumer. Du point de vue du généraliste, il faut noter les circonstances devant faire rechercher cet hyperaldostéronisme:

  • HTA sévère (>180/110)
  • HTA résistante (sous trithérapie comprenant un thiazique: indapamide quelque soit la dose ou hydrochlorothiazide à 25mg)
  • une hypokaliémie spontanée OU ASSOCIÉE à la prise d'un diurétique
  • une HTA avec un incidentalome surrénalien
  • une HTA avec un retentissement organique disproportionné par rapport au niveau d'HTA.
Il faut faire une mesure du rapport aldostérone/rénine prélevé : le matin, plus de 2 heures après le lever, en position assise depuis 5 à 15 minutes, en régime normosodé, en normokaliémie et sans traitement interférant :anti-HTA (sauf inhibiteurs calciques et alpha-bloquants ), ni AINS, stoppés depuis 2 semaines, diurétiques épargneurs et oestro-progestatifs stoppés depuis 6 semaines. On peut utiliser les autres antihypertenseurs et les centraux pour contrôler la tension avant le bilan (sauf la clonidine qui intervient également)
Rechercher ensuite une cause en commençant par un TDM surrénalien.

2016: La HAS a publié une fiche mémo sur la prise en charge de l'HTA. C'est une redite des recommandations de la SFHTA de 2013. Le point sur la fréquence des bilans s'avère un peu plus intéressant: tous les 1 à 2 ans pour la partie néphrologique (Na, K, créatinine, protéinurie) et tous les 3 ans pour la partie métabolique (glycémie, dyslipidémie). L'ECG n'est justifié que tous les 3 à 5 ans en l'absence d'autre facteur de risque.

2015: L'USPSTF a établi des recommandations sur le dépistage de l'HTA . Le dépistage d'hypertension doit d'effectué tous les 3 à 5 ans avant 40 ans, ou annuellement après 40 ans ou en cas de facteurs de risque (TA > 130/85, surpoids et origine africaine sub-saharienne.). La prise de tension devrait consister en une moyenne de 2 mesures prises avec un brassard situé au même niveau que le coeur, après au moins 5 minutes après l'entrée dans le bureau du médecin. Les recos insistent sur le fait de confirmer l'HTA par des mesures ambulatoires et de débuter par un traitement comportant des thiazidiques ou des inhibiteurs calciques. 

2015: Il faut noter la sortie de la conférence d'experts sur l'hypotension orthostatique . Ce qui est cadré, c'est le temps auquel il faut prendre la mesure debout (3 minutes). L'intérêt de la midodrine en traitement des hypotension orthostatiques neurogènes (c'est à dire avec dysautonomie) est à évaluer au cas par cas, une position modérée qui semble justifiée. Le tableau suivant récapitule simplement les mesures non-pharmacologiques à mettre en place dans tous les cas. 


2014: Le congrès a également fait un point sur le recommandations actuelles de l'internatinal society of hypertension qui sont les recommandations internationales actuelles. J'avoue que je suis déçu des objectifs tensionels car ceux du JNC8 (recommandations américaines) me semblent plus adaptés aux données de la littérature en terme de pertinence clinique.

2/ Cibles tensionnelles

La pression artérielle est particulièrement variable selon les circonstances de mesures. Cette publication s'intéressant notamment à la taille du brassard, montre aussi les variations de PA liés aux autres circonstances de mesure :


 
Le Lancet a publié une revue de la littérature concernant les différentes recommandations sur l'HTA. Pour bien montrer que personne n'est d'accord, ils ont fait un tableau. J'étais assez fan des recos américaines JNC8 parce que facile a retenir et que ce sont les plus récentes, et donc peut être les plus à jour. Mais il faut quand même savoir qu'il ne s'est écoulé que 6 mois entre les recommandations de la société française d'HTA (non représentées ici), celles de la société européenne de cardiologie (ESC), celles de la société canadienne d'HTA (CHEP) et celles du JNC8. Comme quoi avec des données pas si différentes, on arrive a des recos pas tout à fait pareil...


Alors qu'aux Journées d'HTA les présentateurs déplorent la baisse du taux de contrôle tensionnel à 42% des patients en France, les données 2019 retrouvent que nous avons le plus faible taux de mortalité cardiovasculaire et les plus faibles incidences d'infarctus et AVC en Europe. Dans ce contexte, Annals of Family medicine s'intéresse à l'HTA pour différencier l'inertie thérapeutique de l'inaction appropriée. Les auteurs ont inclus des patients avec des mesures tensionnelles > 140/90 mmHg au cabinet et leur ont fait faire des automesures tensionnelles (AMT). Parmi ces patients, 66% avait des automesures < 140/90 mmHg, et 61% des patients ayant des AMT > 140/90 mmHg ont eu une intensification du traitement. Alors, on va dire "c'est logique!", puisque la correspondance de 140/90 mmHg au cabinet est de 135/85 mmHg en AMT: logique qu'une partie des patients non contrôlés au cabinet le soit en AMT si on prend 140/90 mmHg en seuil. Cependant, aucune étude n'a évalué le seuil de 135/85 en AMT pour établir le contrôle tensionnel (c'est prouvé seulement pour le diagnostic). Donc, on en revient au problème évoqué dans les recos de l'ESC: on prône les AMT, mais les objectifs ne sont étudiés que sur des chiffres au cabinet... Bref, on voit quand même que les patients non contrôlés à domicile voient leur traitement intensifié, il ne semble pas trop y avoir d'inertie thérapeutique, (sachant que pour les 39% non intensifié, les médecins justifiaient leur décision en disant que le déséquilibre était lié à un facteur contextuel transitoire).
 
La Cochrane revient sur les cibles tensionnelles chez les patients en prévention secondaire. Les auteurs retrouvent qu'il n'y a pas de bénéfice en terme de mortalité globale ou cardiovasculaire à choisir une cible tensionnelle de 135/85 ou moins par rapport à la cible classique de 140/90. De même, le critère composite d'évènements cardiovasculaire survenait de façon non significative, moins fréquemment chez les patients avec une cible tensionnelle plus basse. Donc 140/90 semble être un objectif suffisant.
 
Après le congrès de cardiologie prônant, comme souvent le "lower is better" concernant les cibles tensionnelles, la Cochrane retrouve que viser plus bas que 140/90 ne réduit pas la mortalité. Cependant, il y a probablement moins d'infarctus du myocarde (NNT= 250 sur 3,7 ans), moins d'insuffisances cardiaques (NNT= 167 sur 3,7 ans). Les effets secondaires totaux étaient sensiblement similaires car la diminution des évènements cardiovasculaires était compensée par une augmentation des autres effets secondaires (NNH= 33 sur 4 ans). Les auteurs concluent donc que le bénéfice ne surpasse pas les risques et qu'il vaut mieux s'en tenir aux cibles standard.
 
Le NEJM propose une étude ciblant 110-130mmHg de PAS versus 130-150 chez des patients chinois âgés en moyenne de 66 ans (ce qui n'est pas vraiment "older patients"). Les patients traités intensivement avec une PAS à 126 versus 135, et avaient un risque moindre risque d'évènements cardiovasculaires (NNT= 250 patients/an) sans réduction de la mortalité cardiovasculaire ou globale. C'est cohérent avec la reco proposant d'essayer de cibler 130mmHg. Cependant, le bénéfice de ce traitement intensif est bien moins marqué dans d'autres articles; il est probable que la population chinoise ne réponde pas aux même caractéristique que les européens et que cette étude ne soit pas transposable à nos patients.

Quand traiter l’HTA? La revue prescrire avait déjà à de nombreuse reprise pris comme seul d’intervention médicamenteuse, une PAS supérieure à 160mmHg ou une PAD supérieure à 90-100mmHg (Seuil d'intervention médicamenteuse dans l'hypertension artérielle, Rev Prescrire 2014 ; 34 (366) : 278). Une méta analyse Cochrane va dans ce sens, ne retrouvant pas de différence entre traitement médicamenteux et pas de traitement pour ce qui est des infarctus, des AVC et de la mortalité toute cause à 5 ans. Les règles hygiéno-diététiques sont souvent un bon traitement initial.
 
Alors que les recommandations dans l'HTA sont d'initier le traitement par une bithérapie, la Cochrane a étudié le bénéfice de cette bithérapie initiale versus une monothérapie. Les auteurs concluent qu'il n'y a aucun bénéfice démontré sur des critères de mortalité ou d'évènements cardiovasculaires et que les recommandations ne s'appuient pas sur des essais cliniques puisqu’il n'existe pas de bénéfice mis en évidence dans ces essais.

Quand débuter un traitement de l'HTA? Selon La Revue Prescrire, la balance bénéfice risque du traitement médicamenteux était défavorable pour l'HTA de grade 1. Une méta analyse a étudié l'effet d'un traitement pour ce type d'hypertension chez des patients sans maladie cardio-vasculaire. L'étude retrouve une diminution de 25% de la mortalité cardio-vasculaire et de 22% de la mortalité totale (sans baisse significative des éléments suivants pris séparément: infarctus, insuffisance cardiaque et évènements cardio-vasculaires). Intéressant, mais, la majorité des patients de ces études étaient diabétique, ce qui diminue fortement son applicabilité aux patients qui n'ont pas de facteur de risque supplémentaire. 
 
Une étude chinoise s'est à nouveau intéressée au traitement intensif de la pression artérielle dans un essai contrôlé randomisé chez des patients âgés de 60 à 80 ans. Ainsi, les patients du groupe intensif avaient pour cible une PAS entre 110 et 130mmHg et le groupe contrôle une PAS entre 130 et 150mmHg. Bien que ce soient des cibles mesurées au cabinet, les patients avaient un appareil d'automesure couplé à une appli qui envoyait les données de mesures ambulatoires au médecin. Le critère de jugement était un critère composite d'évènements cardiovasculaires. 8000 patients âgés de 66 ans en moyenne (donc plutôt jeunes au final), avec 146mmHg de PAS ont été randomisés et suivis pendant 3 ans (au lieu de 4 devant un bénéfice clinique clair d'après le comité de suivi). Dans le groupe intensif, la PAS à la fin de l'étude était de 127mmHg (vs 136 mmHg dans le groupe contrôle) et avaient 26% d'évènements cardiovasculaires en moins (NNT: 250/an). Sur les composantes du CJP, il y avait moins d'AVC (NNT; 500/an) et moins d'infarctus (NNT=500/an) mais la mortalité cardiovasculaire était inchangée. Le nombre d'hypotensions était bien évidemment augmenté (NNH=125 patients/an) sans augmentation des insuffisances rénales. De façon intéressantes, les mesures ambulatoires étaient de 129mmHg vs 138mmHg en fin d’étude donc supérieures de celles « au cabinet », ce qui est assez discordant car les mesures au cabinet sont normalement supérieures de 7 à 10mmHg (on en avait parlé ici et ). Le problème est donc le même que dans l’étude SPRINT, les mesures « au cabinet » étaient probablement particulières et peu reproductibles. Si on se fie aux automesures, on voit que les patients avec plus de 135mmHg ont des évènements supérieurs à ceux inférieurs à 135 de PAS, ce qui est concordant avec la cible classique d'être < 135mmHg en automesure. Bref, cette étude va être utilisée pour dire qu'il faut cibler < 130 mmHg de PAS alors qu'elle ne montre probablement rien d'autre que l'intérêt d'être en dessous de 135mmHg en mesures ambulatoires.
 
Une méta-analyse du Lancet incluant 350 000 patients dans 48 essais randomisés a conclu que chaque baisse de 5mmHg réduisait de 10% le risque relatif d'évènements cardiovasculaires et de 5% la mortalité cardiovasculaire. Quand on va regarder le détail des figures, on s'aperçoit: d'une part que la mortalité globale n'est pas diminuée par cette baisse de 5mmHg, et d'autre part qu'en prévention primaire et secondaire, les AVC et les infarctus sont significativement diminués de façon linéaire pour une baisse de 5mmHg seulement pour des PAS initiales supérieures à 140mmHg (et inférieure à 120mmHg de façon un peu étrange. C'est certainement à cause de l'étude SPRINT qui avait cette cible mais on a déjà parlé des mesures de tensions dans cette étude qui sont hétérogènes par rapport aux autres études et dans laquelle une cible de 120mmHg correspond plutôt à 130mmHg mesuré de façon classique). Bref, non, il ne semble pas indispensable de baisser la tension le plus bas possible pour limiter les évènements cardiovasculaires d'autant plus que la mortalité globale ne semble pas améliorée.

Alors que les recos européennes intensifient le traitement dans l'HTA, un nouvel article du JAMA internal medicine revient sur l'HTA modéré des patients à risque cardiovasculaire faible et modéré. En effet, en cas de haut risque, il faut traiter fort, mais pour les autres... Cette étude de cohorte a suivi 20 000 patients hypertendus avec une tension inférieure à 160/100 en prévention primaire. Les auteurs ne retrouvent pas de gain de mortalité chez les patients traités versus non traités! Ni de gain sur les évènements cardiovasculaires. Il y a cependant une augmentation, à 5 ans, du nombre d'hypotensions (NNH= 219), de syncopes (NNH =135), de troubles hydroélectrolytiques (NNH=580) et d'insuffisances rénales aiguës (NNH= 467) .



La première partie est consacrée aux articles publiés lors du congrès 2017 de l'American Heart Association. 
Et pendant ce temps, une méta-analyse était présentée, ne montant qu'un bénéfice certain à traiter les patients en prévention primaire avec un objectif plus stricte de 160 de PAS et mineur (uniquement retrouvé sur l'insuffisance cardiaque) quand l'objectif était de 140 mmHg , alors que la reco incitait à avoir un objectif à 130/80 (seuil même pas testé dans cette méta-analyse parce que le bénéfice à 140 était déjà pas grand...) Bref, la science versus les experts... (et leurs conflits d'intérêt?)



Un article de Plos Medicine s'est intéressé au traitement de l'HTA pour répondre à la question: faut il avoir une cible tensionnelle basée sur le chiffre de pression artérielle ou sur le risque cardio-vasculaire? Cette méta-analyse incluant 50 000 patients a donc modélisé une prise en charge selon des objectifs tensionnels par rapport à une prise en charge selon le risque cardiovasculaire (comme pour le cholestérol en gros, mais la procédure n'est malheureusement pas suffisamment détaillée). Les auteurs retrouvent que la prise en charge selon le risque est plus efficiente qu'une prise en charge sur des objectifs tensionnels, avec un contrôle meilleur de près de 10mmHg de PAS mais surtout un NNT bien meilleur pour éviter des évènements cardiovasculaires chez les patients avec un risque cardiovasculaire > 5% à 5 ans. (C'est dommage d'utiliser un score à 5 ans alors que la plupart des recommandations utilisent un calcul de risque à 10 ans) 

Voici une étude de Circulation, étudiant les mesures de tension dans les études contrôlées randomisées ayant entrainé la modifications des recos américaines avec une cible plus basse. Ces analyses mettent en évidence une courbe en J, entre les valeurs de la PAS et la mortalité globale. Ainsi, on voit bien que sur-traiter augmente la mortalité. Chose étrange, le nadir (point le plus bas de la courbe correspondant à la tension à obtenir pour avoir le meilleur bénéfice) n'est pas situé au même endroit dans les groupes traitement standard ou traitement intensif... Les auteurs concluent qu'on ne peut donc pas se fier aux études de cohortes car il y aura la courbe en J, mais uniquement aux essais randomisés qui permettent en fait de trouver un "meilleur" nadir de PAS selon les groupes. Il y a peut être également un facteur qu'on a pas encore identifié qui intervient...


Les recos de l'ESC sont pour viser une TAS inférieure à 130mmHg. Cependant, il semble que le bénéfice de ce traitement intensif ne soit pas évident du tout, si on se réfère à un article publié dans le journal de la société américaine de cardiologie. C'est une méta-analyse dans laquelle les auteurs regardent les bénéfices de ce traitement intensif avec et sans l'étude SPRINT. Avec l'étude SPRINT, on voit des baisses significatives de maladies cardiovasculaires (essentiellement porté par les AVC en fait). Sans l'étude SPRINT, le bénéfice ne porte plus que sur les AVC non fatals. Pas de bénéfice de mortalité globale ni cardiovasculaire dans aucun des cas. Il est probable que cet objectif européen ait été mis pour inciter à avoir une TA vraiment inférieure à 140mmHg, car on sait bien qu'un patient à 142mmHg, on n'intensifie pas son traitement si l'objectif est à 140mmHg.

On repart sur l'analyse de l'étude SPRINT (rappelez vous...). L'article du JAMA est une étude du sous groupe des plus de 75 ans (qui était déjà présenté brièvement dans l'article princeps du NEJM, du coup, je ne sais pas si c'est vraiment un article original...). Bref, l'étude compare désormais le traitement intensif de la tension artériel (objectif < 120) versus classique (<140mmHg) et retrouve une diminution significative de la mortalité de 33% et des évènements cardiovasculaires de 34%! Si on regarde les NNT (nombre nécessaire de sujet à traiter), pour sauver une vie, il faut traiter 233 patients de plus de 75 ans à haut risque par an. Et pour le coup, il n'y a pas vraiment plus d'effet secondaires (enfin, ce n'est plus significatif vu qu'il y a moins de monde...) Tirer des conclusions sur une analyse de sous groupe n'est généralement pas une bonne chose.  Si on s'amuse à regarder le tableau d'efficacité selon la fragilité, on voit que traiter intensivement chez les patients "en forme" n'est pas utile, que traiter intensivement les patients "moins en forme" est efficace, mais que ce  n'est plus toujours utile de traiter intensivement les patients "fragiles"... Il n'y a pas de linéarité logique entre l'intérêt de traiter intensivement et l'état de fragilité, ce qui est étrange, mais il semble que le bénéfice d'un traitement intensif soit moindre chez les patients fragiles. Sachant que les recos américaines, européennes et françaises disent que pour cet âge, il faut viser 150mmHg et non 140 ni 120, comment cette étude va t elle les faire évoluer?. 

Dans l'HTA, avec les nouvelles recommandation américaines avec des seuils d'HTA abaissé et l'étude SPRINT qui retrouvait un bénéfice au traitement intensif après 75 ans on se demandait si les recos françaises et l'objectif de 150mmHg était toujours adapté chez le sujet âgé. Cette étude longitudinale chinoise publiée dans le BMJ et incluant des patients de 92 ans en moyenne, retrouve une jolie courbe en U, avec une majoration de la mortalité avec des tensions inférieures à 110mmHg et une augmentation à partir de 160mmHg de PAS. Cela lasse une cible assez large. Ce qui est particulièrement intéressant, c'est de regarder les courbes de mortalité spécifique: quand on baisse la TA, la mortalité cardiovasculaire continue de baisser de façon quasi-linéaire, alors que la mortalité non-cardiovasculaire augmente.

Selon une méta-analyse en réseau, les patients hypertendus avec une tension artérielle entre 120 et 124mmHg auraient un risque de mortalité inférieure de près de 30% (risque relatif) par raport à ceux entre 130 et 134mmHg. Lower is better? Cela irait dans le sens de l'étude SPRINT pour laquelle le traitement intensif était plus efficace mais controversée à cause de la mesure de tension qui était réalisée dans des conditions "beaucoup plus calmes" que dans les autres études

Voici une semaine qu'elle est disponible: l'étude SPRINT! J'ai déjà parlé de ses résultats "en gros" à plusieurs reprises et certains blogueurs ont également donné leur avis (Perruche, Hippocrate et Pindare). Ce que je vais en dire recoupe donc en partie ce qui a été dit. L'étude SPRINT est un essai contrôlé randomisé ayant inclus plus de 9 000 patients hypertendus avec soit un objectif tensionnel placé a 120mmHg, soit 140mmHg. La méthodologie est bonne, il n'y a rien à redire là dessus. L'étude retrouve une diminution de 25% des évènements cardio-vasculaire et de  27% de la mortalité globale, au prix d'une multiplication par 3 des insuffisance rénales, par 1,7 des insuffisances rénales aiguës et des hypotensions. Pour remettre tout ça en situation, est ce que ça va directement modifier la pratique? Faut il traiter tout le monde pour avoir une cible à 120mmHg? Si on regarde les patients inclus, il étaient âgés d'au moins  50 ans, haut risque cardiovasculaire, mais n'étaient pas diabétiques (ce qui est étrange comme critère d'exclusion pour une telle étude...) et n'avaient pas d'antécédent d'AVC. Du coup, ça réduit énormément la population cible étant donné que les patients jeunes ne sont pas concernés, les diabétiques non plus et les patients hypertendus sans être à haut risque cardiovasculaire non plus. A propos des résultats, si on calcule les nombres de sujets à traiter, on trouve que pour éviter un évènement du critère primaire il faut traiter intensivement 186 patients par an, 555 pour éviter une mort cardio-vasculaire et 270 pour éviter une mort quelque soit la cause. Cela entrainera une insuffisance rénale pour 1 patient sur 345 par an, une insuffisance rénale aigue chez  1 sur 167 et 1 sur 272 fera une syncope. Enfin, précisons que ces effets indésirables ne sont que ceux déclarés comme sévère ou ayant nécessité une consultation aux urgences. Au final, une belle étude, très restrictive sur les patients concernés, mais qui laisse supposer qu'il existe un intérêt à traiter plus intensément les patients à haut risque cardio-vasculaires. Cette étude intervient après les "assouplissements" des objectifs tensionnels notamment du JNC8 (reco américaines) qui préconisaient 140/90 pour les patients de moins de 60 ans ou avec un risque cardio élevé  ou avec maladie rénale chronique, et 150/90 après 60 ans (qui étaient des reco que j'aime particulièrement) Alors ce que ça change: rien pour la majorité des patients, mais être plus strictes chez ces patients à haut risque TANT QUE LE TRAITEMENT EST BIEN TOLÉRÉ! (attendons de voir l'étude publiée pour voir les effets indésirables de cet objectif)

L'article publié dans le Lancet fait une méta analyse de patients traités "intensivement" versus "classiquement", chaque groupe atteignant respectivement au final des tensions de 133/76 et 140/81. Le groupe de traitement intensif diminuait de 14% le nombre d'évènement cardiovasculaire par rapport au traitement classique, mais sans effet sur la mortalité cardiovasculaire ou globale. Il y avait significativement plus d'effet indésirables grave dans le groupe de traitement intensif (OR= 1,35) et plus hypotensions sévères bien qu'elles soient rares (0,3% vs 0.1%)

Une méta-analyse publiée dans le JAMA internal medecine comparait un traitement de la tension artérielle intensif (< 130/80) versus habituel (< 140/90) chez les patients non diabétiques avec une néphropathie. Après 3 ans de suivi médian, le contrôle intensif n'a pas permis de ralentir la progression de la maladie rénale chronique ni de diminuer la mortalité globale. Les effets secondaires des traitements n'ont cependant été que peu étudiés.

Reparlons d'hypertension artérielle. D'abord, une méta-analyse a évalué les bénéfices d'un traitement "intensif" versus "standard" chez les patients de plus de 60 ans. Les auteurs retrouvent qu'avoir une PAS inférieure à 150mmHg réduit significativement les risques de mortalité, d'infarctus et d'AVC. Avoir un objectif à 140mmHg ne diminue pas davantage la mortalité, mais réduit légèrement les infarctus et AVC non fatals, sans majoration du risque de chute ni de trouble cognitif. Mais il y a alors une augmentation des hypotensions, des syncopes et du fardeau du traitement.

Un article du JAMA étudiait l'hypertension artérielle et les troubles cognitifs. Il retrouve que l'HTA est associé à un déclin cognitif plus rapide que les personnes sans HTA, mais également que les patients hypertendus traités avaient un déclin cognitif moins rapide à 20 ans que les patients hypertendus non traités. Enfin, les patients traités selon les recommandations du JNC-8 (c'est à dire à partir d'objectif tensionnels plus élevés après  60 ans) avaient un déclin cognitif supérieur à ceux traités à partir des seuils "classiques" (140/90). De quoi réévaluer l'intérêt des traitements anti-hypertensif en prenant en compte des critères cardio-vasculaires mais aussi neurologique et de qualité de vie des patients. 

Une étude présentée à l'ESC: CLARIFY. Cette étude de cohorte observationnelle a retrouvé étudié la mortalité des patients ayant eu un infarctus du myocarde selon leur pression artérielle. Les auteurs ont mis en évidence une courbe en U, montrant une augmentation de la mortalité de part et d'autre de la tension optimal que serait 130mmHg de PAS. Ainsi, la mortalité serait augmentée au delà 140mmHg et également sous 120mmHg. Ainsi, si on compare ces résultats à ceux de l'étude SPRINT, les deux études sont presque concordantes. En effet, la réduction de mortalité dans SPRINT n'est plus significative dans le sous groupe des patients avec un antécédent cardiovasculaire et la taille d'effet est moindre (OR: 0,83 vs OR: 0,71). Il faut dont un objectif tensionnel modéré chez ces patients (ce qui n'est pas toujours évident quand on doit introduire un IEC et un bêta bloquant chez un patient qui n'est pas hypertendu)


 Une nouvelle analyse de l'étude SPRINT s'est intéressé cette fois ci à la survenue de démence chez les patients avec un objectif tensionnel < 120mmHg de PAS versus <140mmHg (J'avais parlé des biais de l'étude SPRINT ici , sur ces objectifs et la façon dont la tension était prise). Bref, le critère de jugement principal était la survenue d'une démence, et les auteurs retrouvent qu'il n'y a pas moins de démence dans le groupe traitement intensif. L'histoire aurait pu s'arrêter là, sauf que les auteurs ont préféré conclure sur un critère de jugement secondaire les "troubles neuro-cognitifs légers" qui sont moins nombreux dans le groupe intensif (NNT= 270 patient par an). Pour mémoire, conclure sur un critère secondaire, c'est pas top, d'autant plus qu'il y a eu je ne sais combien d'analyses autres prévues au protocole, donc il serait bien de tenir compte de tout ça lors qu'on analyse cette base de données...
 
Un article s'est intéressé au traitement intensif de la pression artérielle chez les patients âgés hospitalisés pour cause non cardiologique dans une étude rétrospective. Les patients traités intensivement avaient une PAS a peine plus basse que ceux traités "classiquement" (138 vs 139,4mmHg). Cependant, ils avaient un sur-risque d'insuffisance rénale, d'atteinte cardiaque et de transfert en soins intensifs. Il est toujours impossible d'établir un lien de causalité dans ce type d'études, mais, a priori, cela n'incite pas à intensifier le traitement des patients hospitalisés si la TA n'est pas contrôlée pendant cette période.

Les recos ESC 2018 demande de cibler une PAS entre 130 et 140mmHg chez les plus de 80 ans. Une cohorte allemande a étudié le risque de mortalité en fonction du contrôle tensionnel chez les patients de plus de 70 ans (âge moyen 81 ans). Les auteurs retrouve une augmentation de la mortalité globale de 26% (NNH=85!) chez les patients avec une PAS < 140mmHg ET PAD < 90mmHg par rapport à ceux ayant la PAS ou la PAD au dessus de l'objectif après stratification sur l'âge et les antécédents cardiovasculaires. Dans l'analyse des sous groupes, cette différence était présente chez les plus de 80 ans (pas chez les 70-79 ans) et en prévention secondaire essentiellement. Si on détaille en classe de PAS, c'est surtout qu'il faut que la PAS soit supérieure à 130, comme ce qui est recommandé, mais il ne semble pas très prouvé de viser plutôt 140 que 150.




Le traitement de l'HTA chez le sujet de plus de 80 est peu étudié. Cette étude a surtout réanalysé les données de l'étude HYVET car c'est la seule étude contrôlée randomisée. Les auteurs disent qu'un bénéfice sur la mortalité et les évènements cardio vasculaire est présent, mais le critère principal de l'étude n'étant pas atteint (les AVC avec p= 0,06), il aurait fallu une étude dédiée portant sur la mortalité. Je crains qu'on doivent se contenter de ces résultats. D'autres avantages avaient été retrouvés sur la cognition notamment. En gros, il faut surtout adapter le traitement de façon individuelle en fonction du bénéfice attendu et des effets secondaire possibles selon chaque patient...

L'étude TRIUMPH a étudié un traitement conventionnel versus une trithérapie antihypertensive d'emblée à faible dose (telmisartan, on aurait pu trouver mieux.../amlodipine/chlorthalidone). Les auteurs montrent qu'à 6 mois, les patients sont mieux contrôles avec la trithérapie d'emblée et qu'il y a moins d'effets secondaires n'étaient pas majorés. Cependant, en seulement 6 mois, il n'est pas étonnant qu'une approche par pallier n'ai pas contrôlé la tension autant qu'une trithérapie d'emblée. D'autre part, les risques de l'HTA se développant après des années, il est peu probable qu'un contrôle obtenu à 6 mois ou à 9-12 mois soit bénéfique en terme d'évènement cardiovasculaire. Un design à 6 mois n'est pas pertinent pour évaluer des effets indésirables, dose dépendant certes, mais un traitement dans la durée pourrait faire apparaitre d'avantage d'effets indésirables, plus rares, mais lié au nombre de médicaments. Enfin, il n'est pas démontré que surtraiter les patients (parce que dans le lot des "trithérapies d'emblée", certains n'auraient probablement nécessité plus qu'une monothérapie) n'aient pas des effets indésirables évitables, ou que payer d'avantage de traitements chez "tous" les patients soit économiquement rentable par rapport au coût d'un évènement cardiovasculaire. A ce jour, je pense que cette stratégie peut être intéressante chez des patients dont on arrive à prédire une mauvaise observance ou pour des HTA sévères d'emblée, quitte à déprescrire au besoin si la tension est trop contrôlée.
 
Les recos de l'ESC prônent une pression artérielle diastolique (PAD) inférieure à 80mmHg chez tous les patients hypertendus. Cette étude transversale retrouve que l'HTA diastolique isolée n'est pas associée au développement d'une microalbuminurie, à une HVG ou à des signes d'artériopathie. C'est concordant avec ce que l'on avait déjà dit ici. Va t il falloir uniquement se concentrer sur la PAS?

Les recos américaines pour la tension définissent l'HTA diastolique par une PAD > 80mmHg (niveau de preuve = avis d'expert). D'après cet article du JAMA, traiter l'HTA diastolique à partir de cette valeur au lieu des classiques 90mmHg ne semble pas associé à un bénéfice en terme de morbi-mortalité cardiovasculaire. On reparle du "disease mongering" et du surdiagnostic ?

Un article de Circulation a étudié l’évolution de la tension artérielle des patients de plus de 80 ans en fonction de la survenue du décès. Les auteurs retrouvent une baisse de la tension artérielle au cours des 2 dernières années de vie sans qu’une intensification de traitement anti-hypertenseur ait été remarquée. Cette étude ne permet pas de dire que « moins traiter » les patients avec une amélioration des mesures tensionnelles améliore la survie, mais au moins ça pourrait diminuer le fardeau des traitements, la cible tensionnelle après 80 ans étant de 150mmHg.

Le JAMA Internal Medicine s'est intéressé au traitement anti hypertenseur chez les patients en maison de retraite. La mortalité a été étudié chez les patients de plus de  80 ans. Ceux avec une combinaison d'anti-hypertenseurs avait un risque multiplié par presque 2! Moralité: une PAS inférieure à 130mmHg avec une monothérapie, une polythérapie avec une PAS supérieure à 130mmHg passent encore, mais sinon, il faut déprescrire!



Je voudrais commencer par commenter l'étude FLAHS 2017, étude évaluant des patients hypertendus volontaires. Selon l'auteur de l'étude, il y aurait un recul désespérant car seulement 57% des patients hypertendus seraient contrôlés, que ce chiffre stagne depuis 2010, que la prescription de monothérapies augmente au dépend des bithérapies et des ARAII ("les  courriers de l'Assurance Maladie destinés aux MG n'y sont probablement pas non plus étrangers" et donc à cause des MG) mais heureusement, les diurétiques diminuent. Reprenons: le chiffre de contrôle tensionnel stagne avec une baisse des bithérapie, c'est donc que des traitements étaient inutiles, si les monothérapies suffisent à avoir le même chiffre: moins de traitement, moins d'effets indésirables. Les ARA II n'ont pas démontré de bénéfice en terme de mortalité, contrairement aux IEC. Or la "ROSP", pour le coup, encourage la prescription préférentielle d'IEC par rapport aux ARAII, c'est donc plutôt une bonne chose pour les patients et pour la santé publique. Les diurétiques diminuent, c'est dommage je dirais... un traitement peu cher avec des preuves d'efficacité importantes, notamment en première intention; en tous cas, bien plus importantes que les bêta-bloquants qui restent recommandés (en France, parce qu'outre atlantique, ils les ont retiré) . Quand on regarde les chiffres en pourcentage de patients traités: 37% ont des ARAII et 35% ont un bêta-bloquant (ouille!!!), puis viennent les classes plus efficaces: IEC à 27%, diurétiques à 23% et inhibiteurs calciques à 30%. Enfin bon, je changerai peut être mon point de vue quand Bayer me payera 11 000€ d'hospitalité! Il est peut être regrettable que l'on n'a pas d'association recherchée entre la survenue d'évènements cardiovasculaires et les traitements/le contrôle et que l'on compare entre les années. Mais sinon, je suis quand même d'accord avec lui, on peut mieux faire sur le taux de patients bien contrôlé!
 
Après une évaluation des statines en "temps pour obtenir un bénéfice", voici l'étude concernant le "temps pour obtenir" un bénéfice des traitements anti-hypertensifs. Dans cette étude, une cible tensionnelle inférieur à 140mmHg était associée à une réduction du risque relatif d'évènements cardiovasculaires de 20%. Le temps de traitement nécessaire pour éviter 1 évènement était de 34 mois (2,8 ans) pour 100 patients traités et de 9 mois pour 500 patients traités. C'est sensiblement proche de l'effet des statines.

Le BMJ a publié un article sur l'hypotension orthostatique. Bien que les définitions varient un peu, globalement elle se définit comme une baisse de 20mmHg de PAS ou de 10mmHg de PAD dans les 3 minutes après s'être levé. (On en avait parlé ici, c'est à 1 min que c'est le plus important). Une dysautonomie (absence d'augmentation de la fréquence cardiaque d'au moins 15/min au à l'orthostatisme) est évocatrice d'une cause neurologique. Il faut penser à la rechercher devant tout malaise, ou symptôme survenant aux changements de position. On peut également la rechercher chez tout patient avec maladie de Parkinson ou diabète ou hypertendu de plus de 80 ans. Le bilan initial passe par la recherche d'une cause iatrogène avant tout. Ensuite, on peut compléter le bilan par une NFS, recherche de diabète, dosage de vitamine B12, et éventuellement ECG ou ETT si on suspecte un trouble du rythme ou une cardiopathie. Le traitement repose sur les règles hygiéno-diététiques (se lever doucement, boire abondamment, utiliser un moyen de compression veineuse, faire de l'exercice physique, éviter l'alcool et les bains chauds...). Chez les patients hypertendus, c'est plus à cause du nombre de médicaments plutôt que de la cible tensionnelle en elle même. (Enfin notons qu'il existe une HTA orthostatique, majoration de 20mmHg en se levant, qui est associée à un sur-risque cardiovasculaire, mais on ne sais pas ce qu'il faut en faire)

 
Les recommandations sur l’hypotension orthostatique proposent un dépistage à 3 minutes après s’être levé pour mettre en évidence la différence « diagnostique » de 20mmHg de systolique et 10mmHg de  diastolique. Cependant, une étude du JAMA internal medicine retrouve que seule la mesure à 1 minute retrouvant l’hypotension est associé à une augmentation du risque de mortalité, de syncope, de fracture et de chutes. Mesurons donc à 1 minute et 3 minutes. Pour ceux qui ne sauraient pas (comme moi il y a quelques jours), il existe une alternative à la mesure couché/debout, qui est la mesure assis/debout pour laquelle, on considère qu’il y a une hypotension orthostatique pour une baisse de 15mmHg de systolique ou 7mmHg de diastolique.
 
On en avait déjà parlé ici, et une nouvelle revue systématique d'essais randomisés s'est intéressée au risque d'hypotension orthostatique et aux traitements de l'HTA. Les auteurs trouvent que 9% des patients avaient une hypotension orthostatique à la randomisation et 5% une hypotension (TA < 110/60). Un traitement "plus intensif" était associé à une réduction de mortalité chez l'ensemble des patients, ce qui permet de conclure que globalement, même en cas d'hypotension orthostatique, il y a un bénéfice au traitement. Cependant, lors des analyses en sous groupe, le bénéfice du traitement intensif sur la mortalité n'était présent que chez les patients sans HTO ni hypotension.
 
Une revue systématique a étudié le risque d'hypotension orthostatique en cas de traitement intensif de l'hypertension artérielle. Les auteurs retrouvent qu'un traitement intensif est associé à une réduction du risque d'hypotension orthostatique! La question est surtout de savoir s'il vaut mieux "améliorer le contrôle tensionnel" d'un patient âgé avec hypotension orthostatique ou réduire les traitements?

L'hypotension orthostatique  a été étudié pendant 15 ans en moyenne dans une étude de cohorte publiée dans PLOS Medicine. Les auteurs retrouvent une augmentation du risque de démence de l'ordre de 10-15% chez les patients présentant une hypotension orthostatique, notamment en cas de dysautonomie associée. L'hypothèse avancée est que la démence serait favorisée par les épisodes d'hypoperfusion cérébrale répétés. Il serait intéressant de voir si la stimulation cognitive chez les patients avec une hypotension orthostatique permet de réduire le risque de démence! 

3/ Comparaison de traitements

On a parlé de nombreuses fois du "meilleur anti-HTA". Ce nouvel article du JAMA Open est parti de l'étude randomisée ALLHAT publiée en 2002 qui a inclus des patients entre 1994 et 1998 et conclue à la supériorité des thiazidiques par rapport aux calciques et IEC. Les auteurs ont donc fait un suivi de 23 ans maintenant et publié cette étude comparant les différentes classes. Ainsi, il n'y avait pas de différence de mortalité entre les groupes, mais il semble qu'il y ai une  moindre risque de mortalité liée aux AVC et d'AVC avec les thiazidiques par rapport aux IEC et de mortalité par AVC avec les calciques par rapport aux IEC encore (ordre de grandeur: NNT= 84 sur 23 ans, soit 2000 par an en extrapolant si on veut comparer aux autres études vu la linéarité des courbes). Premièrement, on peut voir que les écarts sont très faibles et que la mortalité globale reste similaire, ce qui n'incitera pas forcément à privilégier absolument les autres classes. Deuxièmement, cette étude ne comparait pas "les IEC", "les thiazidiques" et les "calciques". Elle comparait l'amlodipine, calcique de référence, la chlorthalindione, thiazidique de référence équivalent à l'hydrochlorothiazide (cf ici) et le lisinopril, IEC de moins en moins utilisé, le ramipril semblant plus efficace que les autres (cf ici, concernant la mortalité globale, dommage qu'on n'ait pas de données sur les AVC et mortalité par AVC!). Bref, les thiazidiques semblent rester une fois encore les traitements à privilégier, suivi des calciques dans cette étude. A noter qu'il n'y a pas d'analyses en sous groupe concernant les patients diabétiques qui dans d'autres études tirent plus de bénéfice des IEC que des autres classes.
 
 Il y a des discordances de traitement de 1ère intention dans l'HTA entre le NICE (inhibiteurs calciques), la Cochrane (diurétique) et l'ESC (plutôt IEC). Le Lancet va peut être nous aider dans cette revue systématique. En gros toutes les classes sont comparées entre elles (certes on pourrait toujours remettre en cause le fait de travailler avec des classes et non avec des molécules, mais c'est déjà un beau travail qu'ils ont fait), et les auteurs retrouvent :

  • que les thiazidiques réduisent davantage les évènements cardiovasculaires et la mortalité que les IEC, ce qui tranche un peu avec la Cochrane qui disaient que c'étaient les 2 classes les plus efficaces de façon similaire (mais pas de différence entre thiazidiques et les sartans, étrange)
  • les thiazidiques réduisent davantage la mortalité globale que les inhibiteurs calciques (qu'à donc fait le NICE, eux qui recommandaient bien les thiazidiques en 1ère intention auparavant!)
  • que les inhibiteurs calciques bradycardisant sont moins efficaces que toutes les autres classes
  • qu'il n'y a pas de différence significative pour les autres comparaisons de molécules.

L'article qui m'a le plus intéressé cette semaine concerne les IEC dans l'hypertension. Ceux qui me semblaient avoir le plus haut niveau de preuve me semblaient être l'enalapril et le ramipril, sans que je sache lequel préférer. Quand cette étude comparant la mortalité sous les différents IEC est intervenue! Le ramipril étant la référence, soit les IEC augmentent la mortalité (captopril, enalapril, fosinopril) , soit il n'y a pas de différence avec le ramipril (les autres). Mon choix est donc fait, mais j'y reviendrais certainement dans un billet futur.
 
Nous avons souvent parlé des discordances de bithérapies antihypertensives de 1ère intention. D'après cet article s'appuyant sur l'étude ACCOMPLISH, les auteurs sont pronent, comme dans les recommandations de 2020, une bithérapie inhibiteur calcique + IEC plutot que IEC+ thiazidique. L'étude ACCOMPLISH retrouvait une mortalité cardiovasculaire plus faible avec benazepril+amlodipine que benazepril+HCTZ indépendamment de la valeur du chiffre tensionnel. D'autre part, il y a moins effets secondaires et une meilleure observance vis à vis des calciques.

La Cochrane a comparé les antihypertenseurs en prenant en référence les inhibiteurs calciques: les thiazidiques réduisent davantage les évènements cardiovasculaires et l'insuffisance cardiaque que les inhibiteurs calciques; les inhibiteurs calciques réduisent plus les évènements cardiovasculaires que les bêta-bloquants, plus les AVC que les IEC et plus les infarctus que les ARA2 mais augmentent le risque d'insuffisance cardiaque par rapport aux IEC et aux ARA2.

Le BMJ a publié une étude à propos des risque liés aux bloqueurs du système rénine angiotensine (IEC/ARAII) chez des patients suivis pendant plus de 10 ans. Les auteurs retrouvent en effet que chez les patients ayant eu une initiation de un traitement, une augmentation de plus de 30% de la créatininémie 2 mois après instauration est associée à un sur-risque d'insuffisance rénale terminale, d'infarctus, d'insuffisance cardiaque et de mortalité globale. Cependant, l'étude retrouve que les augmentation de plus de 10% étaient également associées à une augmentation de mortalité de 15% (RR). Or plus de 15% des patients avaient une augmentation de plus de 10% de la créatininémie, d'où  l'importance du contrôle de fonction rénale après mise sous bloqueur du SRA. Bien qu'il faille fortement revoir le bénéfice de ces traitements quand une augmentation est supérieure à 30% (comme le disent les recommandations), il faut certainement surveiller particulièrement les augmentations plus modérées.



Le JAMA publie une comparaison des traitements dans une méta-analyse en réseau. Dans cet article, toutes les classes diminuent la mortalité cardiovasculaire sauf les bêta bloquants, les IEC diminuaient le plus les infarctus du myocarde contrairement aux ARA II qui ne montraient pas de bénéfice. Bref, une étude de plus montrant un bénéfice des IEC par rapport aux ARA II. Cependant, le choix entre IEC, thiazidique et inhibiteurs calciques en 1ère ligne reste confus étant donné qu'il n'y a pas de comparaison entre molécules dans cet article, que certaines analyses montrent que les diurétiques sont plus efficaces sur la mortalité globale (non étudiée ici), que les inhibiteurs calciques sont efficaces partout sans être "la meilleure" et que les IEC sont les plus efficaces sur les infarctus mais pas sur la mortalité cardiovasculaire. Bref, je pense que les thiazidiques restent la classe la plus cout-efficace, et que les IEC sont à privilégier quand les thiazidiques sont le moins approprié (diabète, insuffisance rénale, sujet âgé...)

Une méta-analyse  l'HTA et les évènements cardiovasculaires a été publiée dans le Lancet. On y retrouve, les diminutions significatives des AVC, infarctus, insuffisances cardiaques ainsi qu'une diminution de la mortalité de 13% pour chaque baisse de 10mmHg. Au niveau des traitements, les bêta-bloquants sont moins efficaces que les autres sur le risque d'AVC, d'infarctus et d'insuffisance rénale. Les diurétiques  étaient supérieur sur l'insuffisance cardiaque et les inhibiteurs calciques inférieurs. La principale limite de cette méta-analyse réside dans l'hétérogénéité des populations qui était entre 30 et 40%.

IEC ou ARAII? Les recommandations sont claires dans la prévention secondaire cardiovasculaire, les IEC sont à privilégier parce qu'ils sont moins cher, et l'ARAII a son utilité en cas de toux due aux IEC. Dans l'HTA essentielle, les recos disent IEC ou ARAII sans en privilégier. Cependant, on voit  (moi en tous cas...) encore souvent prescrits des ARAII en première intention. Mais le coût n'est pas la seule raison: contrairement aux IEC, les ARAII ne diminuent pas la mortalité cardiovasculaire ou globale, que ce soit chez des patients hypertendus, des patients à haut risque cardiovasculaire ou des patients diabétiques d'après un article de Circulation. Ceci est totalement cohérent avec un article de 2013 qui retrouvait la même chose. Mais visiblement le lobby des ARA II leur permet de tenir le coup malgré toutes ces preuves d'inefficacité.


Le journal du Collège américain de cardiologie revient sur le débat « IEC ou ARA II ».  Les auteurs (aux conflits d’intérêt long comme les bras) font une comparaison direct des 2 classes sur des critères de jugements cardiovasculaire et retrouvent qu’il n’y a pas de différence. Cependant, il y a plus  d’arrêt pour mauvaise tolérance sous IEC. La comparaison sur la baisse de la pression artérielle ne montre pas de différence.  Les auteurs finissent par conclure qu’il n’y a donc pas d’argument pour privilégier les IEC sur les ARAII. J’ai pourtant envie de dire que si. D’une part : le coût, un peu plus élevé avec un ARAII. Ensuite, on remarquera qu’il ne s’agit pas d’une revue systématique de littérature, on ne sait pas comment ont été sélectionnées les études, et on note qu’il n’y a pas de comparaison sur la mortalité globale, c’est étrange ! Quand on regarde un ancien Dragi Webdo les comparant, on voit que les ARAII n’arrivent pas à diminuer la mortalité globale versus placebo, au contraire des IEC. Bref, les ARAII sont bien des traitements de 2ème intention en cas d’intolérance aux IEC.


Un essai contrôlé randomisé publié dans le Jama Internal Medicine a étudié l'association enalapril 20mg + acide folique 0,8mg versus enalapril 20mg en prévention de l'insuffisance rénale chez des patients de 45 à 75 ans hypertendus en prévention cardiovasculaire primaire. Les auteurs retrouvent une réduction significative du déclin de la fonction rénale dans le groupe "acide folique" à 4 ans, notamment chez les patients ayant une maladie rénale chronique préexistante ou un DFG initial estimé inférieur à 60ml/min. L'étude princeps avait montré une diminution des AVC également avec l'ajout d'acide folique! Et vous allez me dire: pourquoi ne mettons pas de l'acide folique à tous ces patients étant donné qu'ils avaient des folates à 7 (Norme: 5-15)? Parce qu'heureusement, entre les lignes de l'étude princeps, on retrouve le dosage de la mutation génétique MTHFR C677T qui est impliqué dans le métabolisme de l'acide folique et présente à l'état homozygote chez 25% de la population chinoise contre 10% à peine en France: ce qui peut expliquer les résultats de l'étude. Moralité: même les belles études publiées dans les grandes revues et qui ont l'air applicables ne le sont pas forcément.
 
La Cochrane a mis à jour (2023) sa revue systématique concernant les traitements de 1ère ligne dans l'HTA. Elle confirme cette fois ci le bénéfice des diurétiques en 1ère intention, devant les IEC (et les calciques et BB-) avec une probable réduction de morbidité notamment moins d’évènements cardiovasculaires (moins d'avc par rapport aux IEC et moins d'insuffisances cardiaque par rapport aux calciques) et moins d'effets indésirables. Il n'y a cependant pas de différence sur la mortalité.

Une mise à jour de la revue Cochrane plaide, à nouveau, en faveur des thiazidique en raison d'une efficacité importante sur des critères de morbi-mortalité dès les faibles doses et d'un faible coût de ces molécules. Les IEC et inhibiteurs calciques semblent aussi efficaces mais avec un niveau de preuve moindre.

Au niveau des antihypertenseurs, une étude a étudié le risque de fracture de hanche sous différents traitements dans une étude de cohorte. Les diurtétiques thiazidique, hypocalciuriant et hypercalcémiant, sont associés à un risque de fracture diminué d'environ 20% par rapport à l'ensemble des autres traitements (amlodipine et lisinopril), notamment lors de la comparaison thiazidique vs lisinopril (ce n'est pas significative pour thiazidique vs amlodipine). Est ce que cela va changer beaucoup de chose à la pratique? Je ne sais pas encore... 

Quel thiazidique choisir dans ce cas? Cette étude du JAMA internal medicine comparait la chlorthalidone (molécule la plus étudiée) à l'hydrochrorothiazide (molécule la plus utilisée en France). Les auteurs ne retrouvent pas de différence d'efficacité sur la mortalité ou les évènements cardiovasculaires. Cependant, l'hydrochlorothiazide présentait beaucoup moins de risque de réactions allergiques, d'hyponatrémie, d'hypokaliémie, d'hyperkaliémie et d'insuffisance rénale.

Le diurétique thiazidique de référence est la chlorthalidone, mais elle peu disponible et peu utilisée dans la majeure partie des pays. C'est donc souvent de l'hydrochlorthiazide que les patients reçoivent. Cette étude randomisée a comparé l'efficacité de ces 2 molécules (HCTZ 25-50mg et CTLD 12.5-25mg). Après environ 2 ans et demi de suivi, les auteurs ne mettent pas en évidence de différence de contrôle tensionnel, ni de survenue d'évènements cardiovasculaires. Seules les hypokaliémies étaient plus fréquentes dans le groupe CTLD. Dans le sous groupe avec coronaropathie, la CTLD était plus efficace que l'HCTZ sur le contrôle tensionnel,  à confirmer au cours d'une étude dédiée. 


Les diurétiques thiazidiques sont les traitements de première intention dans l'HTA. Cependant, faut il préférer un thiazidique-like (type indapamide) ou l'hydrochlorothiazide. Une méta analyse (plus de  480 000 patients) publiée dans Hypertension retrouve une diminution significative des évènements cardio-vaculaires de 12% sous thiazidique-like et des insuffisance cardiaques de 21% par rapport aux thiazidiques et ce, sans augmentation significative des effets indésirables. J'avais en tête qu'il y avait plus d'hypokaliémies sous thiazidique-like, mais s'ils sont plus efficaces sans plus d'effets secondaires...

La principale étude a mon sens concerne la spironolactone dans l'HTA qui controlerait 60% des HTA résistantes. L'auteur conclu qu'il ne faudrait donc considérer les patients comme "résistants" qu'après l'échec de la spironolactone. Cependant, cela ne devrait pas dispenser du bilan d'HTA secondaire devant une HTA résistant a une trithérapie avec un diurétique thiazidique. Le protocole déterminait que les patients sous trithérapie reçoivent 25mg de spironolactone, abaissé a 12.5mg en cas de réponse ou augmenté à 50mg en cas d'échec. La tolérance était plutôt bonne, mais la Kaliémie est tout de même a surveiller ( ici.) 

L'efficacité des IEC pour réduire la mortalité et le déclin rénal est bien connu. Mais cette étude s'est intéressée au bénéfice de la poursuite des IEC en cas d'insuffisance rénale sévère (DFG estimé < 30mL/min). Les auteurs retrouvent une moindre mortalité à 5 ans chez les patients pour qui l'IEC a été poursuivi (NNT= 18!) notamment lié à une réduction des évènements cardiovasculaires et sans majoration de la progression vers l'insuffisance rénale terminale. Donc poursuivre les IEC semble être une bonne idée (en surveillant le potassium bien évidemment).

Un cardiologue, un généraliste et un endocrinologue ont publié une revue narrative sur les traitements de l'HTA dans le JAMA. Certaines interventions permettent une possible réduction des chiffres de PAS:

  • Perte de 5 kg de poids  (5mmHg) 
  • Réduction de 1g/j des apports en sel (3 mmHg)
  • Augmentation des apports en potassium
  • Régime méditerranéen (7mmHg)
  • Activité physique (5mmHg)
  • Arrêt de la consommation de 2 unités d'alcool par jour (5 mmHg)
Les auteurs placent une cible tensionnelle inférieure à 130mmHg de PAS chez les patients de moins de 65 ans, diabétiques ou insuffisant rénaux. Les thiazidiques, inhibiteurs calciques, IEC et ARAII sont des traitements de 1ère intention de l'HTA sans qu'une classe ne soit particulièrement privilégiée. Cependant, en cas d'HTA résistante, ils proposent de switcher l'hydrochlorothiazide (courte durée d'action) pour un thiazidique-like (indapamide) qui a une durée d'action plus longue, avant d'ajouter un 4ème traitement : la spironolactone ou l'éplérénone.
 
J'étais passé à coté cet été, mais une étude s'est intéressée au traitement anti-hypertenseur chez les sujets noirs. Cet essai contrôlé randomisé retrouve un meilleur pouvoir anti-hypertenseur d'un traitement par amlodipine+hydrochlorothiazide ou amlodipine+perindopril par rapport à un traitement par hyrochlorothiazide+perindopril (bien que ce dernier soit moins pourvoyeur d'effets indésirables). Compte tenu du risque d'angio-oedeme augmenté avec les IEC chez ces patients, il semble donc préférable de commencer par amlodipine+HCTZ si une bithérapie est souhaitée (en l'absence de diabète ou de néphropathie)

Un article de revue revient sur la prise en charge de l'HTA chez les patients ayant une BPCO. Les diurétiques thiazidiques, IEC et ARAII sont ceux recommandés en 1ère intention, avec une préférence pour les bloqueurs du système rénine-angiotensine en cas de risque d'hypokaliémie (favorisée par les B2mimétiques inhalés), et notamment pour les IEC qui baissent la mortalité chez les patients hospitalisés pour exacerbation de BPCO. Les inhibiteurs calciques n'ont pas d'effet particulier chez les patients BPCO. Les bêta-bloquants ne sont pas recommandés pour l'HTA non compliquée, mais leur balance bénéfice/risque est favorable en cas de coronaropathie à condition d'utiliser une molécule cardiosélective.
 
Cette étude du JAMA Open a comparé les antihypertenseurs stimulant les récepteurs de l'angiotensine (thiazidiques, inhibiteurs calciques dihydropyridine et ARAII) avec ceux l'inhibant (bêta-bloquants, inhibiteurs calciques bradycardisants et IEC). L'étude est une réanalyse de SPRINT et s'intéresse au risque de troubles mnésiques. Les auteurs retrouvent que les patients avec uniquement antihypertenseurs stimulant réduisaient le risque de démence de 24% (NNT=71 à 5 ans). Cependant, plus de 50% des patients avaient des traitements mixtes, et il n'y avait pas d'analyse molécule par molécule (car même s'il y a un mécanisme commun, mettre dans le même sac les IEC avec les BB- et les calciques bradycardisants ce n'est pas très logique compte tenu de la différence de niveau de preuve). 

On a déjà vu plusieurs fois que les thiazidiques étaient les traitements de 1ère intention les plus éprouvés, suivi de près par les IEC, et que les recos sont en faveur des calciques pour des raisons de tolérance. Cette étude du JAMA parle de l'hétérogénéité de la réponse aux anti-HTA en randomisant en cross-over des patients avec du lisinopril, du candesartan, de l'hydrochlorothiazide et de l'amlodipine. En trouvant "le" traitement le plus efficace pour chaque patient, les auteurs montrent qu'on peut obtenir une  baisse supplémentaire de 4,4mmHg de PAS. Ce qui soulève quand même un point sur les cibles tensionnelles: faut il mieux baisser un peu plus la PAS ou utiliser une classe qui a montré un bénéfice supérieur en termes de réduction d'évènements cardiovasculaires en comparaison directes ? (ça fait penser aux débats sur les cibles de LDL et les statines...)
 
 
Les ARN interférents vont peut-être devenir des traitements incontournables. Le Zilbesiran est un de ces traitements anti-hypertenseur qui agissent en amont du système rénine angiotensine. Dans cette étude de phase 2, 400 patients avec des MAPA à 140-142/81-82 et ayant à 75% au moins 1 traitement antihypertenseur ont reçu une injection trimestrielle du traitement ou de placebo (randomisation 4:1) pendant 6 mois. Dans le groupe traitement, la PAS a été réduite de 8mmHg environ par rapport au début d'étude et de 15mmHg par rapport au placebo. Bien qu'il y ait eu 7% d'effets indésirables sévères sous placebo et 4% sous traitement, il y a eu 1 décès par arrêt cardiaque dans le groupe traitement. Aucun des effets indésirables grave n'a été considéré comme lié au traitement, mouais.... Affaire à suivre.

 

 

4/ HTA secondaire ou sévère

Tant qu'on est dans l'HTA, le NEJM propose un algorithme de gestion des hypertensions aigües sévères (TA> 180/120). Je vous le mets en dessous. Concernant les traitements à donner lors de ces crises, si une hospitalisation est nécessaire, le labetalol et la nicardipine IV sont à privilégier. En cas de crise hypertensive sans symptômes (qui peuvent être des céphalées, douleurs thoraciques atypiques, dyspnée, étourdissement, vertiges et épistaxis) , les traitements à privilégier sont la clonidine (0.1 à 0.3 mg), le labetalol (200 à 400 mg), le captopril (25 à 50 mg), et la prazosine (5 à 10 mg). Notons que la nicardipine est peu étudiée per os, et que la nifédipine ne doit pas être utilisée car d'efficacité trop variable pouvant entrainer un sur-risque cardiovasculaire.



Le JAMA internal medicine aborde l'HTA résistante, définie par une TA > 140/90 malgré IEC/ARAII + calcique + thiazidique à la dose maximale tolérée ou patient sous quadrithérapie quelle que soit la TA. Les auteurs proposent d'abord de mettre le diurétique à la dose maximale si ce n'était pas déjà le cas puis de contrôler la tension sur une MAPA. En l'absence de contrôle tensionnel, les auteurs recommandent de vérifier l'observance, de renforcer les RHD (activité physique 45min x 3/semaine, apport sodés < 1.5g/j et éviction des néphrotoxiques tels que les AINS). Ils proposent un calcul du rapport aldostérone/rénine pour toute HTA secondaire (alors que l'ESH dit "seulement avant 65 ans"). Le traitement de 4ème ligne à introduire est la spironolactone (ou éplérénone ou amiloride) et celui de 5ème ligne dépend de la fréquence cardiaque : alphabloquant (doxasozine notamment) si FC < 60/min, ce qu'on veut si FC entre 60 et 80/min, et bêta bloquant ou calcique bradycardisant ou central si FC > 80/min.
 
Nous avions abordé en 2016 et 2021 l'hyperaldostéronisme primaire. Le BMJ fait une nouvelle synthèse sur ce sujet. 

  • La prévalence est estimée entre 2% et 13% des patients hypertendus dans les études réalisées en soins de premiers recours. Il y aurait néanmoins un sous diagnostic important puisque la prévalence observée en milieu réel est inférieure à 0,5% des patients hypertendus. 
  • Les patients avec hyperaldo ont un sur-risque cardiovasculaire par rapport aux patients hypertendus sans hyperaldo. Il s'agit souvent de causes curables, et des études ont retrouvé que le risque d'évènements cardiovasculaires est plus faible chez les patients avec hyperaldo avec traitement chirurgical que chez les patients avec HTA essentielle. 
  • Il faut donc dépister les patients avec HTA (PAS>140 mmHg), HTA résistante (non contrôlée malgré 3 antiHTA dont un diurétique), incidentalome surrénalien,  et HTA avec hypokaliémie (spontanée ou sous traitement). 
  • Les auteurs recommandent d'effectuer un calcul du rapport aldostérone/rénine. 
    • Là on ne va pas être d'accord: on ne peut doser le rapport aldostérone/rénine à tous les patients hypertendus dans la vraie vie. On mesure la kaliémie dans tous les bilans d'HTA, cependant il semblerait que peu de patients avec hyperaldo aient une hypokaliémie au final).
    • Pour le test: Les diurétiques sont à arrêter pour 4 semaines (y compris les anti-aldostérone, apparemment ce n'est pas utile de faire un arrêt de 6 semaines s'il y en avait), et les ARAII, IEC, BB- ET inhibiteurs calciques dihydropyridine (non bradycardisants) sont à arrêter 2 semaines. Il reste donc des inhibiteurs calciques bradycardisants, les centraux (moxonidine, rilmenidine, methyldopa) et les alphabloquants (prazosine, doxasozine). 
    • Si le rapport est élevé, il est alors nécessaire d'adresser en centre spécialisé (avec un TDM surrénalien) pour discuter d'une prise en charge, généralement chirurgicale, mais fois par diurétique épargneur de potassium si adénome bilatéral, risque chirurgical important ou préférence d'un traitement médical.


Concernant l'hypertension artérielle, d'après une autre présentation des #JESFC2019, il semblerai également que l'on doive suspecter une HTA secondaire devant des kaliémies supérieures à l'habituelle norme de 3,5mmol/L. En effet, il faudrait considérer comme seuil une kaliémie < 3,9mmol/L ou < 3,6mmol/L sous diurétiques.

Une étude s'est intéressée aux dyskaliémie chez les patients sous antihypertenseurs notamment avec des calciques, des ARAII et de l'hydrochlorothiazide. Ils retrouvent que le losartan est plus hyperkaliémiant que le valsartan, et que le risque d'hyperkaliémie des ARAII peut être compensé par l'HCTZ 12.5mg. Cependant, associer un ARAII avec 25mg d'HCTZ, est à risque d'hypokaliémie. 


Ainsi, une étude du BMJ a mis en évidence à partir de SPRINT l'effet de l'ajout d'une nouvelle molécule à un traitement anti-hypertenseur améliorerait le bénéfice cardiovasculaire, avec une amélioration de 0,6% du risque absolue par classe d'antihypertenseur introduite, et ce sans augmentation significative des effets indésirables (même lors des quadrithérapies!) Le modèle utilisé est complexe, et prend en compte les particularités des patients. Ainsi un patient sous bithérapie avec une tension à 120mmHg n'a pas le même poids que celui sous pentathérapie à 135mmHg. Donc je pense que l'idée, n'est pas forcément de mettre une quadrithérapie à tout le monde, mais plutôt de ne pas rechigner de trop à aller vers la quadrithérapie si la tension n'est pas contrôlée.
 
On avait déjà parlé du régime peu salé dans l'insuffisance cardiaque ici. Voici maintenant un article du BMJ sur la baisse de consommation du sel et la pression artérielle. Entre les groupes contrôle et consomation réduite, il y avait une différence de consommation de 7,5g/L de sel (130mmol) qui a conduit à une réduction de pression artérielle moyenne de 4mmHg/2mmHg. Chaque baisse de 3g/j de sel (50mmol) était associée à une baisse de 1,1mmHg/0,3mmHg. Notons que l'effet n'était vraiment obtenu que dans les études durant plus de 14 jours.
 

5/ Autres articles

D'après cet article du BJGP, les automesures (AMT) sont une bonne alternative à la MAPA en médecine générale. Ses principaux inconvénients sont le coût personnel de l'appareil, les mesures qui doivent correctement être rapportées par le patient, l'adhésion du patient, une précision un peu moindre que la MAPA, na nécessité de  recalibrer l'appareil (notamment tous les 5 ans). L'objectif est de 135/85mmHg (145/85 est acceptable chez les plus de 80 ans). Au-delà de 170/115mmHg,  un contact médical rapide est souhaitable. Enfin, si le médecin ne peut demander de les avoir qu'une fois par an, il est conseillé au patient de les réaliser un peu plus fréquemment (à adapter au patient.)

 Cet article du BJGP refait le point sur les mesures de pression artérielle en médecine générale. Pas de grandes nouveautés, mais quelques points intéressants. Le fait de prendre la PAS à un seul bras et non aux deux en choisissant la mesure la plus élevée peut conduire à un sous diagnostic de 12% des patients hypertendus.  En cas d'obésité utiliser un brassard trop petit pour le bras du patient surestime la pression artérielle. Si besoin d'un brassard extra-large (bras >45cm), le large (bras 35-44cm) augmente la PAS de 10 mmHg et le standard (27-34cm) de  20mmHg environ) et un brassard trop grand la sous estime. En cas de FA, il est recommandé de préférer une mesure manuelle qu'électronique.

Le BMJ revient sur l'HTA juvénile, définie comme une HTA découverte avant 40 ans. Les recommandations sont notamment de dépister une HTA secondaire. Les auteurs de cet article recommandent le bilan classique de découverte d'HTA ainsi qu'une TSH et une recherche des pouls radiaux et fémoraux pour vérifier l'absence de coarctation de l'aorte. Une échographie rénale et un doppler des artères rénales sont indiqués car les anomalies du parenchyme rénal et les dysplasies fibromusculaires font partie des principales causes d'HTA à cet âge. Parmi les autres examens complémentaires requis dans la recherche d'HTA secondaires, il semblerait que la mesure des catécholamines urinaires sur 24h ne soit pas pertinente en l'absence de symptômes évocateurs de phéochromocytome ou antécédents familiaux. De même, une mesure isolée du cortisol n'est pas informative, une mesure salivaire à minuit ou un freinage minute est à préférer.
 
J'en avais déjà un peu parlé ici, mais il existe une discordance entre les mesures de tension dans les études  et les mesures réalisées en situation réelle. Les auteurs ont repris les données de SPRINT (essai randomisé évaluant une cible tensionnelle systolique à 120 versus 140, avec des mesures effectuées de façon automatisée, 3 fois, en l'absence de professionnel de santé). Les patients du traitement intensif avaient 7mmHg de moins lors des prises protocolisées qu'en pratique réelle, et ceux du groupe contrôle 4mmHg de moins, avec une concordance faible entre les 2 types de mesures. Cela confirme la difficulté d'extrapoler les objectifs tensionnels bas issus de SPRINT et qui se retrouvent parfois dans certaines recos, et aussi qu'il faut s'intéresser à des critères utilisés en pratique clinique dans les études plutôt qu'à des protocoles qui ne sont plus appliqués ensuite.
 
Un article parle des conditions de mesures tensionnelles au cabinet. Ainsi, laisser le patient se reposer 5 minutes en l'absence du praticien abaisserai en moyenne sa tension de 10/7 mmHg. Les résultats obtenus dans l'étude SPRINT ont été obtenus dans ces conditions et visait une tension systolique inférieure à 120mmHg, ce qui correspondrait à un objectif de 130mmHg pour des mesures "classiques en cabinet". Or le groupe traitement intensif dans Sprint avait 121mmHg de PAS (->131mmHg) et le groupe non intensif 136mmHg (-> 146mmHg en conditions classiques). L'étude Sprint aurait dont mis en évidence qu'il fallait cibler une tension inférieure à 140mmHg mesurée de façon classique pour diminuer le risque cardiovasculaire. Pour revenir sur les mesures tensionnelles, il faut adapter les cibles au mode de mesure: les seuils ont déjà été abaissé à 135/85 pour des automesures, peut être faut il considérer 130/80 si la mesure est faite après 5 minutes de repos.
 
Une étude d'Annals of internal medicine a retrouvé que l'utilisation d'appareils de surveillance à distance des patients, notamment dans l'HTA, était associé à une délivrance des traitements plus régulière, moins de consultations non programmées pour HTA, mais il y avait d'avantage de consultations chez le généraliste et une augmentation des coûts de prise en charge de 230$ (ce qui peut s'expliquer par le prix du matériel et le fait que les gens achètent plus régulièrement leur traitement, et qu'ils voient plus leur MG en suivi ce qui évite les consultations urgentes ou aux urgences).

Il y a cette étude dont parle le JAMA qui retrouve que les étudiants en médecins ne savent pas bien prendre la tension artérielle. Dans cette étude, seule 1 étudiant sur 159 a effectué correctement les 11 items recherché. La moitié des étudiants savaient néanmoins, bien: prendre un brassard adapté, le placer correctement, soutenir le bras, demander de ne pas parler, et décroiser les jambes du patient. Les autres critères, pour info: faire patiente au repos le patient pendant 5 minutes, vérifier que les pieds du patients soient à plat au sol, demander au patient de ne pas utiliser son téléphone portable ou de ne pas lire, vérifier au 2 bras, noter le bras avec la tension la plus élever et expliquer à quel bras la tension devrait être mesurée ultérieurement. C'est intéressant, mais considérant l'intérêt des mesures en cabinet, il faudrait mieux voir si les étudiants savent expliquer les automesures. Mais d'une part, cela prend du temps de consultation d'expliquer les 11 points au patient; et d'autre part (et surtout), un patient retenant moins de 50% des informations données en consultation (ou quelque chose comme ça), ne faudrait-il pas se concentrer sur 3-4 consignes importantes plutôt qu'une liste aussi longue...
Les auto-mesures tensionnelles (AMT) seraient un traitement à part entière de l'HTA. Un essai contrôle randomisé a retrouvé que les tensions au cabinet, à 12 mois de la randomisation, d'un groupe de patient avec des AMT était plus faible que celles du groupe qui n'avait pas eu les AMT. Certes, la différence est de moins de 5mmHg au final, mais quand même!

Une étude intéressante est proposée par Plos medicine. C'est une méta-analyse sur données individuelles évaluant les automesures tensionnelles (versus pas d'automesures), retrouvant (assez logiquement) que faire des automesures ne suffit pas a avoir une meilleure pression artérielle au cabinet. Cependant, lorsque les automesures étaient associées à un support médical, des conseils, un accompagnement à la mise en place de règles hygiéno-diététiques la tension était améliorée dans le groupe effectuant des automesures. Les automesures semblent être un plus dans la prise en charge mais doivent être utilisées comme un outil d'éducation thérapeutique du patient parmi l'ensemble des choses nécessaires pour se révéler efficaces.

J'avais déjà parlé des conditions de mesures de tension artérielle. Une nouvelle étude a comparé MAPA (hoter tensionnel sur 24 h) et mesures de tension au cabinet. En prenant comme référence des MAPA avec une valeur seuil de 130/80 sur 24h ( par ailleurs, on considère comme TA limite: 135/85 sur la période diurne et 120/70 sur la période nocturne ) et 140/90 en mesure au cabinet, les auteurs retrouvent que les mesure au cabinet ont une sensibilité de 82% et une spécificité de 41%. Cela signifie que 80% des patients hypertendus auront une TA élevé au cabinet, mais aussi que près de 60% des patients non hypertendus auront une tension élevée au cabinet!

Le BJGP revient sur la question des auto-mesures tensionnelles par MAPA qui seraient plus pertinentes que les AMT. Dans cette étude de cohorte ambulatoire, 10% des patients étaient "reverse deeper", c'est à dire avec une PA nocturne supérieure à la PA diurne. Les auteurs déclarent donc qu'il y a un risque d'HTA masquée qui ne serait pas diagnostiquée en l'absence de MAPA. Mais si on regarde les graphiques moyens, même chez les non-deeper et reverse deeper, les moyennes sur 24h étaient normales. Il est probablement judicieux de ne chercher les HTA masquées que lorsqu'on les suspecte, comme le recommande la SF de cardio (AMT et si suspicion MAPA, alors que l'ESC dit MAPA ou à défaut AMT)

L'hypothèse la plus répandue est que les tensions systoliques en cabinet sont plus élevées qu'en ambulatoire. Une étude de Circulation a retrouvé le contraire! En effet, chez des patients non hypertendus et sans pathologie cardiovasculaire, les auteurs ont retrouvé des moyennes tensionnels en cabinet de 116/75 contre 123/77 en ambulatoire. Cependant, chez les plus de 65 ans ou en cas d'IMC >32,5, les tensions au cabinet étaient supérieures aux tensions ambulatoires. Les auteurs ont donc retrouvé 15% d'HTA masquée. Le gros, très gros biais de cette étude, c'est que les tensions au cabinet étaient mesurée de façon manuelle, alors que les mesures ambulatoires étaient faites de façon automatisées. Or, le technicien a tendance à sous évaluer la tension artérielle (ou comment une fois de plus faire dire tout et n'importe quoi à une étude). Conclusion de toutes façons (et ce n'est pas neuf), pour ne pas sous estimer l'HTA masquée ni l'HTA blouse blanche: faire des mesures ambulatoires!

Un article du JAMA Cardiology évalue la prévalence de l'HTA masquée nocturne dans une étude de cohorte de patients âgés d'environ 50 ans. Ainsi, cette étude retrouve qu'il y aurait environ 20% des patients atteints d'après les résultats de MAPA mais seulement environ 12% auraient une HTA masquée nocturne isolée (sans HTA diurne associée). Pour mémoire, l'HTA nocturne peut se manifester par céphalées, asthénie, nycturie... ou atteinte d'organe (protéinurie, hypertrophie cardiaque....) sans cause retrouvé (cf ici).

Le BJGP a publié un article sur la différence de pression artérielle entre les deux bras (inter-arm difference, ou IAD). Les patients d'une étude de cohorte avec une IAD systolique de plus de 5mmHg avaient un risque de mortalité cardiovasculaire augmenté de 91% et de mortalité globale augmenté de 44% après 8 ans de suivi en moyenne. De plus, ce risque était presque doublé si les patients étaient en plus hypertendus. Étrangement, une IAD de plus de 15mmHg n'était associée à rien, probablement par manque de puissance. Avant de se lancer dans une mesure massive de la pression artérielle aux deux bras des patients, il faut quand même noter que 60% des patients de l'étude avaient une IAD de plus de 5mmHg.

A l'heure du 2.0, toutes les nouveautés ne sont pas bonnes à prendre. Une étude du JAMA Internal Medicine retrouve que la tension artérielle mesurée par un' application sur smartphone était imprécise et pouvait conduire à une sous-estimation des valeurs réelles, avec des écarts supérieurs à 10mmHg en moyenne pour la PAS et la PAD. Donc, à ce jour, pour mesurer la tension, les tensiomètres automatiques classiques restent les plus fiables pour les patients.

Que se passe-t-il quand un traitement anti-hypertenseur est intensifié au cours d'une hospitalisation pour motif non cardiologique ? D'après les 4000 patients de plus de 65 ans de cette étude rétrospective, ceux ayant eu une intensification n'avait pas moins d'évènements cardiovasculaires à 1 an, par contre ils avaient plus fréquemment des effets secondaires graves (NNH= 63) et étaient plus fréquemment ré-hospitalisés dans les 30 jours (NNH=27). La réévaluation rapide au retour d'hospitalisation semble indispensable (on en avait parlé ici).

Une méta-analyse concernant les prises de tension au cabinet a recherché le meilleur moyen de prendre la tension artérielle. Les auteurs ont comparé les mesures automatisées ( c'est à dire sans intervention du patient, l'appareil prend plusieurs mesures de suite alors qu'il est seul sans la pièce pour réduire l'effet blouse blanche), par rapport aux mesures classiques (mesures manuelles ou électroniques qui ne correspondent pas aux mesures automatisées). Il y avait une surestimation des valeurs lors de mesures classiques par rapport aux mesures automatisées. Par ailleurs, il n'y avait pas de différence entre les mesures automatisées et les mesures ambulatoires diurnes par MAPA. Les recos de 2018 donnant pour consigne de diagnostiquer avec des mesures ambulatoires puis d'adapter sur des mesures au cabinet, il serait donc plus pertinent d'utiliser les mesures automatisées au cabinet pour adapter les traitements étant donné qu'elles sont proches des mesures ambulatoires au lieu de mesures classiques au cabinet.

Comme on l'a vu la semaine dernière, l'adaptation des traitements antihypertenseurs devrait se faire au cabinet (si les mesures au cabinet et en ambulatoire sont a peu près concordantes). Quand la tension est trop élevée, la remesurer a plusieurs reprise permet une baisse de PAS d’environ 8 à 11mmHg entre la 1ère mesure et la mesure finale d'après cet article du Jama internal medicine.
 

On avait parlé des risques de l'HTA blouse blanche pouvant être de réelles HTA avec atteinte d'organe et nécessitant un traitement (ici). Dans cette étude ayant suivi un échantillon représentatif de la population italienne pendant près de 30 ans, 1400 patients ont été suivis. Que ce soit en présence ou en absence d'atteinte d'organe, les patients avec HTA blouse blanche avaient un risque d'évènements cardiovasculaires mortels ou de mortalité globale plus faible que les patients avec HTA, mais plus élevé que ceux sans HTA. Actuellement, les recos sont pour traiter les patients avec HTA blouse blanche et atteinte d'organe cible mais on ne sait pas s'il y aurait un bénéfice à traiter les patients sans atteinte d'organe. (WHC: hypertension blouse blanche, NT: normotendu, SH: sujet hypertendu)


 
Les recommandations ESC de 2018 sur l'HTA proposaient de traiter l'HTA blouse blanche dans certains cas. Cette méta-analyse d'Annals of internal medicine retrouve une augmentation du risque de mortalité globale de 33% et de mortalité cardiovasculaire de 36% chez les patients avec une HTA blouse blanche non traitée par rapport aux patients normotendus, mais pas d'augmentation de mortalité en cas d'HTA blouse blanche traitée. Alors, faut-il traiter l'HTA blouse blanche ? Les auteurs concluent qu'il est important de faire des mesures à domicile. Ainsi, il est probable que ces HTA blouse blanche soient en fait un sous diagnostic d'HTA réelle, d'où l'importance du respect des seuils un peu plus bas en mesure ambulatoire, et de la recherche d'atteintes d'organes chez ces patients car c'est une indication au traitement
 
L'étude TIME dont on avait parlé ici  à propos de la prise vespérale des antihypertenseurs été publiée. En effet, les 20 000 patients hypertendus ont été randomisés entre prise de l'ensemble des comprimés entre 8h et 10h ou entre 20h et 0h (sauf si diurétique qui pouvaient être pris à partir de 18h). Les chiffres tensionnels le matin étaient un peu plus faible après une prise le soir et ceux du soir un peu plus faible après une prise le matin (1mmHg de différence...) . Il n'y avait pas de différence sur les critères de jugement cardiovasculaires après 5 ans de suivi. Cependant, lors d'une prise le soir, il y avait un peu moins de sensation de malaise, de douleurs abdominales, de diarrhées et de myalgies, et un peu plus de mictions diurnes ou nocturnes, et "d'autres effets indésirables non spécifiées".
 
On avait parlé des prises d'antihypertenseurs le soir qui permettaient de mieux contrôler la tension artérielle et de réduire la mortalité. Un très gros essai contrôlé, TIME, a randomisé la prise d'anti-HTA soit le matin, soit le soir chez 20000 patients. Il n'y a pas eu de différences en termes d'évènements cardiovasculaires à 5 ans. La principale différence avec la revue systématique précédente réside dans le fait que TIME faisait prendre tous les traitements au même moment, alors que la revue systématique faisait prendre "au moins 1 anti-HTA le soir", et donc un certain nombre de cas "matin et soir" (attendons la publication, car là, c'est la communication du congrès de l'ESC). Bref, pour le moment, on peut laisser les patients choisir quand ils préfèrent le prendre pour que l'observance soit optimale.
 
Une revue systématique vient confirmer l'idée de prendre les traitements antihypertenseurs plutôt le soir (cf ici). En effet, la prise d'au moins un anti-hypertenseur le soir était associée à une réduction relative du risque de mortalité globale et d'évènements cardiovasculaires de  50 % environ par rapport à des patients sans antihypertenseurs le soir.

Un nouvel essai randomisé de l'European Heart Journal retrouve que prendre au moins un des traitements anti-hypertenseurs le soir, au lieu de tous les prendre le matin permet de diminuer davantage le risque de mortalité globale, de mortalité cardiovasculaire et d'évènements cardiovasculaires! Ça va dans le sens d'autres études dont j'avais parlé chez les patients diabétiques.

 
Pour mémoire, l’excrétion de sodium reflète exactement son absorption. D'après une méta-analyse du Lancet, une consommation de plus de 7g de sel par jour et de moins de 3g augmentait les évènements cardiovasculaires chez des patients hypertendus! Donc le régime sans sel strict, n'est pas non plus adapté en cas d'hypertension. Chez des patients non hypertendus, les apports de moins de 3g de sel augmentaient le risque cardiovasculaire, cependant, une consommation élevé de sel n'était délétère sur les critères de jugements cardiovasculaire. Ainsi, ça confirme, le "sans sel stricte" est généralement à bannir (je ne parle pas des hypernatrémies, oedème aigue du poumon et autres situations aigues particulières...), et probablement qu'en l'absence de néphropathie, la capacité d'élimination rénale est suffisante pour gérer les excès de sel (mais en cas d'HTA, la néphropathie hypertensive gène probablement cette élimination qui aggrave l'HTA et ainsi de suite... du moins, c'est ce que je me dis vu que l'article ne fait pas d'hypothèse là dessus.)
 
Le BMJ a publié une étude concernant la tension artérielle normale. Cette méta analyse d'études de cohorte incluant 4,5 millions de patients jeunes (18-45 ans) suivis pendant 15 ans environ, retrouve qu'avoir une tension "normale" (PAS entre 120 et 130mmHg) ou "normale haute" (PAS entre 130 et 140mmHg) était associée à une augmentation des évènements cardiovasculaires par rapport à ceux avec une tension optimale (PAS < 120mmHg). Sur 4 millions de patients, bien sûr que les risques relatifs sont significatifs, en chiffres absolu ça donne des augmentations du risque d'évènement cardiovasculaire respectivement de 0,04% et 0,06% par an. D'autre part, les patients avec une PAS normale avaient une réduction du risque de mortalité globale par rapport aux patients avec une PAS optimale (en RA: -0,015%). Bref, un objectif de PAS inférieur à 130 semble être suffisant.

Au chapitre cardiovasculaire, la diminution de la consommation de sel diminue l'HTA et les évènements cardio-vasculaires! Dans cette étude, les auteurs disent que la consommation moyenne de sel par les américains est de 3,4g par jour.... Ça me semble vraiment peu sachant qu'en France elle est de 6,5g/jour pour les femmes et 8g/jour pour les femmes... Alors, à moins de compter les grammes de sel différemment je ne vois pas trop comment ils arrivent à leur compte, sauf s'ils comptent en fait uniquement le sel ajouté dans l'assiette et pas le sel déjà compte tenu dans les aliments comme le pain, la charcuterie et...) Bref, je suis cependant tout à fait d'accord avec la conclusion.

Au niveau cardio-vasculaire, les probiotiques sont une nouvelle fois sous le feu des projecteurs! Et là, c'est dans l'hypertension artérielle. Ils pourraient baisser significativement la tension artérielle, de 3,5mmHg en moyenne. Il reste à déterminer si cette différence est cliniquement pertinente et permet de diminuer la morb-mortalité... Cet article ne le dit pas. Toujours dans le même domaine, un autre article: l'HTA pourrait être baissée grâce à la consommation de thé, significativement, mais de moins de 2mmHg... 
 
Après un certain nombre d'essais plus ou moins efficaces, un nouvel article revient sur la dénervation rénale dans l'HTA. Il est conduit par la même équipe que les études précédentes. Cet essai randomisé a comparé la dénervation rénale à une procédure factice chez des patients hypertendus. Les patients devaient avoir plus de 140/90 malgré une mono ou bithérapie, ET des automesures entre 135/85 et 170/105 après 4 semaines de wash-out des traitements. A 2 mois de l'intervention, la dénervation réduisait la PAS de  6,3mmHg (7.9 vs 1.8mmHg) sur mesures ambulatoires, ce qui est concordant avec les autres études. Si on regarde les mesures en cabinet, les patients avaient une PAS avant whash-out de 155mmHg et de 157 après 4 semaines sans traitement. Il est étrange que l'arrêt d'un ou deux médicaments pendant 4 semaines ait uniquement fait monter la PAS de 2mmHg.....  On attend toujours un essai dénervation versus traitement médicamenteux, ou même un essai avec un suivi supérieur à 2 mois.
 
Nous vous avions parlé de la dénervation rénale dont les bénéfices étaient très limités en 2018, avec une baisse de 6mmHg de PAS à 2 mois de l'intervention. Une nouvelle étude randomisée a inclus des patients avec HTA résistante sous trithérapie pour traiter par dénervation rénale ou procédure factice. Cette fois ci, la baisse a été de 8mmHg dans le groupe intervention contre 3 dans le groupe contrôle à 2 mois du traitement. Une nouvelle fois, on n'a pas de données supérieures à 2 mois. Le groupe "contrôle" n'a pas d'anti-aldostérone pour comparer à la dénervation ce qui est dommage car on ne compare pas à la prise en charge classique qui apporterai peut être un meilleur contrôle tensionnel.

Après la désillusion de la dénervation rénale dans l'HTA résistante, les spécialistes tentent de traiter l'HTA en créant une anastomose artério-veineuse iliaque. D'après l'étude, ça fait magnifiquement baisser la tension à 6 mois, mais ça entraine également 29% de sténose veineuse ipsilatérale. Balance bénéfice-risque, vous disiez?
 
C'est pas super méd gé, mais un des sujets à la mode dans l'HTA reste la dénervation rénale. Après l'échec de cette technique dans l'étude SIMPLICITY chez des patientes avec HTA sévère ou résistante il y a quelques années (cf ici), une nouvelle étude vient de re-tester l'efficacité du traitement chez des patients avec une HTA modérée à sévère. En effet, ils sont inclus des patients avec auto mesures tensionnelle entre 135/85 et 170/105 après arrêt des traitements anti hypertenseurs. Par rapport à la procédure simulée, la dénervation rénale réduisait la tension artérielle de 6,3mmHg. Bref, d'une part, sur 800 patients screenés, seuls 146 ont été inclus, donc on voit bien que la sélection est rude alors qu'en incluant des patients avec des HTA à partir de 135mmHg sans traitement, les auteurs visaient un traitement de première intention. Ensuite, on pourrait comparer la dénervation rénale au traitement médicamenteux, mais je pense qu'avec une baisse de seulement 6mmHg, les traitements médicamenteux feront mieux. De plus, le critère de jugement étant une baisse de tension à 2 mois, on ne sait pas si l'effet est prolongé ou s'il y a, à terme un effet sur la mortalité ou les évènements cardiovasculaire. De la même façon, sur 2 groupe d'environ 70 patients, il est logique de ne pas voir de différence d'effets indésirables liés à la procédure.. Enfin, devant la discordance entre les études sur la dénervation rénale, seule une bonne méta-analyse pourrait donner des éléments de réponses, alors c'est assez énervant de voir les gros titres de presse avec un médecin blindé de conflits d'intérêt déclarer que ce traitement est efficace sans aucune nuance...

Dans l'ère des nouvelles technologies, les smartphones et leurs applis de santé sont des aides potentielles pour prendre en charge les patients. Cependant, une fois de plus ils n'ont pas aidé de façon satisfaisante les patients hypertendus.En effet, dans un essai contrôlé randomisé bien qu'ils aient permis une meilleure observance (sur l'échelle de Morisky), ils n'ont pas permis d'avoir un meilleur contrôle tensionnel après 3 mois de suivi.

Fini les conseils médicaux chez le médecin! Le coiffeur (dont le prix de la coupe de cheveux est supérieur au prix d'une consultation) semble être un bien meilleur endroit pour dispenser des conseils médicaux d'après une étude du NEJM. En effet, une information des patients sur l'HTA chez le coiffeur par des professionnels de santé a permis un meilleur contrôle tensionnel des patients! Si un thésard veut s'emparer du sujet en France, on peut faire la même étude au MacDo ou voir si une info santé modifie les menus pris par les clients (vu qu'ils ont un stand au CMGF, ça pourrait les intéresser!)

Cette étude qualitative britannique a interrogé les médecins généralistes sur leur prise dans décision dans la prescription d'antihypertenseurs chez les personnes de plus de 80 ans multimorbides. L’absence de recommandation claire chez cette population est un vrai obstacle à la déprescription favorisant une attitude d’attente d’un évènement déclencheur, comme une chute ou une interaction médicamenteuse, pour intervenir. Les médecins pouvaient se sentir en difficulté face à la prescription du spécialiste ou les prescriptions « à vie », arguments d’autorité pour certains patients, ou encore face à des objectifs tensionnels pas toujours atteints.  L’expérience des médecins permettait de s’éloigner des recommandations et d’avoir la relation de confiance nécessaire à la discussion.  


Une étude qualitative a interrogé des médecins généralistes sur leur vision des mesures tensionnelles et du risque cardiovasculaire global. Bien qu'ils aient peu confiance dans les mesures au cabinet, ils considéraient qu'elles étaient importantes pour évaluer le risque cardiovasculaire des patients. Cependant, ils considéraient que c'était le principal déterminant du risque cardiovasculaire, et la prise en compte des autres facteurs de risque dans l'évaluation du risque global était limitée. Ils déclaraient, à juste titre probablement, que l'introduction d'un traitement pour la tension et le cholestérol était à prendre en compte selon une approche centrée-patient, bien que chaque facteur de risque semble être pris indépendamment.  Il semble donc important d'essayer de développer cette notion de risque global à introduire dans la discussion avec le patient plutôt qu'une approche par facteur de risque.
 
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Dyslipidémie



  version du  16/12/2023 (explications: Les statines sont mes copines)

1/ Recommandations

 

2023: Alors que nous sommes toujours dans l'attente des recos HAS concernant les dyslipidémies, des recos canadiennes a destination des généralistes ont été publiées (merci Rémy), et repose sur une méthode GRADE (et sur cette revue systématique). On peut donc y lire :

- le bilan est recommandé à 40 ans chez les hommes et 50 chez les femmes, tous le 5 à 10 ans, et il n'est pas recommandé de le compléter par un score calcique ou un dosage de LpA ou ApoB (contrairement aux préconisations des recos de cardio)

- En se basant sur le risque Framingham à 10 ans, une statine d'intensité élevée est indiquée si > 20% ou prévention secondaire, une statine d'intensité modérée est indiquée si risque > 10%, et aucun autre traitement que des statines n'est recommandé en prévention primaire

- Les auteurs ne recommandent pas de cibles thérapeutiques de LDL.

- A 75 ans, il n'est pas généralement pas recommandé d'initier un traitement, mais un traitement peut être poursuivi et il n'est pas recommandé d'arrêter un traitement "juste" à cause de l'âge.

 
 
2022: L'USPSTF américaines a publié des recommandations sur l'utilisation des statines en prévention primaire. Les auteurs recommandent avec un grade B, la prescription d'une statine entre  40 et 75 ans chez les patients ayant un ou plusieurs facteurs de risque cardiovasculaire (dyslipidémie, diabète, hypertension, tabagisme) ET un risque cardiovasculaire ASCVD supérieur à 10% (soit un risque élevé). Avec un grade C, ils proposent de traiter les patients avec facteurs de risque mais avec un ASCVD entre 7,5 et 10%, en soulignant que le bénéfice est moindre (risque intermédiaire). Enfin, il n'y a pas suffisamment d'étude pour faire des recommandations concernant l'initiation d'une statine après  75 ans.
 
2020:Le département des vétérans américain a publié des recommandations concernant les dyslipidémies. J'aime bien la vision des américains sur les dyslipidémies (je remets leurs recos ici). Les auteurs recommandent de dépister la dyslipidémie pas plus fréquemment que tous les 10 ans ou tous les 5 après 40 ans si facteurs de risques, et d'utiliser un calculateur de risque évaluant la morbimortalité à 10 ans. Ils sont également opposés au bilan lipidique systématique chez les patients traités.

En prévention primaire, ils recommandent d'utiliser une statine à dose modérée en l'absence de preuve d'intérêt d'une statine forte dose, si le risque est > 12% ou LDL >1,9g/L (et à discuter avec le patient à partir de 6%).

En prévention secondaire, ils recommandent l'utilisation de statines à dose modérée et de proposer une statine forte dose selon la tolérance et les préférences du patient. L'ezetimibe peut également être ajouté pour diminuer les évènements cardiovasculaires et non la mortalité, après discussion avec le patient. Les anti-PCSK9 peuvent de la même façon être proposé en plus de la statine et de l'ezetimibe.

En cas de mauvaise tolérance des statines, on peut changer de statine ou proposer une posologie non quotidienne (1 jour sur 2 par exemple). Les auteurs sont contre l'utilisation de niacine, fibrates, oméga 3 en complément des statines, mais pour l'activité physique et le régime méditerranéen.


 
2019 : La première recommandation importante concerne les dyslipidémies! Pour mémoire, les précédentes de l'ESC dataient de 2016, les françaises de 2017 ont été retirées pour conflit d'intérêt des auteurs et les américaines de 2018 étaient pas mal. Et donc voici les recos ESC 2019 qui sont déjà très controversées et qui vont être difficilement applicables en France à ce jour, malheureusement, ce sont celles auxquelles on doit se référer maintenant:
Évaluation du risque cardiovasculaire: le SCORE est toujours utilisé mais adapté sur le nouveau site (nécessitant une inscription gratuite, l'accès est rapide une fois inscrit et le bon raccourci mis en favoris) : http://www.heartscore.org/fr_FR/access . Ce calculateur retrouve (d'après mes quelques tests) des chiffres un peu plus faibles qu'avec cardiorisk.fr . On reste sur un risque faible si < 1%, modéré entre 1% et 5% (ou diabète de moins de 10 ans avant 50 ans), élevé entre 5% et 10% ou diabète non compliqué ou insuffisance rénale modérée, ou LDL > 1,9g/L et très élevé si > 10% ou prévention secondaire ou diabète compliqué ou insuffisance rénale sévère. Le risque cardiovasculaire peut être adapté selon le calcul du score calcique ou la présence d'athérome carotidien. L'apoB est à utiliser dans l'évaluation du risque si hypertriglycéridémie, diabète, obésité ou syndrome métabolique. La Lp(a) devrait être dosée 1 fois dans la vie de tout le monde : si > 1,80g/L le risque cardiovasculaire est élevé (comme pour une hypercholestérolémie familiale)
Les objectifs : On voit qu'on est resté à des objectifs chiffrés, mais s'y ajoutent aussi les baisses en pourcentage qui permettent de déterminer quelle intensité de statine utiliser (mais en fait bof vu les objectifs...) voici le tableau des objectifs de LDL :

  • risque faible : LDL < 1,16g/L : il faut donc traiter quasiment tout le monde (puisque même les moins de 50 ans ont rarement un LDL à ce niveau. Notons que le traitement d'emblée n'est recommandé que si le LDL initial est > 1,9g/L , sinon, on peut tenter les RHD qui ne suffiront pas.
  • risque modéré : LDL< 1g/L : là, on est bon pour traiter tous les hommes de plus de 50 ans
  • risque élevé : LDL < 0,7g/L : ça implique une statine forte dose (seul l’atorva a une efficacité démontrée en prévention primaire) et probablement l’ajout d’ezetimibe dont le bénéfice n’est pas démontré pour cette indication.
  • risque très élevé : LDL < 0,55g/L : c’est la prévention secondaire : statine forte dose + ezetimibe d’emblée et même avec ça, c’est inaccessible car ce sont les résultats sous anti PCSK-9 (dont j'avais parlé ici) qui ne sont pas disponibles en France. Et s'il y a une récidive sous traitement l'objectif est abaissé à 0,40g/L!!!!!!
Les médicaments: Pour arriver à ces objectifs, il est recommandé de prescrire une statine de forte intensité (et oui, exit la simva et la pravastatine qui sont pourtant les seules a avoir démontré un bénéfice clinique en prévention primaire!), puis d'ajouter l'ezetimibe si besoin, puis de recourir aux anti-pcsk9. L'initiation du traitement en prévention primaire est recommandée avant 75 ans, et peut être effectuée après chez les patients à haut risque. La statine n'est pas recommandée chez les femmes diabétiques pré-ménopausées sans contraception.
Hypertriglycéridémie: Pour l'hypertriglycéridémie, la statine est le traitement de 1ère intention dès 2,0g/L ... Et si les trigly sont entre 1,35g/L et 5g/L chez des patients à haut risque, l'icosapentethyl est recommandé (basé sur cette étude) mais comme il n'est pas dispo en France...
Conclusion: ces recommandations, à mon avis, sont truffées des conflits d'intérêt liés aux anti-PCSK9 qui ont modelé la recommandation et les objectifs. Le concept de décision partagée semble totalement étranger aux auteurs qui n'en parlent pas une seule fois. Les recos américaines sont bien plus cohérentes avec les données scientifiques, applicables en médecine générale et acceptables par les patients. Il serait donc bien que lorsque la HAS revalidera des recommandations, elles soient adaptée et ne copient pas ces recos ESC comme cela avait été le cas avec les recos abrogées de 2017. Je retiendrai quand même, le nouveau calculateur de risque qui est plus adaptée et l'idée d'ajout systématique de l'ezetimibe en prévention secondaire concordant avec les données de la Cochrane, mais les anti-PCSK9 en prévention secondaire ne devraient être employées que dans de rares conditions (comme LDL > 1g/L malgré la bithérapie ou les récidives d'évènements sous traitement).

2018 : La société américaine de cardiologie a publié des nouvelles recos concernant les dyslipidémies. Elles sont pas mal, à vu d’œil puisque déjà, il n'y a pas d'objectif de LDL en règle général (en gros, sauf en prévention secondaire où l'intensification des traitements se faisait pour un LDL > 0,7g/L), ce qui est en accord avec les études.
- Pour commencer, les statines forte dose sont: atorvastatine 40-80, rosuvastatine 20-40; les statines à doses modérées sont notamment: simvastatine 20-40, atorvastatine 10(-20), rosuvastatine (5-)10 et pravastatine 40(-80); les statines faibles doses sont notamment: simvastatine 10, pravastatine 10-20.
- Un bilan préthérapeutique évaluant le risque de douleurs musculaire, l'état hépatique et le risque de diabète est à considérer avant de débuter un traitement.
- Le score évaluant le risque est le score américain AHA/ACC qui évalue les infarctus et AVC fatals et non fatals ainsi que la mortalité cardiovasculaire. Il prend en compte les antécédents familiaux et le diabète. On peut approximativement passer au SCORE européen évaluant la mortalité cardiovasculaire en le divisant par 4 (parce que la morbi-mortalité correspond à environ 4 fois la mortalité. Ainsi le haut risque européen >5% correspond bien au haut risque américain >20% décrit dans ces recos)
- En prévention secondaire: à tout âge.

  • Les américains considèrent désormais les antécédents cardiovasculaires non à très haut risque et ceux à très haut risque (c'est à dire avec 2 évènements majeurs ou 1 évènements majeur et 2 conditions associées, cf tableau): l'intérêt est de dire que si le LDL n'est pas inférieur à 0,7g/L chez ceux à très haut risque, il y a une indication aux anti-PCSK-9. Sinon, il est recommandé un traitement maximal toléré par statine de forte dose, avec ajout éventuel d'ezetimibe chez les moins de 75 ans (au delà de 75 ans: pas de cible).


- En prévention primaire: entre 40 et 75 ans (hors diabète)

  • Si le LDL est > 1,90g/L, il y a une indication de traitement, par statine forte dose dans l'idée d'une hypercholestérolémie familiale. Le Score de Dutch n'est pas calculé, mais peut l'être avant 40 ans pour discuter d'un traitement en cas d'antécédent familiaux d'accident cardiovasculaire précoces.
  • Sinon, la grande nouveauté est cette phase de "Risk discussion with the 10-year risk score". En gros, il est vraiment dit qu'il faut voir avec le patient s'il souhaite un traitement qui peut être proposé à partir d'un risque >7,5%, avec une statine modérée ou une statine forte en cas de risque > 20%.
  • La 2ème nouveauté concerne les patients avec un risque entre 7,5% et 20% qui seraient indécis. Alors que l'USPSTF vient de dire que le score calcique (CAC) n'avait pas fait ses preuve chez les patients asymptomatiques, la société savante de cardiologie propose de l'utiliser pour faire pencher la balance décisionnelle: CAC égal 0 => pas de traitement, CAC entre 1 et 99 => statine si âge > 55 ans, et si CAC >100 => statine. (on voit quand même les différence d'avis entre les sociétés savantes...) Les autres critères, cliniques pouvant faire pencher la balance pour un traitement dès 7,5% de risque sont les antécédents familiaux précoces, le syndrome métabolique, une insuffisance rénale chronique, une pathologie inflammatoire comme le VIH, les connectivites..., l'antécédent de prééclampsie et les origines comme l'Asie du sud est)
- En prévention primaire: après 75 ans

  • Il est acceptable d'initier un traitement selon les modalités précédentes (sauf si le LDL est < 0,7g/L) et il est également acceptable d'arrêter le traitement en cas de fragilité, multimorbidité et espérance de vie réduite. (je passe sur le score calcique qui peut être utiliser pour limiter les traitements s'il est égal à 0, car je doute de voir un patient avec un CAC à 0 après 75 ans...)
- Chez les patients diabétiques de 40 à 75 ans, une statine modéré est indiquée quelque soit le risque cardiovasculaire, mais une évaluation du risque cardiovasculaire est une option. A 75 ans, un traitement bien toléré peut être poursuivi (on a vu il y a quelques semaines qu'il y avait un bénéfice possible jusqu'à 85 ans)




- Concernant l'hypertriglycéridémie: 

  • Il est recommandé de ne traiter que par règles hygiénodiététiques! Sauf en cas de risque cardiovasculaire >7,5% où un traitement par statine peut être entrepris. Si l'hypertriglycéridémie persiste en étant supérieure à 10g/L, un traitement par fibrate peut être entrepris à la place ou en plus d'une statine (dans ce cas: fenofibrate)
Cela concorde assez avec les recos françaises, sauf sur le "objectifs" que les américains n'ont pas en prévention primaire. On vise une baisse de 30% ou 50% selon le risque et on espère l'atteindre. Si on ne l'atteint pas, il n'est pas forcément recommandé d'intensifier en prévention primaire, et c'est cohérent avec les études sur le sujet.

2018 : L'académie de médecine a publié un avis sur l'efficacité des statines et leurs effets indésirables. Les auteurs retrouvent que les statines instaurées pour un SCORE >5% est cout-efficace, alors que le bénéfice est particulièrement faible pour des seuils à 3% ou 4% (alors que dire du seuil de 1% des recos HAS!) .Chez les patients diabétique, aucun seuil n'est proposé, mais il semble que les statines soient bénéfique quelque soit le LDL en prévention primaire. En prévention secondaire, le traitement intensif semble cout efficace également. Sur les effets indésirables 10 à 25% des patients ont des douleurs musculaires. Le NNH pour l'apparition d'un diabète serait de 500 à 120 patients traités pendant 5 ans respectivement pour des faibles doses et des fortes doses (c'est donc assez fréquent)

2018 : La HAS abroge sa reco de 2017 sur la prise en charge des dyslipidémies.

2017: Le CNGE a fait un communiqué de presse à propos des dernières recommandations HAS du traitement des dyslipidémies. Bien que l'utilisation du calcul du risque cardiovasculaire soit un point positif de ces recommandations, la présente de cibles de LDL est plus critiquable. Tout ça pour dire qu'il faut vraiment que je prenne le temps de rédiger ce billet sur les dyslipidémies...

2017: [Abrogées] La HAS a publié des recommandations sur les dyslipidémies. Elles sont basées sur celles de l'ESC avec quelques précisions par endroit quand l'ESC n'avait pas émis de propositions claires. Ainsi, le risque cardiovasculaire se calcule avec SCORE. Les patients à faible risque (SCORE<1%) et à risque modéré (SCORE entre 1 et 5% ou diabète T1/T2 < 40ans non compliqué) ont des objectifs respectifs de LDLc à 1,9g/L et 1,3g/L à atteindre par règles hygiénodiététiques en première intention. Les patients à haut risque (SCORE entre 5 et 10% ou diabète >40 ans non compliqué pour simplifier, ou insuffisance rénale modérée) et à très haut risque (SCORE > 10% , diabète > 40 ans avec complication, IRC sévère ou maladie cardiovasculaire établie), les objectifs sont de 1g/L et 0,7g/L à atteindre avec une statine.
Quelle statine? La HAS recommande désormais la simvastatine et atorvastatine en première intention, tout en rappelant l'absence d'AMM de cette dernière en prévention secondaire. Ainsi, quand l'objectif de LDL n'est pas atteint, on peut ajouter l'ezetimibe qui a des preuves d'efficacité démontré dans cette indication.
Le point différent des recos de l'ESC concerne les hypertriglycéridémies, car l'ESC recommandait une statine en première intention. La HAS recommande une statine si le LDL n'est pas à l'objectif, mais s'il l'est c'est un fibrate qui est recommandé en première intention. Le tableau étant complexe, je vous laisse aller le regarder. Voici cependant le tableau principal:


2017: Le collège américain de cardiologie a publié des recommandations sur les traitements non-statine dans les dyslipidémies. D'abord, ces traitements recommandés sont soit: l'ezetimibe (qui a démontré un bénéfice cardiovasculaire avec difficulté dans IMPROVE-IT en prévention secondaire), soit: les anti-PCSK9 (on en avait parlé un peu ici). Donc, on ne parle nulle part de fibrate, hein. Reprenons. Cette reco dit qu'il faut un traitement quand les statines ne sont pas tolérées ou insuffisantes pour 4 types de patients:
- ceux en prévention secondaire avec un LDL >1g/L
- ceux avec un LDL > 1,9g/L
- les patients diabétiques avec un LDL > 1g/L
- les patients avec un risque AHA/ACC > 7,5% soit à très haut risque. Ce qui est bien avec cette reco, c'est que les patients à risque modéré n'ont pas à être traité (contrairement à ceux à risque modéré dans les recos de l'ESC).
Bref, dans les autres situations ou les statines ne sont pas tolérées, y avait il une réelle indications à proposer une statine?

2016: Pour commencer, l'ESC a publié des nouvelles recommandations de prise en charge des dyslipidémies. Je me suis donc réjouis à l'idée de les lire, et j'ai quand même déchanté. En effet, alors que les recos américaines se montraient plutôt en faveur d'une baisse relative du LDL de 30-50% selon le risque cardiovasculaire, l'ESC revient à des objectifs de LDL. Il faudrait cibler un LDL < 0,7g/L en cas de très haut risque (prévention secondaire, insuffisance rénale sévère, diabète+atteinte d'organe ou diabète + HTA ou tabac ou dyslipidémie, risque cardiaque à 10 ans >10% d'après SCORE) (Je ne reviendrais pas sur "SCORE" qui reste le seul score cardiovasculaire validé en population française et dont l'utilisation est préconisée par le CNGE faute de mieux, même si d'autres calculateurs comme le QRISK sont peut être plus adaptés). Pour les patients à haut risque (score entre 5 et 10%, diabète non compliqué, insuffisance rénale modérée, HTA sévère et hypercholestérolémie sévère), la cible de LDL est de 1g/L. Comment atteindre ces objectifs: avec des statines! La molécule préférentielle n'est pas désignée, mais un tableau rappelle que seul la rosuvastatine 20 et l'atorvastatine 40 et 80 permettent une diminution de plus de 50% du LDL. En cas d'échec de monothérapie quelque soit le risque, l'ajout de l'ezetimibe (qui n'a pas démontré de bénéfice en dehors de la bithérapie avec la simvastatine en prévention secondaire d'un infarctus) est proposé. Les fibrates ne sont même pas mentionnés en cas d'intolérance à une statine: ezetimibe et colestriamine sont à préférer. Par ailleurs bien que le gemfibrozil soit le seul a avoir prouvé un faible bénéfice d'après ces recommandations, c'est le fenofibrate qui est recommandé (du coup, je comprend pas trop leur raisonnement) dans les hypertriglycéridémies supérieures à 2g en échec d'un traitement par statine (qui est à mettre en 1ere ligne) ou en cas d'intolérance aux statines.Une partie de la réponse réside probablement dans le faite que le gemfibrozil ne doit pas être associé à une statine car les effets indésirables musculaires sont accrus par rapport à une autre association association statine +  fibrate (mais ça n'explique pas pourquoi le fenofibrate est préféré en cas de monothérapie). Cette partie sur les hypertriglycéridémies est peu claire malgré la biblio présente dans l'article car les récentes publications ne sont pas en faveur d'une balance bénéfice risque positive pour un traitement en dehors des hypertriglycéridémies >4g/L et ce, essentiellement à cause du risque pancréatique plus que pour le risque cardiovasculaire. Enfin, concernant les sujet très âgés, le traitement de la dyslipidémie doit être poursuivi en prévention secondaire et à discuter si HTA+diabète+tabac+dyslipidémie en prévention primaire (bien qu'aucune étude n'ait clairement prouvé un bénéfice chez les sujets très âgés)



2016: Concernant la prévention primaire cardiovasculaire, pour une fois, les américains produisent des recommandations meilleures que les nôtres. En effet, l'USPSTF (HAS américaine) recommande une statine à de moyenne puissance (type simvastatine 40 en gros) aux adultes de plus de 40 ans avec au moins 1 facteur de risque cardiovasculaire ET un risque cardiovasculaire supérieur à 7,5% avec le calculateur ACC/AHA. Enfin, les auteurs confirment l'absence de balance bénéfice risque favorable en prévention primaire au delà de 75 ans.

2016: Après la sortie des recommandations sur les dyslipidémies par la société Européenne de Cardiologie, les recos françaises de la société d'athérosclérose, la société française de diabétologie et de la société d'endocrinologies viennent d'être publiées. Des "cibles de LDL" ont une fois de plus été établies:
  • LDL < 1,9g/L: si le risque cardiovasculaire (calculé avec SCORE) < 1% ou 0-1facteur de risque (hors diabète)
  • LDL < 1,3g/L: si risque cardiovasculaire entre 1% et 5% ou 2 facteurs de risque ou diabète
  • LDL < 1g/L: si risque cardiovasculaire > 5% ou 3 facteurs de risque
  • LDL < 0,7g/L: si diabète avec microangiopathie ou diabète et 2 autres facteurs de risque ou prévention secondaire.
On se retrouve donc dans un algorithme mixte avec un calcul de risque cardiovaculaire (ce qui a un intérêt démontré) mais aussi avec un maintien du "nombre de facteur de risque" qui ne repose sur rien, probablement parce que les sociétés savantes ne pensent pas qu'un médecin puisse calculer un score de risque probablement....
Chez le plus de 75 ans, une statine en prévention primaire peut être poursuivie si bien tolérée, mais en prévention secondaire, l'objectif de LDL est revu à la hausse: < 1g/L. 
Le point positif est néanmoins l'absence d'indication de traitement spécifique d'une hypertriglycéridémie inférieure à 5g/L.

2014: Je vais commencer par la nouvelle publication du Collège National des Généralistes Enseignants portant sur les dyslipidémies. Beaucoup plus percutant que lors de la première publication, le CNGE recommande de ne plus utiliser les objectifs de LDL, de ne plus contrôler le LDL sous traitement, de ne prescrire que les traitement éprouvés que sont la pravastatine 20 et simvastatine 40 à dose fixes et d'utiliser le score SCORE pour déterminer le haut risque cardiovasculaire (risque de décès cardio-vaculaire supérieur à 5% à 10 ans).

2014: Faisant suite aux recommandations américaines de 2013, le NICE, responsable des recommandations britanniques se lance dans la prise en charge des dyslipidémies. Pas de cible de cholestérol mais une baisse en pourcentage par rapport à la valeur initiale. En prévention primaire, ils recommandent un traitement chez les patients ayant un risque d'évènement cardiovasculaires supérieur à 10% à 10 ans selon un nouveau calculateur (plus adapté à la population européenne) et calculant le risque après 80 ans (en argumentant d'une diminution des infarctus non fatals grâce aux statines après cet âge). Alors que leurs recommandations précédentes se tournaient vers de la simvastatine (dont l'efficacité est démontrée en terme de morbi-mortalité en prévention primaire et secondaire), ils recommandent désormais un traitement par atorvastatine (dont le bénéfice en prévention primaire est démontré chez le patient obèse diabétique et qui n'a malheureusement pas d'AMM européenne en prévention secondaire...) Le lobbying y serait il pour quelque chose?

2/ Dépistage et suivi

On voit de plus en plus l'absence d'intérêt du dosage du cholestérol à jeun. Cette étude a comparé les évènements cardiovasculaires chez des patients avec un dosage de cholestérol à jeun et non à jeun. Les auteurs ne retrouvent pas de différence significative concernant les taux de cholestérol, mais les triglycérides étaient néanmoins supérieurs en l'absence de jeûne. Le risque d'évènements cardiovasculaire était semblable entre les 2 modes de recherche de cholestérol et les dosages avaient un impact similaire sur la survenue d'évènements cardiovasculaires. (l'histoire ne dit pas si prendre une raclette 2h avant la prise de sang a un impact faible, alors ok pour que le patient ne soit pas à jeun, mais on va peut être pas pousser dans les extrêmes non plus.)

Le BMJ a publié un article sur les dyslipidémies. Concernant les objectifs et traitements, ils mettent un traitement si QRISK2 >10% avec comme objectif une baisse de 40% de LDL (jusque là, ça va) mais préconisent exclusivement de l'atorvastatine 20 alors que de la simvastatine 20 ou 40 associée à des règles diététiques permettraient d'atteindre l'objectif. Les indications à adresser chez un spécialiste peuvent également se révéler utiles:

  • antécédent familial de coronaropathie associé à un LDL > 1,9g/L ou triglycérides >4g/L
  • antécédent familial de LDL> 1,9 et patient avec LDL >1,9g/L
  • cholestérol total >3,5g/L en l'absence d'antécédent familial
  • triglycérides > 8g/L en l'absence de cause alcoolique ou de diabète non contrôlé.
Au final, ça réduit quand même pas mal les indications de voir un spécialiste pour une prise en charge de dyslipidémie! 
 
 
Un article du BJGP revient de l'hypercholestérolémie familiale (HF) à suspecter devant un cholestérol total > 2.9g/L avant 30 ans et > 3.5g/L après 30 ans. Sa prévalence est estimée à  0.16% des patients, soit 2 patients dans une patientèle, mais comme on suit des familles, en fait ça fait probablement un peu plus. Les patients avaient un LDL sans traitement à 1.55g/L (donc pas très élevé) et un SCORE 2 à 6% environ en moyenne (donc intermédiaire), mais ce score ne s'applique pas en cas de HF. Enfin 60% avaient quand même une statine, et plus d'un tiers aurait du en avoir et n'en avait pas. Cela reste compliqué de dépister ces patients si leur LDL n'est pas si élevé que ça au final....

Le Lancet Diabetes & Endocrinology a publié un article sur les hypercholestérolémies familiales. Il faudrait les repérer pour permettre une meilleure prise en charge du risque cardiovasculaire. Les auteurs proposent différents scores pour poser le diagnostic. Le Score de Dutch est celui conseillé par les recommandations francophones (les anciennes) et européennes, mais aucun score n'est parfait. Les autres scores sont peut être plus simples car il n'y a pas de somme à faire. Les auteurs insistent surtout sur le fait de penser à rechercher la dyslipidémie familiale si le LDL est supérieur à 1,9g/L car les scores classiques d'évaluation cardiovasculaire (SCORE pour nous) ne s'appliquent normalement pas. Les recommandations européennes et américaines ne s'embêtent pas en proposant un traitement par statine à forte dose chez tous ces patients quelque soit le risque évalué par les calculateurs, mais la recherche génétique pourrait permettre un meilleur dépistage familial.



 

Un article du JAMA cardiology s'est intéressé au pourcentage de patients avec indication aux statines en prévention primaire d'après les recommandations ESC 2021 par rapport aux autres recos (américaines, britanniques et ESC antérieures). Les auteurs retrouvent que les recos ESC  2021 recommandent un traitement chez 4% des patients, contre 20% pour les recos ESC basées sur le SCORE 1, et environ 30% pour les recos américaines et britanniques. Ce qu'il faut regardé, c'est donc qui est considéré comme ayant une indication d'après l'ESC 2021: ce sont uniquement les catégories "très haut risque" (mais en fait c'est "juste" du haut risque, en rouge dans les tableaux) à savoir risque > 7.5% avant 50 ans, > 10% après 50 ans (= recos de classe I) et les patients à "haut risque" (mais en fait c'est le risque "intermédiaire, en orange dans les tableaux) ayant également une AOMI, une faible niveau socio économique, un périmètre abdominal > 94cm chez les femmes ou 102 cm chez les hommes, ou un antécédent familial significatif de maladie cardiovasculaire (recos de classe II). C'est sur cette dernière catégorie que se fait la différence car ils n'ont pas considéré tous les patients à risque intermédiaire qui ont, d'après la reco, une indication à une statine si leur LDL est  >1g/L (donc presque tous en fait). Ils justifient ce choix car leur sélection s'est basée uniquement sur les recommandations de classe I et II. C'est un choix probablement judicieux (mais on aurait pu limiter aux recos de classe I). Cependant leur conclusion est la suivante: "les recos ont réduit l'utilisation de statines, il est nécessaire d'abaisser les seuils de traitement dans les prochaines recos pour augmenter l'utilisation de statines en prévention primaire".  Compte tenu du nombre des lignes de conflits d'intérêt des auteurs, et du fait que les indications de statines décrites sont celles qui ont démontré un bénéfice, il est probable que ces recos soient en fait plutôt bonnes pour sélectionner les patients à traiter. (PS: les auteurs ont aussi artificiellement augmenter les indications selon les recos américaines en donnant une indication aux patients avec un score ASCVD >7,5% pour lesquelles le choix n'est pas tranché, au lieu de ceux à haut risque avec un score ASCVD à 20%)

Par ailleurs, le calculateur de SCORE2 est désormais disponible ici pour la France (et autres pays à faible risque).
 
 
 

3/ Objectifs thérapeutiques

 La HAS avait laissé un objectif de LDL à 1g/L en post-AVC (contrairement au post infarctus qui a un objectif plus bas). Cette étude du NEJM a randomisé les patients ayant eu un AVC entre une cible de LDL < 0,7g/L versus entre 0,9g/L et 1,1g/L . (Notons que c'est un des rares essais qui compare vraiment des cibles de LDL et non un "traitement intensif versus un traitement moins intensif"). Ainsi, les patients avec une cible basse avaient en moyenne 0,65g/L et ceux avec une cible plus élevée 0,96g/L a la fin des 3 ans et demi de suivi. L'étude a été arrêtée prématurément pour des raisons "administratives" (??), mais il y avait une diminution significative des évènements cardiovasculaires (critère composite) de 22% (NNT=42!) sans effet sur la mortalité cardiovasculaire ni globale (ni sur chaque évènement pris séparément). Il n'y avait pas plus d'effets indésirables, mais attention car il y a une interaction significative: le bénéfice n'est présent qu'en cas d'AVC, et en as d'AIT il y a une augmentation significative des évènements! Bref, on va certainement quand même avoir un objectif < 0,7g/L dans les prochaines recos.
 
Un nouvel article aborde les cibles de LDL en prévention secondaire. C'est une suite de l'étude Fourier dans laquelle les patients étaient traités par évolocumab. Ainsi, les auteurs retrouvent que ceux ayant un LDL plus bas sous traitement avaient un risque d'évènements cardiovasculaire plus faible que ceux ayant un LDL plus élevé (notamment < 0.55 vs >  0.55g/L). Certains diront donc qu'il faut absolument cibler  0.55g/L en prévention secondaire. Cependant, comme les patients avaient le même traitement (évolocumab), et qu'il y a eu un ajustement sur les principaux facteurs de confusion (les autres traitements, le LDL initial etc...), les patients les plus "sensible" a l'évolocumab ont moins d'évènements cardiovasculaires. Effectivement, indépendamment de tout traitement, cette étude confirme qu'avoir un LDL plus élevé est un facteur de risque cardiovasculaire, mais elle ne permettra pas de déterminer des cibles thérapeutiques.

Les recommandations de cardiologie visent un contrôle du LDLc toujours plus bas alors que c'est une approche non démontrée, notamment en prévention primaire comme le rappelait le CNGE. Nous avions discuté des quelques études retrouvant un bénéfice à un traitement intensif hypolipémiant en prévention secondaire bien que les résultats ne soient pas concluants en essai randomisé (ici). Cet article du Jama Internal Medicine revoit une fois encore l'efficacité des statines en prévention primaire et secondaire. Les auteurs ont comparé les réductions absolues de risque avec les réductions relatives. Elles sont respectivement, pour la mortalité globale de 0,8% et 9%, pour les infarctus de 1,3% et 29% et pour les AVC de  0,4% et 14%, soient des réductions absolues que les auteurs qualifient de modestes. Les auteurs retrouvent en prévention primaire: une réduction relative du risque de 13% et une réduction absolue du risque de 0,6%. En prévention secondaires la RRR est de 14% et la RAR 0,9%. Ils ont aussi regardé si la baisse du LDL-cholestérol était associée à la réduction de ces 3 critères de jugement: les résultats sont non concluants ou non cohérents. S'il y avait un lien direct entre la baisse du LDL et le risque d'évènements cardiovasculaires, cette baisse expliquerait moins de 14% de l'effet, et concernerait plutôt le risque d'AVC que les autres critères de jugement. On peut regretter qu'il n'y ait pas d'analyses du lien entre LDL et évènements cardiovasculaires en fonction de la prévention primaire ou secondaire (mais s'ils ne l'ont pas présenté, c'est probablement que ça n'apportait rien par rapport à l'analyse conjointe).


Un nouvel article sur les statines a été publié dans le JAMA. En prévention secondaire, les statines de forte intensité (rosuvastatine 20 et atorvastatine 40 au moins) sont recommandées mais sans qu'aucune étude ne prouve leur efficacité (elles n'ont d'ailleurs pas l'AMM). Une étude de cohorte chez des patients ayant un antécédent de maladie cardiovasculaire a été menée. Elle retrouve que les patients traités sous forte statine forte dose vs statine modérée ont un risque de mortalité global diminué! (Hazard Ratio après ajustement : 0,91 , NNT: 250 patients à 1 an). Méthodologiquement ça se tient, bien que ce ne soit pas un essai contrôlé randomisé, les patients ont été ajustés sur un score de propension prenant en compte (entre autres) le cholestérol et les co-traitements, ce qui donne un résultat indépendant pour ces facteurs. Concernant les effets indésirables, seul la survenue de diabète est répertoriée, et étrangement, elle n'est pas supérieure en cas de statine forte dose... (c'est ce résultat non cohérent qui pourrait faire mettre en doute la validité des analyses) Enfin, cette étude semble indépendante de l'industrie pharmaceutique et les auteurs n'ont pas de lien d'intérêt. Voilà qui peut faire réfléchir sur  la prévention secondaire par statine...


Il y a bientôt un an, un premier article était en faveur des statines fortes doses en prévention secondaire et je l'avais analysé ici. Un nouvel article semble également en faveur d'une baisse plus importante du LDL en prévention secondaire pour diminuer les évènements cardiovasculaires. Les auteurs retrouvent en traçant des droites statistiques (droites de méta-régression) que plus la baisse de LDL en prévention secondaire est importante, plus les évènements cardiovasculaires sont réduits (réduction de risque relatif de 19% pour chaque baisse de 1,9mol/L). Quand on regarde les données brutes de la méta-analyse, on voit bien que les statines versus placebo, et les traitements non-statines (ezetimibe et anti PCSK-9) versus placebo diminuent le risque d'évènement cardiovasculaire 22% et 15% respectivement, sachant que les patients des études avec les traitements non-statines étaient souvent déjà sous statines. De plus, les études statines forte doses versus faible dose montre une diminution des évènements cardiovasculaires de 12%. Sur les critères secondaires que sont la mortalité globale et la mortalité cardiovasculaire, seule les traitements statine versus placebo montrent une diminution: pas de gain de mortalité dans les méta-analyses "statine forte dose versus faible dose" ou "traitements non-statine versus placebo". Ces comparaisons en méta-analyses semblent donc dire qu'il y a un bénéfice aux traitements "faisant fortement baisser le cholestérol" sur les évènements cardiovasculaires non mortels uniquement, ces résultats étant néanmoins à prendre avec précaution car, pour chaque méta-analyse réalisé, l'hétérogénéité des études était importante (ce qui veut dire que les patients n'étaient pas franchement comparables en fait...)

[EDIT: je n'aime pas trop les NNT sur des méta-analyses pour les raisons expliquées en commentaires, mais voici ce que ça donne pour les évènements cardiovasculaires:
- statine versus placebo: NNT = 22!! (16% vs 22%)
- statine forte vs faible: NNT = 51! (16% vs 18%)
- non-statine vs placebo: NNT= 51! (13% vs 15.6%)
Vu comme ça, ça inciterai à prescrire des statines fortes doses pour le gain sur les évènements non fatals, non?]

Voici une 3ème étude (pour les 2 premières, c'est par ici), du JAMA, montrant une association entre LDL et mortalité, pouvant inciter à viser des seuils de LDL plus bas. Cette revue systématique a inclue des études en prévention primaire et secondaire. Les auteurs ont tracé des droites de "méta-régression" entre le LDL initiale avant traitement et le risque de mortalité. Ainsi, ils retrouvent que plus le LDL initial est élevé, plus la diminution de mortalité globale, de mortalité cardio-vaculaire et d'infarctus est importante.(NB: le plus haut taux de réduction de mortalité est retrouvé avec les études 4S et WOSCOPS qui évaluait respectivement la simvastatine 40mg et la pravatstatine 40). Il n'y avait pas d'effet sur les AVC. Si on regarde le LDL obtenu après traitement, ce chiffre n'était pas associé à une diminution de la mortalité! Ça va quand même contre les "objectifs de LDL". Mais le risque relatif était un peu "meilleure" sur la mortalité cardiovasculaire pour des baisse de LDL > 0,65mg/L. Ainsi, la simvastatine et la pravastatine, permettant des baisses de LDL de 30% à 45%, peuvent s'avérer suffisant pour cibler des baisse de LDL de 0,65mg/L, ce qui semblerait être un objectif plus rationnel que la "cible" de LDL à atteindre.

L'article qui a pas mal fait parlé de lui cette semaine était publié dans le JAMA Internal Medicine et étudiait la survenue d'évènements cardiovasculaire majeurs selon le dosage de LDL cholestérol. Il remet en cause le "lower is better", une fois de plus. En effet, à partir d'une cohorte de patients observant avec coronaropathie traité (entre autre) par statines, les auteurs retrouve qu'un LDL < 0,7g/L ne fait pas mieux qu'un LDL< 1g/L (mais ce dernier diminue plus le risque cardiovasculaire que le LDL >1g/L). Si on regarde la figure des hazard ratio (HR), on voit une courbe en J, avec un risque minimal entre 0,8g/L et 1g/L. Quand on voit une telle figure, il faut se poser plein de questions, notamment: pourquoi ont ils mis des log(HR) et non des HR directement: probablement parce que la courbe aurait été beaucoup moins "frappante", "non significative" et beaucoup plus plate avec une autre échelle. Ensuite, on s'aperçoit que l'intervalle de confiance ne devient significatif qu'au delà de 1,2g/L, donc si l'on voulait vraiment conclure qui aille dans le sens des auteurs, c'est qu'il faut avoir un LDL inférieur à 1,2g/L sans chercher à le baisser davantage et ce en prévention secondaire (cf critères d'inclusion des patients). En pratique, mieux vaut utiliser une molécule qui ait directement montré un bénéfice à une posologie donnée plutôt que d'en utiliser une sans bénéfice clinique démontré. (Pour mémoire l'étude IMPROVE-IT prônait un bénéfice de l'ezetimibe avec statine qui baissait le LDL sous la barre des 0,7g/L par rapport a la simvastatine seule: la guerre fait rage!)


Voici un des rares essais randomisé étudiant les cibles de LDL ! Cet essai randomisé de non infériorité comparait une cible à  0,7g/L versus un traitement par statine forte dose (rosuvastatine 20 ou atorvastatine 40) chez des patients coréens avec antécédent d'infarctus du myocarde. Il n'y avait pas de différence sur le LDL < 0,7g/L entre les groupes (environ 58% des patients à cette cible) et la survenue du critère de jugement composite cardiovasculaire était de  8,1% dans le groupe "cible" versus 8,7% dans le groupe "intensif", ce qui correspond à une différence de 0,6%, inférieure au seuil de 3% de non infériorité choisi pour l'étude. Donc les 2 stratégies sont équivalentes. Cependant, 1/ un seuil de non infériorité de 3% à 3 ans de suivi (1% par an), c'est énorme. Cela fait une différence équivalente à l'efficacité de la simvastatine sur les évènements cardiovasculaires : réduction absolue de 5% des évènements en 5 ans dans HPS (1% par an). 2/ Si la différence de 0,6% était significative, ça ferait un NNT de 500 patients par an, donc ce n'est pas très élevé pour des études cardiovasculaires 3/ En admettant qu'il n'y ait pas de différence, il est difficile de conclure que les "objectifs ciblés" (recos européennes) sont aussi efficaces que les statines forte dose systématique (recos américaines), car les statines forte dose n'ont pas montré de bénéfice en prévention secondaire contrairement à la simvastatine (cf ici). Un bras "contrôle" par simvastatine 40 à tout le monde aurait pu montrer que la simva diminuait plus les évènements que les 2 autres bras, et ça, ils l'auraient peut être pas vu venir! En fait, ce qui a été comparé dans cette étude c'est rosuvastatine/atorvastatine forte dose (groupe forte dose) versus rosuvastatine /atorvastatine forte dose ou dose modérée + ezetimibe si LDL > 0,7g/L (groupe objectif cible) car il n'y avait quasiment pas d'autres statines utilisées. Et la différence en faveur du groupe cible pourrait être lié au fait que 2 fois plus de patients du groupe cible avaient de l'ezetimibe, qui a montré un bénéfice sur la survenue d'évènements cardiovasculaire en prévention secondaire. A noter que la survenue de diabète était moindre dans le groupe "cible" car il y avait moins de statines forte doses pourvoyeuse de diabète (NNH=143 patients par an). Bref, chaque société savante pourra interpréter cette étude non interprétable dans le sens qui l'arrange.
 
Il y a souvent une discordance dans les recos: que faire d'un patient à faible risque cardiovasculaire avec "juste" un LDL élevé? Les recos sont généralement en faveur d'un traitement quand le LDL est supérieur à 1,9g/L, pourquoi? Cet étude retrouve une surmortalité cardiovasculaire pour des LDL > 1,6g/L et 1,9g/L chez des patients avec un risque <7,5% non diabétiques selon le score américain avec une différence absolue de 0,6 patients sur 1000 (ce qui est plutôt faible) mais sans différence entre les patients 1,6-1,9g/L et >1,9g/L. Sur la mortalité globale, on ne retrouve qu'une augmentation pour les patients avec un LDL entre 1,6 et 1,9g/L (pas pour les >1,9g/L, étrange si on garde la théorie du LDL). Bref, certainement un bénéfice à traiter effectivement le LDL à partir de 1,9g/L voire 1,6g/L mais le bénéfice personnel semble faible (NNT d'environ 1660...)


Un article de Circulation s'est intéressé au risque lié au taux de cholestérol chez des patients à "faible risque", c'est à dire avec 1 risque AHA inférieur à sept pourcents et demi. Les auteurs retrouvent, logiquement que le LDL supérieur à un gramme est un facteur augmentant la mortalité cardiovasculaire et la mortalité globale en analyses multivariées. La conclusion est donc que même à risque faible, il faut traiter le cholestérol. Oui, mais non. Car, découvrir que, quelque soit le risque cardiovasculaire, le cholestérol est un facteur de risque cardiovasculaire n'est pas vraiment une grande nouveauté. De plus, dans l'analyse n'incluant que les patients avec un risque AHA inférieur à cinq pourcent, la mortalité par coronaropathie n'est plus significative que pour un LDL supérieur à un virgule six pourcents; ensuite, entre les différentes catégories de dosages de LDL, l'augmentation du risque n'est pas linéaire du tout; enfin on a déjà des études qui montrent que le bénéfice clinique à traiter un LDL élevé isolé est trop faible pour que le patient en tire un bénéfice clinique.

L'article principal de la semaine a été publié dans Annals of Internal Medicine et revient sur les seuils d'instauration d'un traitement par statine en prévention primaire. Les auteurs ont recherché les seuils de risque cardiovasculaire à partir duquel le bénéfice net d'une statine devrait la faire recommander. Ainsi, il est recommandé de prescrire des statines pour des risques trop bas pour que leur bénéfice net soit satisfaisant! Il n'y a pas de calculateur préconisé, mais on est plutôt sur un calculateur type américain ou QRISK-2 qui prend en compte les évènements fatals et non fatals (contrairement au score qui ne prend en compte que la mortalité). Les bénéfices apparaissent pour des risques évalués supérieurs à 10 %voir 15 % selon l'âge et le sexe:

Chez le concurrent du JAMA, dans le BMJ Open, une revue de la littérature étudiait l'association LDL et mortalité chez les plus de 60 ans (les "elderly", qui ne sont pas si âgés que ça en fait...). Les auteurs retrouvent que dans certaines études, le LDL élevé n'est pas associé à la mortalité; que dans d'autres il est associé à une augmentation de la mortalité, et enfin que dans certaines études, un LDL bas était aussi associé à une augmentation de la mortalité! Cette analyse (qui comporte néanmoins un certain nombre de biais de sélection des études analysées) remet en cause la "théorie du cholestérol" et oriente vers un bénéfice des molécules dans la prise en charge du risque cardiovasculaire et non un bénéfice de la baisse du LDL.
 
Chez les sujets âgés de plus de 60 ans, une analyse avait montré un sur-risque de mortalité en cas de LDL "trop bas". Voici un article du JAMA qui étudie cette fois ci le risque de fracture et le HDL (censé être protecteur cardiovasculaire) et qui met en évidence une association entre HDL élevé et un risque de fracture élevé chez les patients de plus de 65 ans (il y avait aussi une étude de 2022 montrant que le HDL élevé était associé à une surmortalité cardiovasculaire). Ainsi, avoir trop de "bon cholestérol", ne serait pas si protecteur... (en même temps, on a déjà dit qu'il ne fallait pas parler de bon ou de mauvais cholestérol...)

On va commencer par parler cholestérol, ce sujet est inépuisable étant donné que l'on trouve tout et son contraire. En effet, le JAMA a publié une méta-analyse retrouvant que chaque baisse de 1mmol/L de LDL (0,40g/L) est associé à une réduction de 23% des évènements cardiovasculaires avec une statine et de 25% avec un autre traitement hypolipémiant tel que le questran, l'ezetimibe, mais aussi règles diététiques et chirurgie bariatrique (autant dire que tout a été mélangé). Mêmes les fibrates diminueraient les évènements cardiovasculaires (RR: 0,88). Les auteurs concluent que le NNT pour éviter 1 évènement cardiaque par baisse de 1mmol/L le LDL est de 67 en prévention primaire et 22 en prévention secondaire. J'ai toujours du mal à comprendre comment à partir d'études qui ne montrent pas de différence significative, on retourne le critère de jugement pour déduire que le critère "intermédiaire" (baisse de LDL) est associé à l'évènement cardiovasculaire grâce au traitement. Probablement qu'en incluant des patients avec des LDL supérieure à 2g/L dans certaines études, une baisse de cholestérol quelque soit le moyen puisse être associé un gain cardiovasculaire (mais est ce parce que le cholestérol baisse que le risque cardiaque diminue ou le contraire?). L'hétérogénéité des études ne permet à mon avis pas de conclure sur l'efficacité des traitements en prévention cardiovasculaire, mais remontre bien une association pas forcément causale entre LDL et évènement cardiovasculaire.

Pour revenir une nouvelle fois à la problématique cholestérol. Il semblerait que chez les adultes jeunes avec un cholestérol non-HDL supérieur à 1,6g/L voient quand même augmenter leur risque de coronaropathie de  39% par dizaine d'année de cholestérol modérément élevé. 85% de ces patients n'ont pas d'indication à débuter un traitement médicamenteux, mais les règles diététiques semblent indispensables pour faire diminuer ce risque.

Pour finir sur le cardio-vasculaire, il a été remarqué des diminutions paradoxales de HDL après l'introduction d'une statine. Sans remettre en cause leur efficacité, il semblerait néanmoins que les patients subissant cette baisse paradoxale soient à plus haut risque que ceux ayant une augmentation du HDL. 
 

Le BMJ a publié une synthèse sur la prise en charge des hypertriglycéridémies (les recos ESC sur le sujet sont ici et les américaines ). Pour commencer la définition n'est pas très claire puisque la norme admise est < 1,5g/L (début de l'augmentation du risque cardiovasculaire lié à l'hypertriglycéridémie) mais qu'aux é    États Unis l'hypertriglycéridémie sévère est généralement > 5,0g/L (début de l'augmentation du risque de pancréatite) alors qu'en Europe c'est plutôt > 10g/L car le risque de pancréatite est faible avant ce seuil. Les auteurs ne recommandent de faire le prélèvement à jeun QUE si un prélèvement non à jeun est > 4,0 g/L. L'hypertriglycéridémie familiale (5%-10% de la population) a des triglycérides < 10g/L, une apoB normale et un cholestérol total normal: cette pathologie n'augmente pas le risque de pancréatite ni d'évènement cardiovasculaire en l'absence d'autres facteurs de risque.

Concernant la prise en charge thérapeutique, elle comprend:

  • Les règles diététiques alimentaires et l'activité physique pour permettre également une perte pondérale 
  • le sevrage alcoolique
  • l'arrêt des médicaments impliqués : thiazidiques, oestrogènes, bêta bloquants, neuroleptiques, corticoïdes, tamoxifène pour les principaux. 
  • Voici leurs propositions pour les traitements pharmacologiques: (notons que ce sont les seuls à proposer un fibrate en 1ère intention si trigly élevés et non une statine. Pour le coup, je préfère la statine qui baisse moins le taux mais qui a plus de bénéfices cliniques démontrés)


En parlant d'hypertriglycéridémie, une étude du JAMA Internal Medicine a retrouvé que dès une hypertriglycéridémie supérieure à 1,77g/L , le risque de pancréatite est multiplié par 2,3 et d'infarctus par 2,2 pour la classe 1,77-2,65!! Finalement, ne faudrait il pas traiter plus vite? Rien ne dit qu'introduire un traitement permettra de baisser le risque cardiovasculaire associé ce critère présumé intermédiaire.

Family Practice s'est intéressé à la prescription de statines par les MG devant le " cas d'un patient avec un risque cardio-vasculaire défavorable" avec des questionnaires. L'étude retrouve que le désir du patient d'être traité n'était pas pris en compte par les médecins, désir exprimé par un gain de survie qui variait selon les  "vignettes" de 3 mois à 8 ans. La décision n'était pas différente selon cette information. Le facteur prédominant de prescription était la conviction du médecin dans la survie liée au médicament. Ca aurait été plus intéressant avec un patient qui ne souhaite pas de statines peut être... 

4/ Statines

Un article du Lancet fait une méta-analyse de 28 essais contrôlés randomisés de grande ampleur pour évaluer les bénéfices des statines. C'est une méta-analyse sur données individuelles, c'est à dire que chaque patient a pu être analysé comme s'il s'agissait d'une seule grande étude. Sur l'ensemble de la population, dont le suivi moyen a été de 4,9 ans, les statines réduisaient les évènements cardiovasculaires de 21% pour chaque baisse de 1mmol/L soit des baisse de 0,4g/L (NNT= 143), et ce quelque soit l'âge. L'analyse séparant la prévention primaire et la prévention secondaire retrouve: en prévention primaire, un bénéfice sur les évènements cardiovasculaire: NNT= 334, mais seulement avant 70 ans, et en prévention secondaire, un bénéfice sur les évènements cardiovasculaire quelque soit l'âge: NNT= 100. Pour la mortalité globale, il faut aller chercher dans les annexes: bénéfice sur la mortalité globale (sans différence de prévention primaire ou secondaire recherché): NNT= 1000 (et non significatif si l'on regarde les patients de plus de 70 ans). Ces résultats sont bien plus modestes en comparaison de l'étude du JAMA sur les statines en prévention secondaire (cf ici).

En résumé à 5 ans de suivi:

  • bénéfice des statines sur les évènements cardiovasculaires en prévention primaire avant 70 ans avec NNT= 334
  • bénéfice des statines sur les évènements cardiovasculaires en prévention secondaire quelque soit l'âge avec NNT= 100
  • bénéfice des statines sur la mortalité avant 70 ans avec un NNT= 1000



Le BMJ parle des statines en prévention primaire en fonction du risque cardiovasculaire. Il est intéressant de voir que l'efficacité des statines en prévention primaire sur la mortalité globale n'est présente que pour les patients avec un risque entre 5 et 10 %, et que l'efficacité sur les évènements cardiovasculaires commence dès les faibles risques mais n'est plus significative pour les risques supérieurs à 20% (mais est ce parce que les statines ne sont plus assez efficace ou par manque de puissance? Parce que des patients avec un risque supérieur à 20% en prévention primaire y'en a quand même pas beaucoup...). Enfin, notons la différence entre les sexes: le NNT à 10 ans pour éviter un évènement cardiovasculaire est de 11 pour un homme mais de 166 pour une femme. Ainsi, la prescription de statine en prévention primaire doit vraiment être individualisée, et concerne plutôt des hommes avec un risque entre 5 et 10 % pour permettre une réduction de la mortalité et des évènements cardiovasculaires de façon cliniquement pertinente.

Le Lancet a publié une revue de la littérature sur l'efficacité des statines. Les très nombreux auteurs expliquent comment et pourquoi les résultats d'efficacité ont été sous-estimés et les effets indésirables sur-estimés dans les études. Il concluent qu'en prévention primaire, le NNT est de 20 patients et de 10 patients en prévention secondaire. Concernant les effets indésirables, il semblerait que seul 1 patient sur 100 ait des myalgies! Je crois que les auteurs, qui sont, soit dit en passant, les auteurs des "grandes études" sur les statines, n'ont jamais vu un patient de ville, à force de faire des conférences pour les laboratoires pharmaceutiques (cf la liste d'une page complète de conflits d'intérêt pour tous les auteurs). Heureusement que des sites EBM nous montrent les vrais chiffres avec 10% de patients avec myalgies, 1% de patient développant un diabète, un NNT pour un évènement cardovasculaire ou décès évité de 84 patients en prévention secondaire et 129 en prévention primaire sans bénéfice sur la mortalité.
 
Le BMJ publie une étude similaire où chaque patient avait 6 séquences de 2 mois pour recevoir "atorvastatine" ou "placebo" avec une évaluation à chaque période des douleurs musculaires par échelle visuelle analogique. Il n'y avait pas de différence à l'EVA entre les périodes avec statine ou placebo, pas de différences sur les activités quotidiennes et le nombre d'arrêts des traitements pour "douleurs insupportables" était similaire dans les 2 groupes.

Une étude du NEJM a utilisé une méthode de "N of 1 trial", c'est à dire que chaque patient est une étude à lui tout seul. Ainsi, des patients connus pour ne pas avoir toléré une statine ont reçu de façon randomisée et en aveugle des flacons: de placebo ou de statines ou vides. Les auteurs retrouvent que 90% symptômes survenant sous statines survenaient aussi sous placebo! Au final, 50% des patients ont recommencé une statine après l'étude.

On en avait déjà parlé ici et , mais la relation entre symptômes sous statines et statines est plus que douteuse. Une méta-analyse sur données individuelles incluant près de 100 000 patients. Les auteurs retrouvent que dans la 1ère année de traitement, la statine augmentait le risque de myalgies et faiblesse musculaire chez 11 patients pour 1000, soit 1 patient avec douleur liée aux statines pour 15 patient se plaignant de douleurs qui n'y sont en fait pas liées. Après cette première année, il n'y avait plus d'augmentation significative du risque de myalgies sous statines. Notons enfin que sur l'ensemble des années, les statines à fortes doses (atorva 40-80 et rosuva  10-20) étaient plus pourvoyeuses de myalgies que les statines à plus faible doses.

 

Le journal Circulation refait le point sur l'étude WOSCOPS après 20 ans de suivi des patients. C'est cette étude contrôlée randomisée en prévention primaire qui a montré les bénéfices de la pravastatine 40mg chez des hommes traités pendant 5 ans en moyenne. En effet, le traitement actif a montré une diminution de 13% (HR=0.87) de la mortalité totale, essentiellement liée à la mortalité cardiovasculaire, et une diminution des évènements cardiovasculaire. En chiffres absolus, on retrouve 34,7% de décès sous traitement et  37% sous placebo soit un NNT de 44 patients! C'est là qu'il faut se rappeler que les résultats sont donnés à 20 ans, donc, le NNT en 20 ans est de 44, mais si on veut un NNT annuel c'est 880 patients qu'il faut traiter. Je me demande ce que ça donne dans une patientèle d'un médecin généraliste. Disons qu'avec une patientèle de 800 patients, 200 patients sont à risque cardiovasculaire élevé, et en exerçant  40 ans, la pravastatine "sauvera" environ  10 patients, si mes calculs ne sont pas trop faux...

Un des moyen pour représenter l'effet d'un traitement est le NNT : nombre de patient à traiter pour éviter 1 évènement. Une autre façon de voir la chose, est le délai moyen gagné jusqu'à survenu de l'évènement. Cette vision permet éventuellement de donner un "chiffrage moyen" individuel, plutôt que de dire que traiter X patient permet d'éviter totalement 1 évènement, ce qui peut apparaitre flou pour le patient pour qui la vision est binaire: "je vais avoir l'évènement" ou "je ne vais pas l'avoir". Une étude reprend donc les effets des statines et retrouve qu'en prévention primaire, le délai moyen jusqu'au décès gagné par le traitement pour un patient variait entre  5 et 19 jours en prévention primaire et entre 10 et 27 jours en prévention secondaire. Tout de suite, ça n'a plus l'air si efficace...
 
A partir d'une revue systématique suivant des patients pendant 2 à 6 ans, des auteurs ont estimé le temps pour obtenir un bénéfice lié aux statines en prévention primaire. Ainsi, ils ont retrouvé qu'il fallait que 100 patients suivent leur traitement par statine pendant 2,5 ans pour éviter 1 évènement cardiovasculaire ou que 500 patients soient traités 0,8 ans, mais  sans bénéfice retrouvé sur la mortalité (ça c'est logique puisque seul la simvastatine et la pravastatine ont montré un bénéfice de mortalité et qu'elles se retrouvent noyées au milieu des autres statines).

Commençons avec l'étude WOSCOPS, une des plus ancienne sur les statines qui a maintenant un recul de 20 ans. Le groupe qui a été traité pendant 5 ans par pravastatine en prévention primaire a encore aujourd'hui une diminution de la mortalité totale et cardio-vasculaire avec une moyenne d'âge de 75 ans. On peut donc se dire qu'arrêter une statine en prévention primaire chez un patient de 80 ans (comme il n'y a pas d'études sur ces patients) permet quand même d'avoir un effet bénéfique persistant après l'arrêt du traitement!

Puisque je parlais juste avant du cholestérol, le JAMA vient rappeler l'absence d'essais controlés randomisés et de recommandations concernant les statines après l'âge de 80 ans, et que chez les sujets de 75 à 80 ans, les études de moindre niveau de preuve ne semblent en faveur d'un traitement qu'en prévention secondaire ou chez les patients diabétiques. Penser à réévaluer les traitements n'est pas une option en médecine! (voila que je me mets à parler comme Gaspard...)

Comme souvent, on va voir des articles disant une chose et son contraire, selon la revue. Commençons donc par l'article publié dans le journal de la société européenne cardiologie, effectuant une méta-analyse des essais Jupiter et Hope-3 concernant le traitement en prévention primaire par rosuvastatine chez les patients âgés. Les auteurs retrouvent alors une diminution significative des risques relatifs 25%, 49% et 26% du risque de survenue du critère composite cardiovasculaire chez les patients de moins de 65 ans, 65-70 ans et de plus de 70 ans, respectivement. (Les NNT sont respectivement de 386, 139 et 179 ). Mais comme cette "méta-analyse" n'inclue que 2 études choisies, je ne suis pas sur qu'on puisse vraiment appeler ça une méta analyse... c'est plutôt une sélection d'étude poolées pour aller dans un sens choisi. Le biais de publication n'est pas recherché, combien d'études négatives pour arriver à ces deux études?

Faut-il traiter toutes les dyslipidémies? Une étude a évalué le bénéfice de la pravastatine 40mg (qui a démontré un bénéfice en prévention primaire chez les patients à haut risque) chez des patients de plus de 65 ans hypertendus avec une dyslipidémie modérée. Après 6 ans, il n'y avait pas de bénéfice en terme de mortalité et même un sur-risque non significatif de mortalité chez les plus de 75 ans. 

Un article, publié dans le Jama internal medicine sur le même sujet. C'est une analyse secondaire d'un essai contrôlé randomisé traitant par pravastatine des patients de plus de 65 ans hypertendus et dyslipidémiques. Dans le tableau des caractéristiques des patients on trouve aussi que 50% étaient diabétiques et 25% fumeurs. Le bilan à 6 ans ne retrouve pas de bénéfice en terme d'évènement cardiovasculaire, de mortalité cardiovasculaire et de mortalité globale chez les patients traités et il y a même une augmentation non significative (manque de puissance?) de 34% de la mortalité globale chez les plus de 74 ans (mais ne concluons rien sur des résultats non significatifs d'une analyse de sous groupe). Certains diront que c'est parce que la pravastatine ne baisse pas assez le LDL... Alors que c'est pourtant une des seules statines ayant démontré un bénéfice sur la mortalité en prévention secondaire et primaire (mais pas chez le sujet trop âgé visiblement).
 
On parle régulièrement des statines chez le sujet âgé, et de leur efficacité contestée après 75 ans dans diverses études (ici et ). Cette étude du Lancet va à l'encontre des autres. En effet, cette revue systématique avec méta-analyse retrouve que baisser le LDL de 1mmol/L permet de réduire le risque relatif d'évènements cardiovasculaires (critère composite) de 26% chez les patients de plus de 75 ans, sans différence avec les moins de 75 ans ni entre ceux traités par statines ou traitement non-statine. Le principal problème c'est qu'ils ne séparent pas prévention primaire et secondaire: on savait déjà qu'en prévention secondaire, c'était plutôt utile de continuer quel que soit l'âge. J'apprends au passage l'existence d'une étude en cours randomisant l'atorvastatine versus placebo en prévention primaire chez des patients exclusivement de plus de 70 ans, à suivre!
 
On attendait une étude de la sorte depuis longtemps. Le BMJ publie une étude de cohorte rétrospective analysant les statines en prévention primaire après 75 ans chez les patients diabétiques et non diabétiques ayant ajusté les patients sur un score de propension (en niveau de preuve, on est juste en dessous de l'essai contrôlé randomisé de grande taille). Chez les non diabétiques, que ce soit entre 75 et 85 ou après 85 ans, les patients sous statine n'avaient pas moins d'évènements cardiovasculaire et une mortalité globale identique. Chez les patients diabétiques, il y avait un gain de mortalité globale (NNT= 306 patients par an) et d'évènements cardiovasculaire (NNT= 164 patients par an) entre 75 et 85 ans mais pas après. Ces traitements n'étaient pas associé a davantage d'hémorragies cérébrales, de cancer ou d"hépatites médicamenteuses. On savait déjà que les statines diminuaient la mortalité des diabétiques quelque soit leur taux de cholestérol, mais on a maintenant des arguments pour arrêter le traitement a 85 ans, alors qu'on peut arrêter plus tôt que ça chez les non diabétiques!

Une ré-analyse de l'étude SPRINT a comparé les patients sous statines et ceux sans statines en prévention primaire. Ainsi, les auteurs ont retrouvé qu'il n'y avait pas de différence en terme de survenue d'évènements cardiovasculaire chez les patients de plus de 65-70 ans sous statine en prévention primaire (p= 0,13) ce qui correspondait à un allongement non significatif de la durée moyenne sans évènements de 85 jours (669 jours sans statine vs 736 jours avec ). Encore une étude qui permet de douter du bénéfices des statines après 70 ans! (Mais pour mémoire, SPRINT ne randomisait pas de statine, seulement des objectifs d'antihypertenseurs). 

Voici un essai contrôlé randomisé d'une statine (pitavastatine, d'intensité similaire à la simvastatine) comparant la forte dose (4mg) à la faible dose (1mg) dans le traitement des coronaropathies stables. Après plus de 3 ans de suivi, le LDL des patientes traités par forte dose était à 0,76g/L versus 0,91g/L (p< 0,01) mais donc aucun des groupes n'était à l'objectif des recos qui est < 0,7g/L. Il y avait moins d'évènements cardiovasculaires dans le groupe traitement forte dose (NNT= 19), mais surtout une baisse de mortalité globale (NNT= 111) alors que la mortalité cardiovasculaire n'était pas diminuée significativement. Il y avait plus de myalgies dans le groupe 4mg avec un NNH de 83. Cet article va dans le sens du bénéfice des statines fortes doses en prévention secondaire, sans avoir de seuil d'objectif à atteindre (sauf que cette fois on a un bel essai contrôlé randomisé et pas une réanalyse d'étude de cohorte). La pitavastatine semble donc avoir, comme la simvastatine et la pravastatine un bénéfice en prévention secondaire.

Quel est l'observance des patients traités par statine forte dose dans les suites d'un infarctus? Une étude rétrospective a retrouvé qu'à 2 ans, moins de 42% des patients prenaient encore de façon régulière (>80% des prises) la statine forte dose qui leur avait été prescrite. Ils étaient ensuite 13% a avoir une statine faible ou moyenne dose à la place et à la prendre régulièrement, 19% à prendre leur traitement irrégulièrement et  19% à l'avoir totalement interrompu.  Les auteurs concluent qu'il faut des mesures pour augmenter l'observance des statines fortes doses au lieu de se demander pourquoi est-ce qu'elles étaient aussi mal prises... Bref, les études versus la vrai vie...

Une revue narrative présentée dans le Lancet a traité des association de médicaments à dose fixe dans le domaine cardiovasculaire. On en a plus beaucoup en France, et l'association amlodipine/atorvastatine et la seule que je connaisse. Dans l'article, l'utilisation des associations à dose fixe permettait d'améliorer significativement l'observance des patients mais les études n'avaient pas la puissance nécessaire pour mettre en évidence de différence sur des critères cliniques. C'est bien dommage.
Une étude de cohorte sponsorisée par BigPharma a comparé, après appariement sur un score de propension, la survenue d'évènements cardiovasculaire chez des patients coréens de plus de 40 ans avec un syndrome métabolique en fonction de leur traitement pour une dyslipidémie: statine versus statine + fénofibrate. Les auteurs retrouvent une réduction relative de 36% des évènements, notamment en cas d'hypertriglycéridémie. Or, l'appariement n'a pas été génial sur les triglycérides, sans qu'on ait les médianes dans chaque groupe. Il n'est donc pas facile d'arriver à la conclusion des auteurs prônant un bénéfice du fénofibrate, avec cette étude rétrospective avec appariement imparfait dans une population non-européenne.

Pour rester un peu dans le domaine cardiologique, le fenofibrate qui avait démontré une efficacité en terme de progression de rétinopathie diébétique (ICI) pourrait rejoindre le gemfibrozil au palmarès des fibrates en prouvant une diminution des évènements cardio-vasculaires chez les diabétiques dans cet article . L'effet reste cependant bien inférieur à celui des statines qu'il faut privilégier autant que possible.

Diverses études sur les statines sont sorties. La première est une étude cout-efficacité des statines en prévention primaire selon le seuil de risque cardiovasculaire. Les recommandations américaines recommandent leur utilisation pour un risque d'évènement supérieur à 7,5% ce qui donne un cout par QALY de 37 000$, ce qui est relativement acceptable. Alors qu'un seuil de 3% préviendrait 162 000 évènements supplémentaires pour un cout de 140 000$/QALY, les auteurs concluent qu'un seuil intermédiaire 4% serait optimal avec un cout de 100 000$/QALY. Des considérations économiques à prendre en compte dans les politiques de santé publiques. En France, bien que les autorités commencent à utiliser ces analyses, c'est pas encore très répandu... 

Et comme toute médaille a son revers, une dernière analyse du risque diabétogène des statines a retrouvé que ces traitements augmentaient le risque relatif de diabète à 10 ans de près de 36% sans différences significative entre les statines fortes et les statines faibles (mais ces dernières étaient beaucoup moins nombreuses).

Statines,  toujours: cette fois ci, dans le JAMA neurology. Les auteurs retrouvent dans une étude de cohorte que la prescription de statine est associée à un moindre risque de maladie d'Alzheimer. Le problème de ces grosses études sur registre, c'est qu'il est très facile de savoir si un patient est sous statine ou pas, mais beaucoup plus dur d'établir si un patient a une maladie d'Alzheimer... Les patients sous statine se voient peut être plus poser le diagnostic de démence "vasculaire" que Alzheimer... De plus, il s'agit d'une association et non d'une causalité, on préfère aussi conserver la qualité de vie des patients Alzheimer âgés en arrêtant des statines en prévention primaire, alors qu'on les poursuite chez les patients "en meilleure forme". Question c'est donc: prend-on moins bien en charge nos patients déments? 

Je le mets ici, mais en fait, cet article devrait être partout ailleurs, car c'est une méta-analyse sur les statines et leur efficacité sur tous les critères autres que cardiovasculaires. Pour faire simple: ça ne marche pas! Il y a peut être néanmoins une efficacité sur la mortalité des patients avec insuffisance rénale chronique (mais, là, c'est quand même de la prise en charge cardiovasculaire, l'insuffisance rénale étant un facteur de risque cardiovasculaire majeur) et moins d'exacerbation chez les patients BPCO (là encore, il y a confusion car la BPCO est associée au tabac et le contrôle des maladies cardiovasculaire est probablement associé à un meilleur contrôle des comorbidités pulmonaires). Sinon, pas d'effet clair sur les pancréatites, le moral, les démences, la densité osseuse, les troubles de l'érection, les cancers...

5/ Anti-PCSK-9

Un nouvel anti-PCSK-9, l'alirocumab, a été testé chez des patients en prévention secondaire, dans un essai contrôlé randomisé publié dans le NEJM. Comme pour les autres anti-PCSK-9, le critère composite cardiovasculaire (infarctus mortels/non mortels, AVC mortels/non mortels, hospitalisation pour coronaropathie) est rempli, avec une réduction de 15% des évènements (NNT= 63 patients pour 2,8 ans de suivi en moyenne). Par contre pas de bénéfice de mortalité cardiovasculaire ou globale. Autre point étrange, il y avait plus d'effets indésirable sous placebo (non significativement mais c'est quand même étrange...)

un nouvel essai concerne les anti-PCSK9: Evolocumab versus placebo pendant 76 semaines. Les critères de jugements dans les essais évaluant les anti-PCSK9 évoluent: on est passé de "baisse du LDL" à "régression de l'athérome coronaire". On est pas encore à un critère cliniquement pertinent, mais l'evolocumab a démontré une régression significative de l'athérome coronaire de.... (suspens...) 0,95% versus une augmentation 0,05% par le placebo! Bref, attendons les critères d'évènements cardiovasculaires, car dans cette étude, il n'y a pas eu de test bien que ces évènements aient été recueillis. 
 
Nous avions parlé de l'étude Fourier qui avait démontré une réduction du critère composite cardiovasculaire dans le groupe evolocumab, versus placebo. Une réanalyse de l'étude a été effectuée compte tenu de discordance entre le rapport d'étude et l'article. Ainsi, il y aurait une surmortalité avec l'evolocumab, mais cette différence n'est pas significative. Donc en dehors d'un signal éventuel, restons juste vigilants sur les anti-PCKS9.
 
Les articles cardio de la semaine concernent les anti PCSK-9 dans le traitement des dyslipidémies, ou plutôt, prévention cardiovasculaire. Tout d'abord, l'Evolocumab, étudié dans un essai contrôlé randomisé versus placebo (étude FOURIER). Notons que le sponsor pharmaceutique de l'étude était responsable du recueil des données. Les patients étaient en prévention secondaire (ATCD d'infarctus du myocarde, d'AVC ou d'AOMI sévère). Ils avaient 62 ans en moyenne, 36% étaient diabétiques, 80% hypertendus. Leur LDL moyen était de 0,9g/L donc "parfaitement contrôlé", pour ceux qui parlent de contrôle du LDL, et 70% avaient une statine de forte intensité.
Bref, dans ces conditions et avec en moyenne 2 ans et 2 mois de suvi, les auteurs retrouvent une diminution significative du risque cardiovasculaire sur leur critère composite principal (OR=0,85), essentiellement portée par la diminution des AVC et infarctus non mortels (respectivement OR=0,79 , NNT=250 et  OR=0,72  , NNT=84). La mortalité globale et cardio-vasculaire n'était pas modifiée.

Pour ceux qui aiment le LDL, le taux a été baissé aux alentours de 0,30 avec le traitement.



Le deuxième traitement, le Bococizumab, un autre anti-PCSK9 a été étudié dans deux essais contrôlé randomisés: SPIRE-1 et SPIRE-2, avec une place non négligeable du sponsor également. Les auteurs sont choisi de publier les 2 études en 1 article, malheureusement pour eux, si SPIRE-2 (et ses 10 000 patients) retrouve une amélioration du critère composite cardiovasculaire (OR=0,79), ce n'est pas le cas de SPIRE-1, et encore moins lors de l'analyse des deux études ensemble. Même SPIRE-2 ne montrait pas d'amélioration sur les critères pris indépendamment (IDM, mortalité globale ou cardiovasculaire), sauf pour les AVC non fatals qui étaient diminués (OR=0,60 , NNT=370!).
Pour atteindre le point où je raconte ma vie, il se trouve que j'exposais les bénéfices des traitements cardiovasculaire à un patient qui m'a répondu "Si c'est pour vivre à moitié paralysé, ça m'intéresse pas votre traitement". Du coup, je ne suis pas convaincu que baisser les AVC non fatals soit un super critère si on étudie pas la durée de vie sans incapacité ou la qualité de vie des patients.

Enfin, baisser le cholestérol est toujours à la mode. Les études OSLER étudiaient l'effet d'un anti-corps monoclonal (PCSK9)  en plus du traitement standard. Le critère primaire d'efficacité était les effets secondaires, bien que la conclusions que les auteurs mettent en avant soit le critère secondaire de baisse du cholestérol! Les effets secondaires étaient similaires dans les deux groupes de traitement, sauf pour ce qui était des troubles cognitifs. En tant que critères exploratoires, l'étude retrouve néanmoins une diminution des évènements cardiovasculaire avec PCSK9 d'environ 50%, qui permet de donner un peu d'intérêt à ce traitement, mais l'essai n'était pas fait en aveugle (probablement à cause de l'administration parentéral de l'anticorps.)

L'EMA vient d'autoriser un premier anti-PCSK9 dans le traitement de l'hyperlipidémie, seul ou en association dans l'hypercholestérolémie familiale ou l'hypercholestérolémie de type 2. Notons que la phrase résumant ce que je peux penser de cette molécule est présente dans le communiqué de l'EMA: "The effect of Repatha on cardiovascular morbidity and mortality has not yet been determined."
L'autre article parle du PCSK9 circulant, qui serait un marqueur de risque cardiovasculaire. Dans une étude de cohorte de  491 patients suivis pendant 15 ans, les patients avec un PCSK9 élevé (4ème quartile) avaient un risque cardiaque augmenté de  48% par rapport à ceux avec un dosage faible (1er quartile). Pour mémoire, des médicaments anti PCSK9, dont j'avais parlé ici, sont en court d'évaluation et sont prometteur (même si leur mode d'administration est par injection)

6/ Autres traitements

Dans les autres "réducteur de cholestérol", on trouve l'ezetimibe et les anti-pcsk-9. Le BMJ a publié une synthèse dans laquelle les auteurs proposent des recommandations concernant leur utilisation. Les recommandations des sociétés savantes placent généralement l'ezetimibe voire un anti-pcsk9 dans les cas où la cible n'est pas atteinte. Il est intéressant de voir que les sociétés de cardiologie cotent ces recos comme "fortes" avec un "grade A" alors que les sociétés de recommandations nationales (NICE, SIGN, NHS...) disent que c'est une reco de force "unclear" avec un niveau de preuve "unclear". Ainsi, cet article s'adresse aux patients avec un LDLc > 0,7g/L sous statine ou intolérants aux statines et qui souhaitent réduire davantage leur risque cardiovasculaire. Dans le tableau ci dessous inspiré de l'article, on voit aussi que le risque anglais est calculé selon le risque cardiovasculaire à 5 ans, le haut risque étant à 15%  (donc ce sont des seuils beaucoup plus hauts que le SCORE 2 où le haut risque est 10% à 10 ans)



La Cochrane a publié une méta-analyse concernant la place de l'ezetimibe en prévention secondaire. Ainsi, 26 essais contrôlés randomisés correspondant à 23500 patients ont retrouvé un bénéfice à l'ezetimibe en plus d'un traitement par statine, notamment sur les infarctus et AVC non fatals, sans bénéfice sur la mortalité globale. Donc, pourquoi pas, mais rien de miraculeux.

Le NEJM publie les données issues de l'étude IMPROVE-IT (dont j'avais parlé ici). L'étude est bien faite: essai contrôlé randomisé, avec analyses intermédiaires prises en comptes dans les résultat, et portant sur des critères cliniques (un critère composite cardio vasculaire en critère primaire, et les critères secondaires portant sur la mortalité). Bref, l'étude retrouve une diminution de  2% (risque absolu), 6,4% (risque relatif) de survenue d’événement cardio-vasculaire (critère primaire) chez les patients traités par simvastatine-ezetimibe versus simvastatine seule. Les effets secondaires n'était pas différent dans le groupe avec la bithérapie. En regardant les autres critères: la mortalité totale associée aux infarctus et aux AVC non fatals baisse significativement la mortalité de  5% (RR), mais la mortalité totale, la mortalité par évènement cardio-vasculaire et la mortalité par infarctus ne sont absolument pas diminué. Ce traitement diminue donc probablement la survenue d'infarctus essentiellement, mais sans incidence sur la mortalité, de quoi tempérer grandement l'intérêt d'un comprimé supplémentaire chez des patients avec une ordonnance déjà suffisamment longue en prévention secondaire d'infarctus. L'association permettant de baisser le LDL cholestérol à 0,5g/L versus 0,7g/L avec la monothérapie, va-t-il falloir réévaluer les objectif contre toute attente?
 
Un essai contrôlé randomisé du JAMA a étudié l'effet des omega-3 versus l'huile de maïs, utilisé comme comparateur inerte, sur la survenue d'évènements cardiovasculaire chez des 13000 patients à haut risque. Les auteurs ne retrouvent pas d'efficacité chez ces patients dont la moitié était en prévention secondaire. En fait, l'étude a même été arrêtée prématurément car les analyses intermédiaires montraient qu'il y avait peu de chance qu'un bénéfice soit retrouvé. 

Reparlons des oméga-3 et notamment de l'acide eicosapentaénoïque (EPA) qui avait montré une réduction de mortalité en prévention secondaire dans REDUCE-IT chez les patients avec hypertriglycéridémie. Nous avions dit que d'autres études arrivaient et RESPECT-EPA a été présentée en congrès. L'EPA était comparée au placebo chez des patients japonais en prévention secondaire sous statine et à 45% diabétiques. Le critère de jugement principal (décès cardiovasculaire, infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral, angine instable nécessitant une hospitalisation et revascularisation) est survenu chez  10.9% des patients sous EPA et chez 14.9% des patients sous placebo, mais cette différence n'était pas significative (p=0.055). Ainsi, selon l'analyse stricte, on n'est pas proche de la significativité, l'analyse est binaire dans les essais randomisés (au contraire des études exploratoires): il n'y a pas de différence, et comme on est pas significatif, on ne conclura rien sur les critères secondaires qui devient de fait simplement exploratoires. Donc même s'il y avait un peu moins d'évènements ischémiques coronarien, il faudrait une nouvelle étude pour confirmer ou infirmer si l'EPA a un intérêt. 
 
L'étude REDUCE-IT qui testait de acide eicosapentaénoïque (EPA) c'est à dire des oméga-3 à très forte dose chez des patients avec hypertriglycéridémie entre 2,0g/L et 5,0g/L sous statine, en prévention secondaire (70% des inclus) ou primaire à très haut risque (diabète + autre facteurs de risque). 8000 patients ont été inclus. Il y avait une baisse d'évènements cardiovasculaires de 25%, (NNT= 20) mais aussi de la mortalité cardiovasculaire de 20%, soit un NNT de 112 patients traités pendant 5 ans (pas de baisse de mortalité globale cependant). Il y avait plus de passage en fibrillation auriculaire sous EPA (NNH= 71) . Bref, après avoir été "mis" puis "retirés" des recos post-infarctus, les oméga-3 vont ils faire leur retour? Dans les limites de cette étude, certains déplorent le placebo utilisé: une huile qui aurait pu réduire l'absorption des statines dans le bras "placebo"... c'est trop problématique pour être négligé... Heureusement d'autres études sur le même principe sont en cours.

Annals of internal medicine revient sur l'efficacité des oméga-3 dans une méta-analyse, ce qui tombe bien suite aux résultats contradictoires vus dans les semaines précédentes. En image, on voit que ça ne marche pas! Petit bémol à apporter quand même l'étude REDUCE-IT n'a pas été incluse car trop récente par rapport aux date de la méta-analyse.




L'ESC recommandait de doser 1 fois chez tout le monde la lipoprotéine(A) pour rechercher un haut risque cardiovasculaire. De nouvelles molécules, les anti-Lp(A) sont donc en cours de développement et baissent bien le taux de Lp(A) dans cet article du NEJM. Pas de résultats sur la morbi-mortalité pour le moment.
 
Nous avions parlé de l'acide bempédoïque (AB) il y a quelque temps, qui en plus d'une statine ne réduisait pas les évènements cardiovasculaires.  Voici une nouvelle étude randomisée comparant l'AB au placebo chez des patients intolérants aux statines. Cette fois ci, chez des patients sans statines, l'AB réduisait le critère composite cardiovasculaire principal (NNT=212 patients par an) et les infarctus fatals et non fatals (NNT= 308 patients par an), sans effet sur les AVC ou la mortalité. Il y avait davantage d'anomalie du bilan hépatique (NNH=225/an), d'insuffisances rénales avec l'AB (NNH=117/an), de goutte (NNH=340/an) et de lithiases hépatiques  (NNH=340/an). Bref, ok, ça semble réduire les évènements cardiovasculaires, mais il y a quand même pas mal d'effets indésirables potentiels.

L'étude CLEAR Wisdom a étudié un nouveau traitement "non-statine" dans la prise en charge des dyslipidémies: l'acide bempédoïque en supplément d'une statine. Il baisse bien le cholestérol, mais, une fois de plus, le critère de jugement n'était pas un critère clinique alors que l'étude a duré 1 an.

Commençons avec l'acide bempédoïque qui permet de baisser le cholestérol en étant un inhibiteur de l'ATP citrate lyase impliquée dans la synthèse du cholestérol. Cette essai contrôlé randomisé du NEJM évaluait la sécurité de ce traitement chez des patients en prévention secondaire ou avec dyslipidémie familiale. Mis a part le fait qu'il baisse effectivement le LDL, il n'avait pas d'influence sur la mortalité de patients, ni globale, ni cardiovasculaire. Il baissait un peu le risque de diabète ou d'aggravation de diabète (NNT= 48) au prix de plus de troubles musculaires (NNH= 34), plus de goutte (NNH= 112) et peut être plus de dégradation du DFG. On voit quand même 3 fois plus de décès avec le traitement par rapport au placebo mais c'est non significatif (car peu de patients), et chose étrange, la somme de patients morts de cause cardiovasculaire (6) et de ceux morts de cause non cardiovasculaire (2) n'est pas égale aux décès totaux (13) dans le groupe acide bempédoïque, donc, il y a un truc bizarre. Bref, les auteurs disent que le traitement est sûr, devant l'absence de différence sur les effets indésirable "globaux", mais c'est plutôt mitigé.

Une des nouvelle voie d'action sur les dyslipidémies est les inhibiteurs de CEPT. Le NEJM a publié un essai contrôlé randomisé étudiant un de ces inhibiteurs, l'Anacetrapib versus placebo, chez 30 000 patients en prévention secondaire traités par Atorvastatine forte dose avec un LDL moyen de 0,60g/L (écart type: 0,15; ce qui signifie que 95% des patients avaient un LDL entre 0,30g/L et 0,90g/L). Après 4 ans de traitement, bien que la mortalité globale ou cardiovasculaire ne soit pas diminuée significativement, le critère de jugement composite d'évènements cardiovasculaire était positif avec une réduction de 9% du risque relatif (NNT=100), notamment grâce aux infarctus du myocarde. Il n'y  avait pas d'avantage de diabète , mais plus d'augmentation des enzymes musculaires. Les effets indésirables n'ont pas été plus étudiés que cela dans cette étude et c'est bien dommage.

Le cholestérol étant encore au centre de discussions, j'aimerai parler d'un article sur la Niacine vitamine B3) et le cholestérol. Cet article montre que la vitamine B3 ne réduit pas la survenue d'évènements cardiovasculaire, et ce malgré une augmentation du HDL et une diminution du LDL par rapport au groupe témoin. Encore quelque chose qui va dans le sens selon lequel baisser le LDL n'est pas pas suffisant pour diminuer le risque cardio-vaculaire. 
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Prévention primaire et risque cardiovasculaire



1/ Recommandations

2023:

Alors qu'on attend très prochainement les recos françaises et que les recos canadiennes ont été publiées il y a peu, c'est au tour du NICE britannique de publier ses nouvelles recommandations sur la prévention du risque cardiovasculaire, chez des patients en prévention primaire et secondaire. 

Tout d'abord, l'aspirine n'est pas recommandée en prévention primaire. Ensuite, les principales mesures sont les règles hygiéno-diététiques "classiques". Le NICE recommande : 

  • une évaluation du risque cardiovasculaire de 25 à 85 ans avec le QRISK-3 
    • sauf chez des patients à risque élevé d'emblée : 
      • diabète de type 1 (si: > 40ans ou diabète > 10 ans, ou complications)
      • DFG < 60
      • suspicion d'hypercholestérolémie familiale (chol total > 2.9g/L avant 30 ans ou > 3.5g/L après 30 ans
  • Le seuil de risque utilisé avec le QRISK-3 est placé à 10% pour décider de l'introduction d'un traitement dans le cadre d'une décision partagée, 
  • On peut aussi discuter de traiter avant 10% en fonction de facteurs de risques non présents dans le QRISK-3. 
Ils recommandent d'utiliser une statine avec un bénéfice de morbimortalité démontré.
  • Le bilan pré-thérapeutique comprend une glycémie, une TSH, ASAT, ALAT et créatinine. 
  • Les contre indications aux statines sont une cytolyse > 3N ou des CPK > 5N (seulement si symptômes). 
  • En prévention primaire, ils recommandent de traiter par atorvastatine 20 les patients diabétiques et non diabétiques dont le QRISK-3 est >10% (étrange vu que l'atorva 20 n'a pas montré de bénéfice chez le non diabétique), avec une cible de réduction de non-HDL cholestérol de  40% (ne reposant sur pas grand chose encore une fois). 
  • En prévention secondaire, ils recommandent atorvastatine 80 (ça c'est prouvé, cf ici) avec une cible à  0.77g/L de LDL (ce qui est relativement "cool" et devrait être atteint avec l'atorva 80. En cas de cible non atteinte en prévention secondaire, l'ajout de l'ézétimibe est recommandé. En cas de non tolérance, on peut réduire les doses ou changer d'intensité de statine. 
  • La surveillance repose sur un bilan hépatique annuel et EAL. 
Les fibrates ou omega-3 ne sont actuellement pas recommandés. Enfin, concernant l'hypertriglycéridémie, ils recommandent un avis spécialisé au delà de 8g/L malgré des règles diététiques, pour rechercher des causes secondaires, mais ne recommandent que d'optimiser les RHD et facteurs de risque CV en dessous.
 
 
2022:  L'ESC confirme dans un nouvelle publication sa recommandation de doser 1 fois dans la vie de tout le monde la lipoprotéine A (Lp(a)), on en avait parlé ici. En effet son taux élevé est associé à une augmentation du risque cardiovasculaire (considérer comme hypercholestérolémie familiale si > 1,8g/L), mais, si elle est faible, ce serait un facteur de risque de diabète (quand inférieur à 0,05g/L). Elle est considérée comme normales si inférieure à 0,30g/L. A ce jour, aucune étude n'a démontré d'impact thérapeutique suite à ce dosage, les auteurs recommandent d'intégrer ce facteur de risque dans l'évaluation de la prise en charge globale.
 
2022: Les recommandations de l'USPSTF américaine concernant l'aspirine en prévention primaire ont enfin été publiées. Les auteurs recommandent que l'instauration d'aspirine soit faite de façon individualisée, chez les patients de  40 à  59 ans dont le score ASCVD à 10 ans est supérieur à 10% (haut risque cardiovasculaire) et à faible risque hémorragique. De plus, ils recommandent de ne pas instaurer d’aspirine en prévention primaire après  60 ans. C'est un peu moins strict que l'avis du CNGE, mais on progresse doucement !
 
2021: Le conseil scientifique du CNGE a publié un avis concernant la balance bénéfice-risque défavorable du traitement par aspirine en prévention primaire chez les patients, quelque soit leur âge ou leur statut diabétique. En effet, le bénéfice sur les évènements cardiovasculaire n'est pas retrouvé dans toutes les études et ne serait que limité (NNT= 500 patients), alors que le risque hémorragique est supérieur (NNH= 200). Cet avis arrive quelques jours après la soumission au public de celui de l'USPSTF américaine qui va dans le même sens, mais nous en reparlerons quand sa publication sera définitive.

2021: Dans la suite du congrès de la société européenne de cardiologie, voici les recommandations de prévention cardiovasculaire. 

Généralités

  • Il y a des recommandations générales: adopter un régime méditerranéen, consommer moins de 100g d'alcool par semaine, avoir une activité physique et réduire la sédentarité et le sevrage tabagique (ici on peut voir le nombre d'années de vie gagnées quand on arrête le tabac selon l'âge, le sexe, la PA)

Risque cardiovasculaire

  • Les auteurs commencent par confirmer l'utilisation du SCORE2 et du SCORE 2-OP pour évaluer le risque cardiovasculaire chez les patients de 40-69 ans et de plus de 70 ans (on l'avait anticipé ici), avec une réévaluation tous les 5 ans (début: 40 ans chez les hommes et 50 ans chez les femmes). 
  • Notons que ces valeurs qui correspondraient à du risque "intermédiaire" ont été renommées risque "élevé" et le risque "élevé" et devenu "risque très élevé". Notons également que les scores peuvent être ajustés à l'ethnie: x0.85 pour les caribéens, x0.7 pour les patients d'origine chinoise ou africaine. (le tableau pour la France est ici)
  • Les patients avec un diabète de type 2 de moins de 10 ans sans complications sont à risque modéré; ceux avec 1 ou 2 complication microvasculaire à risque élevé et les autres à très haut risque.  
  • La recommandation d'introduire un traitement est posée en cas de très haut risque cardiovasculaire (7,5% avant 50 ans, 10% jusqu'à 69 ans et 15% à partir de 70 ans). Il est recommandé de considérer un traitement chez les patients à haut risque (2.5-7.5% avant 50 ans, 5-10% jusqu'à 69 ans et 7.5-15% après 70 ans) en fonction des autres facteurs de risque, incluant maintenant les migraines avec aura. 
  • NB: Le score calcique pourrait être considéré (même si le BMJ a bien dit que ce n'était pas scientifiquement justifié) et une alternative peut être l'évaluation du haut risque par la présence d'une plaque carotidienne définie comme sténose 50% NASCET ou épaisseur média-intima >_1.5 mm. 

Cibles de LDL

  • Concernant les patients avec LDL > 1.9g/L, il faut suspecter une dyslipidémie familiale et l'évaluation se fait à l'aide du score de Dutch. En cas de dyslipidémie familiale "possible", il faut considérer les cibles de LDL les plus basses. 
  • Concernant les cibles de LDL (dont certains raffolent et qui ne reposent sur aucune étude), en prévention primaire, il est recommandé de cibler 1.0g/L de LDL (si risque élevé ou très élevé) mais il est suggéré de viser 0.7g/L si haut risque et  0.55 si très haut risque (grade IIa/C) (donc là on est à presque tout patient doit être à 0.7g/L hein!!!). En prévention secondaire, la cible de LDL est de 0.7g/L mais il est suggéré d'intensifier à 0.55g/L pour tous les patients. Si l'objectif n'est pas atteint (ce qui sera souvent le cas) malgré statine +/- ezetimibe, il est recommandé d'introduire un anti-PCSK9. Les recommandations demandent de personnaliser le traitement selon les bénéfices adaptés aux besoins du patient. 

Hypertriglycéridémie

  • Les auteurs précisent qu'il n'y a pas d'objectifs thérapeutiques pour les hypertriglycéridémies, mais indiquent un traitement par statine à partir de 2,0g/L de triglycéridémie, avec ajout de fénofibrate si >2g/L malgré cela ou icosapent ethyl si haut risque cardiovasculaire (effectivement il y a 1 étude en faveur de ça).

Cibles tensionnelles

  • Concernant les cibles tensionnelles, les auteurs recommandent d'obtenir une PA < 140/80 chez l'ensemble des patients mais viser 120-130 de PAS avant 69 ans et 130-140 après 70 ans (je n'ai pas vu beaucoup d'études justifiant une diastolique inférieure à 80mmHg...). Le traitement de 1ère intention recommandé comporte un IEC ou ARAII + un inhibiteur calcique ou un diurétique, puis une trithérapie avec IEC/ARAII + calcique + diurétique, puis ajout de spironolactone après bilan d'HTA secondaire (car HTA résistante, mais aussi si HTA grade 2 avant 40 ans, ou atteinte d'organe cible ou HTA grade 3 ou argument clinico/bio pour une HTA secondaire)
Aspirine
  • L'aspirine en prévention primaire peut être proposée chez les patients diabétiques à haut ou très haut risque (pourtant les études ne sont pas vraiment en faveur de ce choix thérapeutique ! cf ici ou encore , et la source de la reco retrouve un NNT à 95 patients sur 5 ans sur les évènements CV mais "Aspirin use had no effect on other endpoints including all-cause mortality") 
  • Les IPP sont recommandés en cas de prescription d'aspirine seulement si risque hémorragique élevé (ils ne disent pas sur quoi se baser pour évaluer le risque hémorragique)

AOMI

  • Une antiaggrégation plaquettaire est recommandée chez les patients avec AOMI symptomatique (pas asymptomatique)
  • Chez les patients avec AOMI et diabète, ou en prévention secondaire, ils proposent d'ajouter du rivaroxaban faible dose à l'aspirine si le risque hémorragique est faible (pour mémoire induit autant d'hémorragies sévères et cela ne prévient d'évènements ischémiques... étude compas ici et ici

 


Continuons plus rapidement avec d'autres articles présentés au congrès de cardio. Cet article  retrouve un meilleur contrôle tensionnel lorsqu'on introduit une quadrithérapie très faible dose plutôt qu'une monothérapie... Ça enfonce un peu des portes ouvertes, il n'y a pas de suivi suffisant pour voir si cela a des conséquences sur les évènements cardiovasculaires (et les investigateurs ont probablement oublié que la une bithérapie d'emblée est recommandée actuellement, il aurait donc fallu l'utiliser en comparateur plutôt qu'une monothérapie)
 
2021: Deux articles viennent de paraitre sous l'impulsion de la société européenne de cardiologie. L'ancien HeartScore datant de 2003, validé chez les 45-65 ans et donnant le risque de décès cardiovasculaire à 10 ans vient d'être mis à jour. Le Score2 et le Score2-OP (old people), ont été publiés cette semaine et donnent le risque d'évènements cardiovasculaire fatals et non fatals à 10 ans. Le Score 2 est pour les 40-69 ans, et le score 2 OP pour les plus de 70 ans. On voit aussi que les seuils des risques faible, modéré et élevé est différent selon les âges: le haut risque est de 7,5% avant 50 ans, 10% jusqu'à 69 ans et 15% à partir de 70 ans. Malgré ce progrès, il est probable que ce nouvel outil conduise à une augmentation des personnes traitées en augmentant le nombre de patients à risque élevé. En effet, l'ancien score considérait qu'un patient était à haut risque à partir de 5%. Or il faut à peu près multiplier par 4 pour obtenir le risque de morbi-mortalité. Ainsi, dans le Score 2, le seuil du risque élevé aurait dû être situé à 20%, comme pour les calculateurs de risques américain (ASCVD) et britannique (Qrisk3). Un seuil 2 fois plus bas risque donc d'entrainer un surtraitement si les seuils ne sont pas réévalués dans les recommandations de l'ESC qui intègreront ces calculateurs. De plus, les modificateurs qui s'appliquaient à l'ancien score (par exemple x2 en cas d'antécédent familial cardiovasculaire précoce) ne s'appliquent peut être pas à l'identique dans le score 2.
2019 : La société de cardiologie américaine a publié des recommandations sur la prévention primaire cardiovasculaire. Pas grand chose de neuf par rapport aux recos sur les dyslipidémies. Le principal intérêt de cet article, c'est la publication du score ASCVD qui permet de déterminer le risque cardiovasculaire à 10 ans entre 40 et 75 ans, mais, il y a aussi une version "life time" c'est à dire que l'algorithme donne également le risque sur la "vie entière estimée" applicable dès l'âge de 20 ans:
Chez les patients diabétiques, une recommandation de grade IIb propose l'instauration au moment du diagnostic de metformine ( si l'HbA1C < 6,5%, ce n'est pas nécessaire).
Concernant l'aspirine en prévention primaire, ils la recommandent toujours malgré le très faible niveau de preuve, chez les patient à très haut risque cardiovasculaire ET faible risque de saignement ET âgés entre 40 et 70 ans, surtout pas après.
Enfin, ils proposent ces doses initiales de traitements substitutifs de nicotine:




2018 : Concernant l'évaluation du risque cardiovasculaire, l'USPSTF (HAS américaine) a retrouvé qu'il n'y avait pas suffisamment d'arguments pour justifier une évaluation via les mesures non conventionnelles telles que l'indice de pression systolique, le score calcique ou la CRP ultrasensible chez les patients asymptomatiques.

2017: En prévention cardiovasculaire et du cancer colorectal, l'USPSTF recommande l'aspirine faible dose pour une durée de 10 ans aux patients de 50 à 59 ans dont le risque AHA/ACC est supérieur à 10% selon le calculateur de risque (celui-ci). Entre 60 et 69 ans, la balance bénéfice risque doit être évaluée individuellement, notamment en fonction du risque de saignement. Avant 50 ans et après 70 ans, l'aspirine en prévention cardiovasculaire primaire n'a pas prouvé d'efficacité.

2014a Food and Drugs Administration ( l'ANSM américaine) publie un article dans lequel elle affirme qu'il n'y a actuellement pas de justification à la prescription d'aspirine en prévention primaire des infarctus et AVC. Au moins c'est clair, mais elle ne nie pas que cela peut néanmoins se décider au cas par cas. 

2/ Risque cardio-vasculaire

On avait parlé de l'absence du bénéfice du calcul du score calcique par rapport aux équations de risque cardiovasculaire ici. Une nouvelle étude compare le risque évalué par le score américain ASCVD et le score calcique dans 2 cohortes de patients suivie pour obtenir l'incidence "réelle" de survenue des évènements cardiovasculaires. On voit déjà que les scores sont assez fiables, ceux avec un risque évalué à moins de 5% ou moins de 7,5% ont, en effet, en grande majorité une incidence de coronaropathie inférieur à ces seuils, et ceux ayant un risque calculé supérieur à 7,5 ont également une incidence d'évènement concordante. Quand on regarde les figures, on voit que les patients avec un score calcique à 0, ont une incidence d'infarctus extrêmement faible, ce qui justifie la conduite proposé dans certains articles d'arrêter les traitements préventif (type statine). De plus, on peut en effet voir qu'il existe des patients avec un score calcique supérieur à 300 qui ont un risque d'évènement cardiovasculaire supérieur à15-20% malgré des risques calculés inférieurs à 7.5%. Les auteurs concluent que le score calcique est donc utile pour reclasser ces patients à haut risque et les traiter. Cependant, d'après les caractéristiques des patients,  75% des patients des études avaient un score calcique inférieur à 200. En effet, quand on va lire les annexes, les patients avec un risque effectif supérieur au score calculé parmi ceux à risque faible ou modérés représentaient 1% des patients. Ainsi, il faudrait faire un score calcique à 5000 patients à risque modérés pour trouver 50 patients à risque élevés dont 10 feraient un infarctus  dans les 10 ans si on n'agit pas (car survenue chez 20% des patients environ d'après l'article). La statine réduisant le risque relatif de 20%, un évènement serait évité chez 2 patients traités, soit un nombre de patient à dépisté de 2500 pendant 10 ans (soit 25 000 pour un NNT par an). Bref, les scores calculés sont probablement pas si mauvais compte tenu du faible nombre de patient "rattrapés par le score calcique".



On avait parlé du score calcique ici, en disant qu'il permettait de déprescrire si égal à 0 mais que le niveau de preuve était faible pour "instaurer" des traitements notamment une statine s'il est supérieur à 100. Cette revue systématique du Jama Internal Medicine revient sur l'apport du score calcique par rapport aux calculateurs cliniques de risque cardiovasculaire. Parmi les patients ayant un score clinique à faible risque qui sont reclassés en risque intermédiaire ou élevé par le score calcique (soit 10% des patients environ), 86% à 96% (selon les études) n'ont pas eu d'évènements cardiovasculaires durant le suivi de 5 à 10 ans. Inversement, les patients à haut risque selon un score clinique mais à faible risque selon le score calcique (soit moins de 1% environ),  91% à 99% n'ont pas eu d'évènements cardiovasculaires. Ainsi, les auteurs concluent, logiquement, que le bénéfice que le score calcique pourrait apporter chez un petit nombre de patients est contrebalancé par les coûts, les incidentalomes et le risque de radiations ionisantes et qu'il n'y a donc pas de preuves suffisantes pour intégrer le score calcique dans la pratique courante. 
 
Après la petite synthèse que nous avions faite sur le score calcique (CAC) ici, le BMJ publie un état de l'art sur la ce score. Il est démontré que le score est associé à la survenue d'évènements cardiovasculaires et à la mortalité globale. Il permettrait de mieux reclasser des patients à risque intermédiaire que l'utilisation de l'échographie des troncs supra-aortiques, que la mesure des index de pression systoliques, la CRPus, le nt-proBNP ou l'homocysteine. L'étude MESA a retrouvé que la moitié des patients avec une indication à une statine (risque ASCVD intermédiaire, entre 5% et 20%) avaient un CAC=0 et ne nécessitaient donc pas de statine. C'est une utilisation qui permet donc uniquement de ne PAS prescrire de statine qui est ainsi validée. De cette façon, l'utilisation du CAC chez les patients à risque intermédiaire est aussi coût efficace que la stratégie uniquement basée sur le risque calculé par les scores et plus efficace si le score calcique coute moins de 100$. Si l'on utilise le score calcique pour introduire des traitements supplémentaires, il semble raisonnable d'introduire la statine si le CA est > 100 chez les patients à risque intermédiaires testés (entre 0 et 100, c'est à voir). Concernant l'aspirine, le NNT est inférieur au NNH pour un CAC > 100, mais il n'y a pas de recommandation disant clairement d'en prescrire dans cette situation. Le seuil de 400 n'est pas mentionné comme du très haut risque. La répétition de mesures du CAC serait entre 3 et 5 ans pour la plupart des patients et 3 ans en cas de diabète.
 
Pour revenir sur la fiabilité du score calcique, cet article a comparé le score calcique de patients d'âge moyen effectuant une activité physique intense (6-9 METs) et très intense (> 9METs). Les patients ayant une activité physique très intenses avaient un score calcique qui progressait davantage que les autres ainsi qu'une plus rapide progression des plaques. Le sport serait il dangereux? D'après une revue narrative dans Exercer, ces plaques seraient plus stables au final. C'est un biais de plus à intégrer dans l'utilisation du score calcique. Des études cliniques non observationnelles seraient une fois de plus bienvenues.
 
Enfin, @Dr_JB_Blanc nous avait montré que son calculateur de risque favoris était le QRISK-2, et ben, la version actualisée: QRISK-3 vient de sortir! (L'article de validation c'est ici, et pour le calculateur c'est )
 
Pour finir cette partie, l'étude  Dancavas a randomisé des hommes de 65 à 74 ans en "pas de dépistage cardiovasculaire" versus "dépistage cardiovasculaire" comportant ECG (pour la FA), TDM  (pour score calcique, anévrisme de l'aorte), IPS (pour AOMI), mesure tensionnelle, dosage glycémique et lipidique. Les patients sont ensuite suivis pendant 10 ans. Voici les résultats intermédiaires à 5 ans (parce que ça fait pas encore 10 ans). Les patients  étaient en prévention secondaire pour 5% d'entre eux, mais  25% avaient de l'aspirine en prévention primaire, 35% une statine et 50% un antihypertenseur. Le critère de jugement principal est la mortalité toute cause: il n'y a pas de différence entre les groupes sur ce critère, donc on arrête donc là l'analyse  (Parce que certains diront que le  p est à 0.06, donc c'est pas loin. Mais non, dans un essai randomisé, c'est tout ou rien, c'est pas "proche de la significativité" (voir p de Neyman et Pearson). D'autres diront: oui mais dans le sous groupe 65-69 ans, le p est < 0.05 avec un NNT estimable à 455 patient par an. Mais comme le critère de jugement principal est pas significatif, on ne peut aller regarder les sous groupes.)  On verra à 10 ans si les résultats sont probants et réduisent la mortalité. Ce qui est intéressant, si on regarde les résultats secondaires quand même, c'est que ce sont les AVC uniquement qui seraient réduits, donc on pourrait peut être cibler les examens de dépistage plutôt que de faire toute la batterie, en se rappelant que le dépistage systématique de la FA n'apporte pas de bénéfice, cf ici et ).

Dans une étude de cohorte danoise de patients de plus de 40 ans asymptomatiques sur le plan cardiovasculaire et en prévention, les 9500 patients ont fait un coroscanner et ont été suivis. Ceux présentant une sténose coronarienne obstructive ou étendue asymptomatique (10% quand même) avaient un risque d'infarctus. On ne va pas conclure qu'il faut dépister tout le monde comme ça, mais la question est de savoir si un SCORE2 aurait permis de les classer à haut risque.
 
Commençons avec une étude de cohorte portant sur 300 000 patients de 40 à 75 ans sans antécédent de maladie cardio-vasculaire ni de diabète à l'inclusion et suivis pendant 5 ans. L'étude a évalué la survenue des évènements cardiovasculaires pour comparer ces évènements effectifs au risque des patients selon le score de l'AHA/ACC sur lequel les américains se basent pour déterminer la nécessité de traitements par aspirine ou statines en prévention primaire. Les auteurs retrouvent que le score AHA/ACC surestime le risque cardiovasculaire, avec un risque atteignant a peine 2% alors que le risque prédit est supérieur à 5% (cf figure. en rouge: le risque attendu par le score, en bleu: le risque observé). Le haut risque aux États Unis est essentiellement défini par un risque cardiovasculaire estimé supérieur à 10% à 10 ans.  En France, le seuil est de 5% à 10 ans (pourquoi a t on choisi un seuil arbitraire inférieur, je ne sais pas). Mais en tous cas un grand nombre de patients à haut risque selon les scores semblent visiblement ne pas être aussi à risque que ça.


Lors du calcul d'un score de risque cardiovasculaire, quelles valeurs de mesure de tension utiliser? Normalement, c'est la valeur au cabinet qui est utilisée. Cette étude du BJGP a réanalysé 2 cohortes de patients en prévention primaire. Quand la tension artérielle était mesurée en automesure, seuls 3,6% des patients étaient classés à risque plus élevé qu'avec les mesures au cabinet et 2,8% étaient classés à risque plus faible. Les différences sont donc minimes, avec un risque plus élevé de surestimation du risque que de sous estimation.
 
 

Un rappel sur les facteurs de risque cardiovasculaires: il n'y a pas que l'âge, le tabac, les antécédents familiaux, les dyslipidémies, le diabète et l'HTA qu'il faut rechercher! L'insuffisance rénale et l'obésité sont rarement prises en compte dans les scores. De la même façon, le VIH est un facteur de risque:




Il n'était pas certain que la dépression soit un facteur de risque cardiovasculaire. Cette étude du JAMA a réuni 22 cohortes pour analyser 500 000 patients. Les patients atteints des formes les plus sévères avaient un risque d'évènements cardiovasculaires augmenté de 10% environ par rapport à ceux ayant les scores de dépression les plus faibles (soit des NNH de 1000 patients avec dépression pendant 1 an pour entrainer 1 évènement cardiovasculaire supplémentaire).
 
Une fois de plus, une étude du BMJ retrouve une association entre l'inflammation chronique et les évènements cardiovasculaires. C'est l'eczéma sévère qui est en cause cette fois ci et qui augmenterai de 20%-50% le risque d'AVC, d'infarctus et d'angor instable. Le risque d'insuffisance cardiaque serait augmenté de 70%. L'histoire ne dit pas si, en contrôlant mieux l'eczéma on diminue le risque cardiovasculaire, mais la pris en charge dermatologique de ces patients ne doit pas faire oublier la prévention cardiovasculaire.

Enfin, une méta-analyse de cohortes regroupant au total près de 2 millions de patients a mis en évidence l’hypothyroïdie comme facteur de risque indépendant de mortalité cardiaque (OR= 1,96) , de mortalité globale (OR= 1,25) et de coronaropathie par rapport aux patients en euthyroïdie. De même, les hypothyroïdies frustes étaient également associées à une augmentation de la mortalité cardiovasculaire et globale. Ce qui est cependant très mal défini dans l'étude concerne la présente ou non des traitements et si des traitements introduits au cours du suivi de cohorte diminuait le risque par rapport aux patients non traités. Il faut donc particulièrement surveiller les patients avec une hypothyroïdie, mais il est difficile de conclure que traiter une hypothyroïdie fruste réduire le risque cardiaque.

Cibler les patients à risque pour une prise en charge spécifique. Ne pas larguer des médicaments à tout le monde pour espérer un bénéfice. C'est peut être ce qui sera possible dans les prochaines années. En attendant, une étude du Lancet, tirée des grandes étude de prévention primaires et secondaires sur les statines, a retrouvé qu'il fallait traiter environ 60 patients à risque génétique faible, 45 à risque intermédiaire et 25 à risque élevé pour prévenir 1 évènement cardiologique à 10 ans en prévention primaire.

3/ Aspirine

Le journal du collège des généralistes canadiens a publié une synthèse des études récentes concernant l'aspirine en prévention primaire et conclut que le bénéfice absolu serait de l'ordre de 1% chez les patients à haut risque, avec un risque équivalent d'hémorragies. En fait, sur les 3 études principales, seule celle chez les patients diabétiques retrouvait un bénéfice avec un NNT de 91 patients sur le critère composite d'évènements cardiovasculaires et un NNH de saignement majeur ou fatal de 112 (donc si on ajoutait les saignements non majeurs...)

Une nouvelle revue de la littérature s'est intéressée à l'aspirine en prévention primaire. Malgré une réduction du 10% des évènements cardiovasculaires sans différence sur la mortalité cardiovasculaire et globale, mais avec une augmentation de 50% des saignements majeurs, les auteurs jugent, logiquement, le bénéfice net non significatif. Si on regarde les sous-groupes pour trouver la sous-catégorie qui pourrait avoir un intérêt à être traitée... il y aurait une efficacité cardiovasculaire chez les hommes, non fumeurs, diabétiques, déjà sous statine, mais les saignements ne sont pas montrés, et on en revient donc au bénéfice net défavorable.


Un article d'Annals of Internal medicine a recherché a évaluer les bénéfices de l'aspirine en prévention primaire en utilisant le calculateur de risque néozélandais. Les auteurs retrouvent que 2,5% des femmes et 12,1% des hommes auraient un bénéfice à un traitement si on considère comme équivalent 1 évènement cardiovasculaire évité avec 1 saignement sous aspirine. Ils ont donc mis en place un calculateur (ici) permettant d'évaluer ce bénéfice pour chaque patient. J'e n'ai pas encore testé en vrai mais je ferai ça la semaine prochaine en consultation pour voir quel "type" de patient seraient potentiellement concernés.

Une nouvelle méta-analyse s'intéresse à l'aspirine en prévention primaire. Ainsi, au total, plus de 150000 patients suivis pendant plus de 6 ans ont été analysés. Les auteurs ne retrouvent pas de diminution de la mortalité globale, mais une augmentation des hémorragies sévères (NNH= 208). Les analyses de sous groupes chez les patients diabétiques ne montrent pas de bénéfice sur la mortalité non plus, que ce soit dans les études incluant uniquement des diabétiques ou tout patient à haut risque cardiovasculaire. On voit une diminution des infarctus sur l'ensemble des patients (NNT=502), mais on peut s'apercevoir que cette diminution n'est significative que dans le sous groupe d'études menées avant 2000, ce qui peut s'expliquer par une meilleure prise en charge du haut risque cardiovasculaire avec un meilleure utilisation des statines par exemple, après 2000. Bref, pour 1 infarctus évité, on entraine 2 saignements majeurs sans bénéfice sur la mortalité...



Un nouvel article du JAMA parle de la prescription d'aspirine en prévention primaire. Dans l'algorithme proposé, on peut surtout voir que l'aspirine n'a pas de bénéfice clairement établi lorsque le risque cardiovasculaire est inférieur à 10% selon le calculateur américain. A partir de 10%, il peut y avoir un intérêt si le NNT dans les études est inférieur au NNH (bénéfice > risques) pour les patients entre 50 et 69 ans.


Un journal a publié une synthèse sur l'aspirine en prévention primaire se basant sur le risque établi avec le calculateur AHA/ACC qui inclut le diabète en facteur de risque. En gros, l'aspirine ne devrait être recommandée que si, le risque hémorragique est faible et que  le risque cardiovasculaire est supérieur à 5% chez des patients de 50 à 70 ans ayant un antécédent familial de cancer colo-rectal, ou un risque supérieur à 10% entre 50 et 60 ans en l'absence de cet antécédent familial:


(HBR= Haut risque de saignement,  CHC= cancer colo-rectal,  ASA= aspirine)

Un article du Lancet s'est intéressé aux doses d'aspirine en prévention primaire cardiovasculaire. (On va pas dire qu'en prévention primaire, les indications et preuves d'efficacité sont quand même limitées mais bref...) Il s'agit d'une méta-analyse sur données individuelles, ayant étudié séparément les patients de moins de 70kg et ceux de plus de 70kg. Cette étude peut semer le trouble car en terme de prévention cardiovasculaire et de mortalité, elle retrouve que l'effet anti-agrégant de l'aspirine 75-100mg/j n'est présent que chez les patients de moins de 70kg et se perd pour des poids plus important. Et inversement, l'aspirine 300-500mg/j, le bénéfice cardiovasculaire n'était présent qu'au delà de 70kg. Chez les patients de moins de 50kg, l'aspirine 75-100mg/j était néanmoins responsable d'une surmortalité globale faisant évoquer un trop haut dosage pour le poids, et le risque de cancer des patients de plus de 70 ans également augmenté, notamment pour les moins de 70kg. En somme, quand une prévention primaire par aspirine est indiquée, elle semble défavorable chez les moins de 50kg et les plus de 70 ans, et la dose devrait être adaptée au poids: 75-100mg/j entre 50 et 70kg et 300-500mg/j au delà de 70kg.

Dans les stratégies de publications, voici encore une étude publiée dans le NEJM sous forme de 2 articles. Elle concerne l'efficacité de l'aspirine chez les sujets âgés soit sur la mortalité globale soit sur les évènements cardiovasculaires et le risque de saignements. Ainsi, 19 000 patients de plus de 65 ans en prévention primaire ont reçu de l'aspirine 100mg ou un placebo.. 50% des patients avaient plus de 75 ans, 75% étaient hypertendus et 70% avaient au moins 2 facteurs de risque cardiovasculaire. Concernant la mortalité, les patients traités par aspirine 100 avait une augmentation du risque de mortalité globale de 14% (NNH= 143 patients), essentiellement à cause d'une augmentation des cancers de 31% (NNH=125). Les auteurs, dans ce 1er article rapportent aussi l'absence de bénéfice cardiovasculaire. Les cancers augmentés étaient le cancer du poumon et le cancer colo-rectal. Étonnant étant donné qu'il y avait normalement une amélioration de la mortalité par cancer colo-rectal (j'en avais parlé ici et ). Peut être que l'aspirine améliorait la survie du cancer colique en faisant saigner plus abondamment et donc plus facilement détecté? Cependant, de façon cohérente, il y avait un sur-risque de mortalité également chez les patients diabétique mais un manque de puissance peut expliquer la non significativité de ce résultat vu qu'il n'y avait que 11% de diabétiques.

Concernant le 2ème article sur l'aspirine, on pourrait ne pas le regarder puisque le 1er montre une augmentation de mortalité sans gain cardiovasculaire. Bien sur l'article nous confirme l'absence de bénéfice en terme d'évènements cardiovasculaire, mais on peut mieux étudier le risque hémorragique, avec un sur-risque de 38% d'hémorragies majeures (NNH= 42 patients par an). Bref, pas d'aspirine en prévention primaire après 75 ans.

On continue avec l'évaluation de l'aspirine chez les patients à risque cardiovasculaire modérés. Cette étude retrouve cependant qu'il n'y a pas de différence dans la survenue d'évènements cardiovasculaire entre les patients traités et non traités malgré un sur-risque d'évènements indésirables sous aspirine. Malgré 12 000 patients inclus (ce qui était prévu), les auteurs disent que le nombre d'évènements étaient trop faibles (550 au lieu de 1500 estimés) et qu'il y a un manque de puissance.. Ce manque d'évènements est certainement du au autres mesures de préventions suivies par les patients. Ainsi, quand bien même l'aspirine réduirait un peu les évènements, on voit qu'il y aurait d'autres mesures de préventions qui diviseraient la survenue de ces évènements par 3! Bref, déjà qu'en cas de haut risque, l'aspirine n'est pas forcément consensuelle alors à risque modéré, c'est non!

Annals of Family medicine publie une revue faite pour l'USPSTF sur l'aspirine en prévention primaire. Les auteurs retrouvent un bénéfice en terme d'infarctus non fatals, avec un NNT de 700 à 7000 personnes par an selon les études........ , une diminution relative de 14% des AVC non fatals et sans bénéfice sur la mortalité cardiovasculaire ou globale. (Pour le coup, quand je vous dis qu'un NNT de 300 patients par an c'est pas "si" mal, hein...) Je vous met le tableau des risques relatifs:



Annals of internal medicine a publié une méta-analyse d'essais contrôlés randomisés sur les bénéfices  de l'aspirine en prévention primaire. Les auteurs retrouvent que l'aspirine, quelque soit permet une diminution de la mortalité globale de 6% (résultats non significatifs pour la mortalité cardiovasculaire et les AVC, et hétérogénéité trop importante pour les infarctus). Pour les posologies inférieurs à 100mg/j, seule la réduction des infarctus de 14% était significative mais avec une hétérogénéité des études dépassant les 50%, la mortalité globale étant diminuée non significativement de 5% (0,89-1,01). Il faut noter que les études incluaient des patients à partir de 40 ans, et chez les patients d'âge supérieur à 65 ans la diminution du risque d'infarctus dépasserait les 30% (selon la Women Health Study). Par ailleurs, l'étude des patients diabétiques retrouve au mieux une diminution du risque d'AVC par rapport aux non diabétiques, ce qui ne justifie pas un traitement massif de ces patients sur le seul facteur de risque qu'est le diabète pris isolément.

L'aspirine en prévention primaire n'avait jamais réussi a  démontrer clairement d'effet cardio-vasculaire avec un bon niveau de preuve. Son effet sur la prévention des cancer est connu mais la balance bénéfice-risque incertaine. Une étude a retrouvé que la balance s'inversait chez les femmes de plus de  65ans. On ne va pas sauter sur cette analyse de sous-groupe, d'autant que les études antérieures retrouvaient une possible diminution des évènements cardiovasculaire dans le sous groupe des hommes.

Une nouvelle étude, japonaise cette fois, ne montre pas de diminution du critère principal cardio-vasculaire avec un traitement par aspirine faible dose chez des patients avec facteurs de risque cardio-vasculaire en prévention primaire.

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4/ Statines

Le BMJ parle des statines en prévention primaire en fonction du risque cardiovasculaire. Il est intéressant de voir que l'efficacité des statines en prévention primaire sur la mortalité globale n'est présente que pour les patients avec un risque entre 5 et 10 %, et que l'efficacité sur les évènements cardiovasculaires commence dès les faibles risques mais n'est plus significative pour les risques supérieurs à 20% (mais est ce parce que les statines ne sont plus assez efficace ou par manque de puissance? Parce que des patients avec un risque supérieur à 20% en prévention primaire y'en a quand même pas beaucoup...). Enfin, notons la différence entre les sexes: le NNT à 10 ans pour éviter un évènement cardiovasculaire est de 11 pour un homme mais de 166 pour une femme. Ainsi, la prescription de statine en prévention primaire doit vraiment être individualisée, et concerne plutôt des hommes avec un risque entre 5 et 10 % pour permettre une réduction de la mortalité et des évènements cardiovasculaires de façon cliniquement pertinente.

Les hypolipémiants. Le BMJ a publié un article français (cocorico!) étudiant le traitement par statines et fibrates en prévention primaire dans une cohorte de patients de plus de 65 ans ( 74 ans en moyenne) survie pendant 9 ans en moyenne. L'étude montre que sur ses 7484 patients, la prise d'un traitement hypolipémiant diminuait de plus de 30% le risque d'AVC sans différence entre les statines et fibrates (à noter que le sous groupe fibrate était également significatif, mais que le sous groupe statines était à la limite de la significativité sans l'être. Mais bon, les analyses de sous groupe... faut pas trop s'y attacher) Cependant, les traitements préventifs de dyslipidémie chez les patients âgés ne montraient aucun bénéfice en terme d'infarctus du myocarde. Une explication possible est qu'il y avait une majorité de femmes (67%) dont il a été démontré précédemment (je ne connais pas les références par cœur malheureusement) que leur principal risque était celui d'AVC alors qu'il s'agit de l'IDM chez les hommes. Enfin, il y avait des données de mortalité globale! Elle était diminuée significativement de 13% dans le groupé traité, mais sans différence significative en terme de mortalité cardio-vasculaire.



On attendait une étude de la sorte depuis longtemps. Le BMJ publie une étude de cohorte rétrospective analysant les statines en prévention primaire après 75 ans chez les patients diabétiques et non diabétiques ayant ajusté les patients sur un score de propension (en niveau de preuve, on est juste en dessous de l'essai contrôlé randomisé de grande taille). Chez les non diabétiques, que ce soit entre 75 et 85 ou après 85 ans, les patients sous statine n'avaient pas moins d'évènements cardiovasculaire et une mortalité globale identique. Chez les patients diabétiques, il y avait un gain de mortalité globale (NNT= 306 patients par an) et d'évènements cardiovasculaire (NNT= 164 patients par an) entre 75 et 85 ans mais pas après. Ces traitements n'étaient pas associé a davantage d'hémorragies cérébrales, de cancer ou d"hépatites médicamenteuses. On savait déjà que les statines diminuaient la mortalité des diabétiques quelque soit leur taux de cholestérol, mais on a maintenant des arguments pour arrêter le traitement a 85 ans, alors qu'on peut arrêter plus tôt que ça chez les non diabétiques!

Une ré-analyse de l'étude SPRINT a comparé les patients sous statines et ceux sans statines en prévention primaire. Ainsi, les auteurs ont retrouvé qu'il n'y avait pas de différence en terme de survenue d'évènements cardiovasculaire chez les patients de plus de 65-70 ans sous statine en prévention primaire (p= 0,13) ce qui correspondait à un allongement non significatif de la durée moyenne sans évènements de 85 jours (669 jours sans statine vs 736 jours avec ). Encore une étude qui permet de douter du bénéfices des statines après 70 ans! (Mais pour mémoire, SPRINT ne randomisait pas de statine, seulement des objectifs d'antihypertenseurs).

5/ Autres traitements

Une revue de la littérature publié dans le JAMA cardiology revient sur les différents traitements cardiovasculaire. On y retrouve les risques relatifs de différents types de traitements (statines, traitements anti-hypertenseurs, aspirine et traitements du sevrage tabagique) sur la moralité globale, les évènements cardio-vasculaires et les effets secondaires. Il est regrettable que les NNT ne soient pas présentés... Et on peut également regretter que pour les traitements d'aide au sevrage le taux d’abstinence à 6 mois soit le seul critère étudié et que les effets secondaires ne soient pas présentés.


Voici un article concernant l'effet de l'arrêt du tabac sur la mortalité chez les patientes et patients en fonction de l'âge de l'arrêt. Arrêter avant 40 ans permet ne pas avoir de sur-risque de mortalité. Arrêter plus tard, quel que soit l'âge de l'arrêt apporte un bénéfice sur la survie, mais de plus en plus réduit avec un sevrage tardif. Enfin, les principales causes de mortalité étaient dans l'ordre: les causes respiratoires, puis cardiovasculaires, puis les cancers.




La prévention primaire est toujours très en vogue. Une méta-analyse publiée dans le JAMA a étudié l'efficacité de l’aspirine, des statines, des antihypertenseurs et de l'arrêt du tabac. Le risque d'évènement cardiovasculaire était diminué de 10% par l'aspirine et 25% par les statines. Les antihypertenseurs diminuaient le risque d'AVC de 35% et d'infarctus de 15%. Concernant l'arrêt du tabac, les évènements cardiovasculaires étaient trop mal renseignés pour conclure. L'aspirine augmentait de 45% le risque de saignement, mais les statines ne semblaient pas avoir plus d'effet secondaires que le placebo, ce qui me fait douter de ces analyses... Enfin, pour mémoire, les patients inclus dans les études méta-analysées sont généralement à haut risque cardiovasculaire, ce qui limite l'applicabilité à tous les patients qu'on croise.

Le BMJ a publié une étude de prévention primaire, étudiant l'évolution de la mortalité cardio-vasculaire d'une cohorte de 35000 patients. Les auteurs retrouvent que la prise en charge conjointe du tabac, de l'HTA et des dyslipidémies est probablement responsable des deux tiers de la diminution de la mortalité cardio-vasculaire, le reste étant possiblement lié à la prise en charge d'autres facteurs de risques tels que le a sédentarité ou l'amélioration de la prévention secondaire.

Pour commencer avec le congrès de cardiologie, voici l'étude HOPE-3 qui n'a pas échappé aux blogueurs tels que Dr Dupagne et Perruche. Cet essai est un essai de grande ampleur avec une méthodologie un peux tordue, histoire de faire quelques économies et d'améliorer la rentabilité de l'essai en publiant 3 articles dans le NEJM avec un seul essai... (c'est de la stratégie de publication bien menée!). L'étude HOPE-3 est un essai randomisé en 4 groupes selon un "plan factoriel 2x2". En clair, les patients ont été randomisé pour avoir: soit rosuvastatine + des anti HTA (candesartan + hydrochlortiazide), soit rosuvastatine + placebo A, soit les anti HTA + placebo B, soit placebo A + placebo B.
Le premier article publié compare les traitement du 1er groupe versus ceux du 2eme groupe, ce qui n'a pas beaucoup d’intérêt (vu que les choux et les carottes sont mélangées).
Le deuxième article compare les patients sous anti-HTA + placebo versus ceux sous double placebo. Les patients avaient dans chaque groupe 138/82 de tension et n'étaient donc pas hypertendus en moyenne. L'étude retrouve que le traitement anti-HTA baisse la tension mais ne diminue pas les évènements cardiovasculaires en l'absence d'HTA chez des patients avec un risque cardiovasculaire au moins modéré, voire élevé). Il n'y a donc pas d'intérêt des anti-hypertenseurs en l'absence d'HTA.
Le dernier article compare, vous l'aurez deviné, la rosuvastatine au double placebo. Et là, on voir que le traitement par statine chez des patients à risque cardiovasculaire modéré diminue de 25% les évènements cardiovasculaires! (en NNT ça donne: 91 patients en 5 ans, soit 450 patients par an). MAIS (vous l'avez compris, maintenant je vais déballer tout ce qui ne va pas): la mortalité cardiovasculaire et globale ne sont pas diminuées significativement. Ces patients sont ils vraiment a risque cardiovasculaire modéré? (jusque là, l'efficacité de la prava et simvastatine étaient pour les haut risques). Si on regarde les critères d'inclusion: age >55 ans pour les hommes et > 65 pour les femmes avec en plus un autre facteur de risque cardiovasculaire. Il avaient donc AU MOINS 2 facteurs de risque. Et dans le tableau 1: on voit que sans compter l'âge, 46% avaient 2 facteurs de risque et 24% en avaient au moins 3. Peut on dire que l'étude concerne le risque cardiovasculaire modéré quand 75% de la population a au moins 3FDRCV? Ensuite, rappelons le fiasco de l'étude JUPITER, financée par AstraZeneca, très controversée qui cherchait déjà à montrer une efficacité de la rosuvastatine en prévention primaire. AstraZeneca a donc retenté sa chance en finançant cette étude. Cette étude apporte quand même que les statines sont efficace pour réduire le risque d'évènements cardiovasculaire indépendamment du LDL qui n'était pas un critère d'inclusion. Les auteurs ont quand même voulu assurer le coup avec la rosuvastatine 10mg (donc statine a fort pouvoir hypolipémiant) pour démontrer presque la même chose que la prava et la statine mais sans bénéfice sur la mortalité (donc c'est certainement quand même une déception pour eux)
Bref, une étude qui fait du bruit, et qui va promouvoir les statines fortes dose (alors que y'a pas besoin de forte dose) à des patients a risque cardio modéré (qui sont en fait à risque élevé) parce que le Crestor diminue les évènements cardiovasculaires (alors que la prava et la simva diminuent la mortalité).

Et sinon, est-ce vraiment "le mal" de déprescrire les traitements cardiovasculaires? Une étude de non infériorité Néerlandaise a déprescrit les traitements antihypertenseurs et anti-dyslipidémiques de patients à faible risque cardiovasculaire dans un essai contrôlé randomisé en cluster. Les patients devaient avoir un traitement dont l'indication n'était pas formelle selon les recommandations locales. Ainsi, ils avaient un SCORE "pré-traitement" estimé a 7% en moyenne et à 5% prédit à 10 ans sous traitement (ce qui est tout de même plutôt haut!) Les auteurs ont mis en évidence qu'il n'y avait pas d'augmentation du risque cardiovasculaire 2 ans après la déprescription quand elle s'était prolongée (+2% de risque dans le groupe déprescription versus +1,9% dans le groupe contrôle), même si la tension était légèrement plus élevée (+4mmHg) et de même pour la dyslipidémie (+0,07g/L de cholestérol total). Ainsi, déprescire sans risque d'augmenter le risque cardiovasculaire est tout a fait faisable quand on cible les traitements non recommandés (et c'est peut être pour ça qu'il ne sont pas recommandés!)

Un essai contrôlé randomisé du JAMA a évalué la déprescription des antihypertenseurs chez des patients de plus de 80 ans avec une PAS < 150mmHg versus un groupe contrôle. Ainsi, il y avait respectivement 86% et 89% de patients avec une PAS < 150mmHg à 12 semaines avec une déprescription maintenue chez 66% des patients du groupe intervention. J'espère que les auteurs fourniront prochainement des données sur une durée de suivi plus longue et sur des critères cliniques d'évènements cardiovasculaire ou de mortalité.

On avait également parlé des polypills cardiovasculaires ici (ces pilules en prévention primaire contenant des antihypertenseurs, des statines et parfois de l'aspirine). Le Lancet a publié une revue systématique avec méta-analyse sur données individuelles concernant ces traitements. Ils ont inclus TIPS-3, HOPE-3 et PolyIran et concernent donc des patients de  63 ans en moyenne, à  65% hypertendus, 20% de diabétiques et autant de fumeurs. Leur score de Framingham moyen était de  17.7%+/-8.7, soit du risque intermédiaire (mais environ la moitié de la population était à risque élevé, le seuil étant à 20%). Les auteurs retrouvent que les polypills réduisaient significativement les critères composites cardiovasculaires avec un NNT de 52 patients à 5 ans (avec un effet sur les composantes suivantes: le risque d'infarctus, d'AVC et de mortalité cardiovasculaire). Les auteurs ont comparé polypill avec aspirine vs contrôle et polypill sans aspirine vs contrôle pour retrouver des effets similaires, mais un OR un peu meilleur avec aspirine. Ils n'ont pas retrouvé de saignements supplémentaires sous aspirine (ce qui est étrange au vu des autres études). Ils n'ont malheureusement pas comparé polypill avec aspirine vs sans aspirine, ce qui me met en désaccord avec leur conclusion disant que l'aspirine est utile en prévention primaire. Une fois de plus, les 2/3 des patients étant hypertendus, il est logique qu'un traitement antihypertenseur réduise les évènements cardiovasculaires. De plus, les statines réduisant les évènements cardiovasculaires chez tout le monde, les résultats retrouvés sont une fois de plus concordants avec le fait de traiter des patients selon leur risque cardiovasculaire (ici, la moitié des patients était à haut risque, et le bénéfice sur le sous groupe des patients à risques faible et modéré n'est pas significatif notamment sans aspirine).

Une étude du Lancet a étudié l'effet de la '"polypill" dans un essai contrôlé randomisé iranien. La polypill contenait 12,5mg d'hydrochlorothiazide, 5mg d'enalapril, 81 mg d'aspirine et 20mg d'atorvastatine et était donc distribuée à tout patient randomisé dans le bras traitement de la cohorte de patients (en prévention primaire ou secondaire). A 60 mois, les patients avaient en effet une réduction des évènements cardiovasculaires de 34% (NNT= 54 patients en 60 mois), mais il n'y avait pas de baisse significative de la mortalité globale (ce qui n'est pas génial quand on souhaite mettre un traitement préventif à tout le monde). Les effets indésirables et saignements sont mal décrits. Si on regarde les analyses en sous groupes, ça marche surtout en prévention primaire (puisqu'en prévention secondaire les patients ont souvent déjà un IEC, de l'aspirine et une statine). De plus, on sait que mettre une statine à n'importe qui diminue le risque cardiovasculaire (parfois de pas grand chose, mais ça marche quand même). Comme les molécules ne sont pas étudiées individuellement, on ne sait pas si c'est le cocktail qui est efficace dans l'étude ou une seule des molécules. Dans Hope-3, c'est la statine qui était efficace dans le traitement "statine+antihypertenseur", et l'aspirine en prévention primaire ne marchant habituellement pas, on aurait aimé avoir un bras "statine seul" en comparaison, mais ça aurait été prendre le risque que la polypill ne marche pas. Bref, totalement inutile de conclure qu'il faut mettre une polypill à tout le monde.

Une méta-analyse a tenté, une nouvelle fois de montrer une efficacité de la vitamine D sur les évènements cardiovasculaire. Une nouvelle fois, malgré les 80 000 patients inclus dans cette méta-analyse, il n'y avait pas de différence ni sur la mortalité globale et cardiovasculaire, ni sur les évènements cardiovasculaires.

Une étude de cohorte européenne a étudié les évènements cardiovasculaires et le décès des patients avec antécédent de goutte selon leur uricémie. Les patients avec une uricémie supérieure à 360mol/L avaient un risque de mortalité cardiovasculaire et globale augmentée (respectivement 8,1% vs 2,6% patient.année décédés) après ajustement sur l'âge, le sexe et les facteurs de risque cardiovasculaires. On sait que l'hyperuricémie est un facteur de risque cardiovasculaire, cependant, traiter les patients asymptomatiques n'a pas fait preuve de son efficacité. Ici, c'étaient des patients avec une goutte chronique avec en moyenne 2 crises de goutte par an et seuls 40% avaient un traitement hypo-uricémiant dont la prise était associée à une réduction de la mortalité cardiovasculaire et globale également. Donc, peut être faut il cibler une uricémie normale chez les patients avec poussées de gouttes répétées qui ont une indication à un traitement de fond (ou bien, les patients traités étaient également mieux suivis et plus observants sur leurs autres facteurs de risque cardio-vasculaires, mais ça, cette étude ne peut le dire)

Une méta-analyse du JAMA Open s'est intéressé à la vitamine B3 (niacine/acide nicotinique/vitamine PP) et à la survenue d'évènements cardiovasculaires. La vitamine B3 baissait bien le LDL, mais sa prescription versus placebo n'était pas associée à une diminution de la mortalité globale ou cardiovasculaire. Cependant, dans les sous-groupes de patients sans statines (parce qu'intolérants?) en prévention secondaire, les patients traités par B3 avaient moins d'infarctus et d'AVC (sans effet sur la mortalité, toujours). Avant de conclure qu'on peut en prescrire dans ces conditions là, il faudrait peut être qu'on ne travaille pas avec des sous-groupes sur des critères de jugements secondaires.

Une étude sur l'hyperuricémie. Cela fait plusieurs années que l'ont voit apparaitre l'hyperuricémie comme facteur de risque cardiovasculaire. Une étude de cohorte de patients hyperuricémiques a été menée et les patients traités ont été appariés avec un score de propension sur les comorbidités et traitements avec des patients non traités. Les auteurs retrouvent une diminution du risque de mortalité globale de 32% (alors que le risque de mortalité cardiovasculaire n'est même diminué de 10% significativement)! 

Dans la catégorie, "quand ça marche pas, cherche encore", je vous présente la recherche d'association entre l'utilisation de glucosamine (totalement inutile dans son indication arthrosique) et les évènements cardiovasculaires dans un article du BMJ. Plus de 400 000 patients tirés des bases de données britanniques ont été étudiés dans cette étude de cohorte rétrospective. Par rapport aux non utilisateurs, les patients utilisateurs de glucosamine étaient plus sportifs, moins fumeurs, moins diabétiques (et avaient plus souvent de l'arthrose) et prenaient beaucoup plus de vitamines. Après avoir ajusté sur tout ça, un traitement par glucosamine était associé à une diminution de la mortalité cardiovasculaire de 15 % (NNT= 500 pour 7 ans de suivi en moyenne...) Bon, c'est pas hyper-vendeur vu les chiffres, y'a certainement plein de biais sur les comportements des patients, donc un bon essai contrôlé randomisé serait peut être utile?

6/ Règles hygiène-diététiques

Cependant, chez les patients sans facteurs de risque cardiovasculaire, une revue du JAMA montre que donner des conseils et encourager les règles hygiénodiététiques et l'activité physique permet de réduire modérément les évènements cardiovasculaires fatals et non fatals, la pression artérielle et le cholestérol sans qu'il n'y ait de signaux concernant d'éventuels effets indésirables.
 
Une étude de PlosMedicine a évalué l'impact de programmes basée sur l'utilisation de podomètres chez des patients de médecine générale. Plus de 1000 patients ont été inclus et randomisés en "programme avec podomètres et feedbacks" ou "soins classiques" avant d'être suivis pendant 4 ans. Les auteurs retrouvent une diminution significative des évènements cardiovasculaires (NNT= 61 patients) et des fractures (NNT= 28 patients). Bref, achetez des podomètres (mais suivez aussi les programmes car il y avait des entretiens personnalisés avec des infirmières ou infirmiers tout au long de l'intervention)

Je voulais vous parler de la perte de poids chez des patients obèses grâce à des règles hygiéno-diététiques, qui, pour la 1ère fois, démontrerait un bénéfice en terme de mortalité globale avec un NNT de 166 (6 décès évités pour 1000 patients participants) Encore une fois, PUAutomne m'a devancé! Alors, je vous laisse lire son billet (il faut dire que c'est lui qui m'a inspiré le Dragi Webdo, du temps où il faisait sa veille hebdomadaire, alors rien d'étonnant à sa réactivité) 



Une étude en cross-over chez des patients en surpoids a étudié le rôle de l'alimentation (selon les index glycémiques des aliments) pour différents paramètres cardio-vasculaires. Et contrairement à ce qu'on pourrait penser, les aliments d'index glycémique bas n'améliorent pas la sensibilité à l'insuline. En outre les différents régimes testés n'ont globalement pas d'influence sur la tension artérielle, le LDL, et le HDL (cf figure pour le détail)


Un article de cohorte du BMJ a étudié les évènements cardiovasculaires de 50 000 patients et retrouvé que les mangeurs de viande avaient un risque plus élevé d'infarctus du myocarde que les végétariens et végétaliens. Cependant les végétariens avaient un risque plus élevé d'AVC (surtout hémorragique) que les mangeurs de viande. C'est concordant avec la littérature qui retrouve que des taux de LDL trop bas favorisent les AVC hémorragique et que les taux trop haut favorisent les ischémies.

Quel est l'apport optimal de sel par jour? Ce débat a conduit à la publication d'un article sur deux études randomisant les apport en sel (régime contrôlé vs alimentation normale). Ces études retrouvent une diminution linéaire de la mortalité chez les patients avec la baisse de la consommation en sel allant jusqu'à 25% de risque de décès en moins sous les 2,3g/jour. Faudrait-il  revoir l'objectif de 3-4g/j pour les régimes peu salés suite à cette étude? D'une part, les patients inclus étaient relativement jeunes à l'inclusion 45 ans en moyenne, suivis 20 ans ce qui amène à 65 ans en fin d'étude, ce qui ne correspond globalement pas à des patients âgés, multi-morbides ou fragiles. Ensuite, les apports étaient quantifiés par mesure de la natriurèse des 24h et là je laisse Perruche En Automne en parler parce qu'il le fait si bien ici (quitte a randomiser, autant contrôler directement les apports des patients.  Certes, préparer a manger pour des patients pour 20 ans, c'est pas facile...) Probablement que limiter au maximum les apports en sel est bénéfique chez des patients pré-hypertendus sans comorbidité, mais pas forcément chez des patients fragiles insuffisants cardiaques ou insuffisants rénaux pour lesquelles la restriction totale en sel pourrait s'accompagner d'une restriction des apports caloriques (Si les spécialistes du domaine ont des études qui prouvent le contraire, n'hésitez pas à les mettre en commentaire!)

J'espère que vous dormez sinon, je vais devoir vous parler d'un article du journal de la société américaine de cardiologie retrouvant un sur-risque mortalité chez les patients dormant moins de 6 heures par nuit! (Heureusement, cela concernait des patients ayant des facteurs de risque cardiovasculaires, ce qui n'est pas mon cas...).

Faire la sieste diminue l'hypertension artérielle de 4% le jour et  6% la nuit, avec un bénéfice supplémentaire de 4% pour des siestes de plus d'une heure. (Kallistratos M Association of mid-day naps occurrence and duration with bp levels in hypertensive patients. A prospective observational study)

Un article du NEJM aborde l'impact des 5 principaux facteurs de risques cardiovasculaires modifiables. L'impact sur le risque cardiovasculaire était dominé par la pression artérielle, puis le non HDL cholestérol, puis le diabète, puis le tabagisme et enfin l'obésité. Les 5 facteurs réunis étaient responsables de 55% du risque d'évènements cardiovasculaires et d'environ 20% du risque de mortalité globale à 10 ans! Bref, contrôler ces facteurs de risque est indispensable.
 

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