Une synthèse sur l'hyponatrémie a été publiée par Adrogué et Madias dans le JAMA. On va juste compléter le billet précédent
sur le sujet. La figure rappelle plus précisément comment diagnostiquer
les causes de l'hyponatrémie. Rappelons une fois encore les causes
iatrogènes: les diurétiques, les tricycliques, les neuroleptiques, les
immunosuppresseurs, les corticoïdes, les AINS, la desmopressine,
l'oxytocine, les IEC, les IRS et IRSNA, la nicotine, l'héroïne, la
cocaïne, et l'extasy. Le traitement consiste généralement dans l'arrêt
du médicament incriminé. L'hospitalisation est requise pour des
hyponatrémies inférieures à 120mmol/L (au dessus, ça peut être en
ambulatoire).

Le
BMJ a publié un article concernant les hyponatrémies en soins primaires. Les hyponatrémies > 130mmol/L sont modérées mais déjà associées à une augmentation du risque de chutes par rapport à une norme > 132mmol/L. Entre 125 et 129, elles peuvent éventuellement être gérées en ambulatoire après avis, mais l'hospitalisation est indispensable en dessous de 125mmol/L. Les principales cause sont iatrogènes: diurétiques, les antidépresseurs et antiépileptiques, et une mesure de natrémie est recommandée à 1 mois puis annuellement chez les patients sous diurétiques. En cas de suspicion de syndrome inapproprié d'hormone anti-diurétique (facilement suspecté devant une concentration urinaire en sodium > 30mmol/L), la restriction hydrique à 500cc/j est le traitement le plus simple à mettre en œuvre mais pas toujours très accepté par le patient... (et ça ne dispense pas d'une recherche étiologique s'il n'y a pas de cause évidente)

Et aux urgences, je ne peux que conseiller la formule d'
Adrogué et Madias qui est juste magique quand on veut réhydrater avec n'importe quel soluté que ce soit du Na à 1/1000 ou à 3% ou ajouter du potassium etc... (avec eau totale = poids estimé du patient/2), y'a qu'a régler le débit pour ne pas réhydrater trop vite et donc choisir le temps nécessaire pour obtenir la variation Delta[Na]:

Un article du NEJM aborde
le SIADH. Le diagnostic est posé devant une hyponatrémie (na < 130),
euvolémique hypotonique (Natriurèse > 30mmol/L et osmolalité
urinaire > 100 mOsm/kg
d'eau). Il est également nécessaire d'exclure une hypothyroïdie et une
insuffisance surrénalienne. Les principales causes sont des cancers, des
médicaments (AINS, IRS, neuroleptiques, opioïdes, desmopressine,
chimiothérapies...) et les troubles respiratoires. En l'absence
d'hyponatrémie sévère (troubles de conscience, vomissements, cause
intracranienne..) et si Na > 120, un traitement ambulatoire peut être
proposé. En 1er lieu, la restriction hydrique à 1,5L/j voire 1L/j
associé à un arrêt des traitements impliqués et un traitement de la
cause si connue est à entreprendre. Si c'est insuffisant, il est
possible d'associer du chlorure de sodium (2 à 5g/j) et du furosémide à
20mg x2/j, en surveillant la kaliémie, la fonction rénale et les
hypotensions. En cas d'inefficacité, d'autres traitements sont
envisageables par les spécialistes (tolvaptan, urée, voire empagliflozine).
Le blog Perruche en Automne en a parlé souvent: boire "plus" n'est pas utile pour les reins. Cette fois ci, une étude confirmé
l'absence d'association entre les apports hydriques et la mortalité
globale. Cependant, la mortalité cardiovasculaire était associée aux
apports hydriques: plus on boit d'eau, moins on a de problèmes
cardiovasculaires. Quand on regarde les figures, ce n'est pas si évident
que ça, car le modèle n'est pas linéaire, et s'il y a un bénéfice,
c'est probablement aux alentours de 6 verres par jour (soit 1,5L).
Pour commencer,
Perruche en Automne a
publié un super billet sur les dyskaliémies à partir d'un article de
Circulation. Je ne peux que vous inciter à le lire! On y voit
l'évolution de la mortalité selon la kaliémie des patients, et que
l'hypo tue plus vite que l'hyper...

Le JAMA publie
un article sur l'hypercalcémie. Les 2 principales causes sont
l'hyperparathyroïdie primitive et les
néoplasies, puis on trouve la iatrogénie (thiazidiques, calcium,
vitamine D, vitamine A...) et les autres causes (sarcoïdose,
phéochromocytome, acromécalie...) . L'hypercalcémie modérée est définie
comme une hypercalcémie inférieure à 3.0mmol/L, et est généralement
asymptomatique (éventuellement constipation ou fatigue). La calcémie
corrigée par l'albumine est généralement suffisante pour une évaluation
du calcium, mais un dosage du calcium ionisé peut être nécessaire en cas
d'insuffisance rénale ou de trouble acido-basique). Le dosage de la PTH
permettra généralement d'orienter vers une cause. Le traitement (en
dehors de l'urgence de l'hypercalcémie sévère) et généralement
étiologique (chirurgical si HPTP). Des bisphosphonates peuvent être
proposés pour un traitement symptomatique.
Voici un article du
NEJM portant
sur les troubles liés au magnésium (norme: 1.7 à 2.4 mg) et aborde
notamment les hypomagnésémies (les hyper étant très rares et
majoritairement iatrogènes chez des patients avec insuffisance rénale).
La 1ère chose à retenir, c'est que l'hypomagnésémie est fréquente,
atteignant 3% à 10% de la population générale, avec une majorité de
patients asymptomatiques. Quand il y a des symptômes, ils sont
non-spécifiques tels qu'une fatigue, des crampes ou une faiblesse
musculaire, ce qui peut expliquer un sous-diagnostic d'après les
auteurs. Cependant, l'hypomagnésémie est généralement associée à
d'autres troubles électrolytiques (notamment hypocalcémie, hypokaliémie
et alcalose métabolique), l'absence d'autres troubles ioniques rend
moins probable le diagnostic. Enfin, certains traitement peuvent
favoriser l'hypomagnésemie: antibiotiques, diurétiques, IPP,
immunosuppresseurs et chimiothérapies.
1/ Recommandations
2024: Les recommandations du KDIGO sur
la maladie rénale chronique 2024 ont été publiées. Les auteurs
recommande d'utiliser la créatininémie et le rapport albuminurie/créat
pour dépister les patients à risque de MRC, mais si la cystatine-C est
disponible, il faut mieux évaluer le DFG avec, en plus du DFG estimé par
créatininémie. Un point intéressant est qu'ils recommandent d'éviter
l'utilisation de la race dans les équations. Chez les patients avec un
DFG <60ml/min, l'utilisation d'un score d'évaluation du risque absolu
d'insuffisance rénale est recommandé (type KFRE).
Un score entre 3% et 5% à 5 ans peut indiquer un avis néphrologique. Un
score > 10% nécessite une prise en charge en équipe
pluridisciplinaire et > 40% préparer la dialyse ou la
transplantation. Les auteurs recommandent un iSGLT2 en cas de diabète et
à poursuivre même si DFG < 20ml/min, mais interrompre en cas de
situations aiguës à risque d'acédocétose. Les iSGLT2 sont également
recommandé en l'absence de diabète si insuffisance cardiaque ou RAC ≥200
mg/g (≥20 mg/mmol) (1A) ou si DFG < 45ml/min avec RAC normal (2B).
Les hypo-uricémiants ne sont pas indiqués en l'absence de symptômes.
Enfin, une statine est recommandée après 50 ans si MRC notamment si DFG
< 60ml/min.
2024: Le BMJ a
publié une recommandation pratique sur l'utilisation des iSGLT2 dans la
maladie rénale chronique, dépendant du DFG et du rapport
albumine/créatininurie (RAC).

En suivant les flèches sur la figure ci-dessus, vous avez des profils
de patients qui conduisent à 4 catégories de bénéfices: "faible", "modéré",
" élevé" et "très élevé" (par exemple, un patient avec "DFG > 60" et "RAC
> 30" donne un bénéfice de traitement "élevé"). Voici à quoi
correspondent ces bénéfices en termes chiffres absolus :
- Bénéfice faible: NNT pour la mortalité = 143 à 5 ans
- Bénéfice modéré: NNT pour la mortalité = 77 à 5 ans
- Bénéfice
élevé : NNT pour la mortalité = 42 à 5 ans, pour la mortalité
cardiovasculaire=167, pour les évènements cardiaques non fatals = 48.
- Bénéfice
très élevé: NNT pour la mortalité = 21 à 5 ans, pour la mortalité
cardiovasculaire = 100, pour les évènements cardiaques non fatals = 32,
pour l'insuffisance rénale = 18, pour l'insuffisance cardiaque = 40.
- Risques
chez ces patients "non diabétiques" : pas de sur-risque d'acidocétose,
de fracture, d'infection génitale, d'amputation, de dialyse ou
d'hypovolémie symptomatique.
2023: La HAS a mis a jour son guide du parcours de soins du patient atteint de maladie rénale chronique qui datait de 2021 (cf ici).
En pratique, il n'y a quasiment aucune modification pour les parties
concernant la médecine générale. Il est ajouté qu'en cas d'échec du
traitement par IEC/ARAII pour contrôler la PA et la protéinurie, une
intensification par gliflozine ou agoniste non stéroidien des
minéralocorticoïdes (Finerenone) est à discuter et un avis cardiologique
ou néphrologique doit être pris. Cela va fortement ralentir la prise en
charge alors que les gliflozines sont aisément accessibles et
utilisables en médecine générale. Concernant l'utilisation de produits
de contraste iodés, les auteurs recommandent un contrôle à 48h du DFG et
de ne réintroduire les traitements interférants (IEC/ARAII, gliflozine,
diurétiques) qu'après s'être assuré de l'absence d'aggravation.
L'hyperkaliémie liée aux traitements est à considérer à partir de
5.5mmol/L prélevé sans garrot, et une hospitalisation est recommandée à
partir de 6mmol/L (ce qui est plus strict que les recos britanniques disant: à 6mmol/L, on arrête le traitement, et on fait un ECG).
2022: Le KDIGO, société savante de néphrologie a mis à jour ses recommandations dans
la prise en charge du diabète avec maladie rénale chronique (MRC). Il
n'y a quasiment pas de différences avec leurs recos de 2020 (cf ici).
On notera qu'ils recommandent pour tout patient diabétique avec MRC
(DFG<60 ou Rapport A/C > 3mg/mmol ou > 30mg/g) une bithérapie
par metformine (si DFG>30) et inhibiteur de SGLT2 (si DFG>20) avec
ajout d'analogue du GLP1 si l'objectif glycémique n'est pas atteint. En
parallèle, un traitement par IEC ou ARA2 est recommandé si albuminurie
ET hypertension artérielle. Si l'albuminurie persiste malgré une dose
maximale d'IEC/ARA2 et que le potassium est normal, un traitement par
antagoniste des récepteurs aux minéralocorticoides non stéroïdiens
(Finerenone notamment) est indiqué devant un bénéfice sur la progression
de la MRC et sur les évènements cardiovasculaires. En plus, un
traitement par statine chez tout patient diabétique avec MRC. Enfin, les
auteurs marquent leur divergence avec les recommandations de l'ADA, en
recommandant une cible d'HbA1C entre 6,5% et 8% (et non à 7%)! (Et un
petit rappel sur l'efficacité des antidiabétiques).
[Edit:] Ajout de la publication complémentaire: les aGLP1 peuvent être prescrits préférentiellement au iSGLT2 si diabète + néphropathie + obésité, les iSFLT2 peuvent être utilisés jusqu’à 20mL/min de DFG et on peut même continuer plus bas si c'est bien toléré.

2021: La HAS a
publié une mise à jour des recommandations sur l’insuffisance rénale
chronique. Un des premières modifications est la suppression de l’âge
supérieur à 60 ans dans les facteurs de risque devant conduire à un
dépistage. Les autres facteurs de risque décrits ici sont
maintenu et le dépistage se fait par mesure de la créatininémie et du
rapport albuminurie/créatininurie (RAC). Le déclin de DFG physiologique
est de 2ml/min/an, il est modéré entre 2et 5ml/min/an et rapide
au-delà de 5ml/min/an. Pour la 1ère fois le score KFRE est recommandé et
un risque de déclin rapide > 3% doit conduire à adresser au
spécialiste (on en avait parlé ici).
Le suivi peut être assuré par le généraliste pour les DFG >45ml/min,
stable et sans complication (ou jusqu’à 20ml/min chez le sujet âgé).
Les auteurs recommandent l’utilisation de la formule CKD-EPI pour
adapter les posologies des traitements. Sur le plan thérapeutique, les
auteurs recommandent d’introduire un IEC ou un ARA2 pour obtenir une TA
< 140/90 et même de viser < 120mmHg de PAS (sauf si diabète, âge
>90 ans, protéinurie >1g, DFG<20ml/min ou PAD< 50mmHg).
L’IEC et l’ARA2 sont également recommandé dès 120mmHg si RAC >
300mg/g ou >30mg/g si diabète. L’atorvastatine est la statine
recommandée chez tous les patients de plus de 50 ans lorsque le LDL est
> 1,9g/L. Enfin, voici le tableau de suivi :

2021: Le NICE britannique
a publié des recommandations concernant la prise en charge de
l'insuffisance rénale chronique. Le dépistage est recommandé en cas de
diabète, HTA, maladie
cardiovasculaire, pathologie des voies urinaires, antécédent familial de
maladie rénale, goutte, antécédent d'insuffisance rénale aigüe. Les
auteurs recommandent d'évaluer l'insuffisance rénale chronique par le
dosage de la créatinine en utilisant la formule CKD-EPI et la mesure du
Rapport Albuminurie/Créatininurie (RAC >3: microalbuminurie, >30:
albuminurie). Une échographie rénale est indiquée si progression,
symptômes obstructifs, hématurie, DFG < 30, antécédent familial de
PKAD. Les indications d'adressage à un néphrologue sont plus claires
dans cet article, mais c'est globalement les mêmes.
Sur
le plan thérapeutique, ils recommandent une PA à 140/90 avec un IEC ou
un ARAII et d'ajouter un iSGLT2 en cas de diabète avec RAC>30. En
l'absence d'HTA, un RAC>70 est une indication à un traitement par
IEC/ARAII. Les bloqueurs du SRA s'introduisent si la kaliémie est
inférieure à 5mmol/l et s'arrêtent si elle est supérieure à 6mmol/l. Une
augmentation de la créatinine jusqu'à 30% est normale (déclin du DFG de
25% maxi). La cause d'une anémie peut être rattachée à l'insuffisance
rénale chronique si le DFG est inférieur à 30ml/min (possible mais rare
entre 60 et 30ml/min). La recherche de troubles du bilan
phosphocalcique n'est recommandée qu'a partir d'un DFG < 30ml/min. La
suite des prises en charge semble un peu trop spécialisée, mais si ça
vous intéresse, c'est dans la reco.
2021: Le KDIGO a
proposé des recommandations concernant l'HTA chez les patients avec
insuffisance rénale. Le dépistage s'effectue par des mesures
standardisées au cabinet suivies de mesures ambulatoires. Les cibles
tensionnelles proposées sont de 120mmHg en s'appuyant essentiellement
sur l'étude SPRINT... Ils recommandent des IEC ou ARA2 chez les patients
avec HTA et insuffisance rénale et albuminurie (diabétique ou non). Il
n'y a pas de recommandations en l'absence d'albuminurie. Ils prônent
également une restriction sodée importante à 2g de sodium/jour (soit 5g
de chlorure de sodium.)
2020: Des recommandations internationales
ont été publiées par le KDIGO concernant le rein et le diabète. Pour
mémoire, la norme d'albuminurie c'est < 30mg/24h ce qui correspond à
< 3mg/mmol ou < 30mg/g et l'albuminurie sévère c'est >
300mg/24h ce qui correspond à > 30mg/mmol ou > 300mg/g (entre les 2
c'est modéré).
La
metformine est recommandée si le DFG-estimé est supérieur à 30ml/min.
La surveillance de la fonction rénale doit être annuelle si le
DFG-estimé est normal ou plus souvent si abaissé. Le dosage la vitamine
B12 est recommandé annuellement si la metformine est prise depuis plus
de 4 ans.
Un
traitement par IEC ou ARAII à la dose maximale tolérée est recommandé
si diabète, hypertension chez les patients avec un DFG < 60mL/min ou
avec albuminurie depuis plus de 3 mois (ils ne privilégient pas une
classe ou une molécule). Voici l'algorithme intéressant pour adapter les
doses qu'ils proposent:
Côté
règles diététiques, ils recommandent moins de 2g de Na par jour ou
moins de 5g de sel (NaCl), et d'avoir une activité physique d'intensité
modérée (2h30/semaine).
Viennent
ensuite des objectifs glycémiques à placer entre 6,5% et 8% selon les
patients. On en a déjà parlé, les molécules utilisées sont plus
importantes que les objectifs... et ils sont d'accord car ils proposent
en 1ère ligne: bithérapie metformine +inhibiteur de SGLT2 systématique
tant que le DFG-e > 30mL/min, et si un de ces traitement ne peut plus
être utilisé ou si la bithérapie est insuffisante, ajouter un analogue
du GLP-1 préférentiellement à un autre antidiabétique. Ce récent billet
de Perruche confirme bien la place des iSGLT2 dans cette stratégie.
Je
finirais par cette roue des traitements antidiabétiques qui montre les
traitements à préférer et à éviter selon les comorbidités du patients
(il manque juste les iSGLT2, car ils n'étaient pas disponible au moment
de la création de cette roue, je pense)

2019: L'académie de pharmacie s'est intéressé à la
maladie rénale chronique, sous
dépistée et sous diagnostiquée. Les points importants pour les médecins
passent par l'inscription du DFG sur les ordonnances, la réduction de
la iatrogénie médicamenteuse et le dépistage des patients à risque
(c'est à dire, selon la HAS: âge > 60 ans, diabète, HTA, maladie
cardiovasculaire et insuffisance cardiaque, maladie auto-immune,
obésité, affection urologique, antécédent familial d'insuffisance rénale
chronique terminale, expositions à des toxiques (comme le plomb) ou à
des traitements néphrotoxiques notamment AINS. Bien que les auteurs
parlent des campagnes de sensibilisation en population générale, aucun
bénéfice n'a été montré d'un dépistage en l'absence de facteurs de
risque (cf
HAS et
ici).
2014: Restons dans les recommandations du NICE, sur l'insuffisance rénale chronique cette fois ci. Ce qu'il faut noter, est qu'elles sont relativement concordantes avec les recommandations de l'HAS de 2012 invitant à introduire un traitement pas IEC rapidement et à adresser au néphrologue à partir d'une clairance inférieure à 45ml/min mesurée en CKD-EPI . La nouveauté qu'ils évoquent est l'utilisation d'une estimation du DFG par une mesure de la cystatine C pour confirmer le diagnostic qui doit être inférieur à 60ml/min (surtout en cas d'absence de protéinurie ou d'estimation de DFG basée sur la créatininémie entre 45 et 60ml/min).
2/ Autres articles
Le
BMJ publie
une synthèse concernant la prise en charge de la maladie rénale
chronique. Il n'y a rien de très novateur. Il est recommandé d'adresser
au néphrologue quand le score
KFRE est
> 2% à 2 ans, ce qui est un seuil particulièrement vite atteint en
fait. La prise en charge est relativement simple à réaliser en
ambulatoire: 1/ vaccination pneumocoque et grippe, éviter les
médicaments néphrotoxiques (AINS++). 2/ contrôle tensionnel, contrôle
glycémique, contrôle du risque cardiovasculaire, exercice physique,
régime méditerranéen. 3/ éducation aux risques et éventuellement conseil
génétique 4/ utilisation des traitements spécifiques: IEC ou ARAII à
poursuivre quel que soit le DFG car bénéfice sur la mortalité même en
cas d'IR sévère, les ISGLT2 en bithérapie avec les bloqueurs du SRA, les
aGLP-1 (non indiqués en l'absence de diabète actuellement), les
antagonistes non stéroidiens des minéralo-corticoïdes (spironolactone,
éplérénone et surtout finérénone), et enfin les antagonistes des
récepteurs de l'endothéline (dont on a parlé la semaine dernière).
Le
JAMA a publié une revue sur la maladie rénale chronique. Concernant le dépistage, les données de la littérature ne sont pas pour un dépistage chez les patients asymptomatiques sans facteurs de risque, mais pour un dépistage ciblé chez les patients de plus de 60 ans, en cas de diabète ou d'HTA. Cependant, comme le dit également la HAS, le dépistage peut être considéré chez les patients obèses, avec une maladie auto-immune, prenant des AINS ou du lithium, des antécédents d'infections urinaires répétées ou des lithiases urinaires.
Les objectifs de la prise en charge sont classiques (contrôle de la tension <140/90 avec un bloqueur du système rénine angiotensine, du diabète, les règles diététiques et la prévention cardiovasculaire). En cas de rapport albuminurie/créatininurie > 30mg/g, certaines recommandations proposent une intensification du traitement anti-HTA avec un objectif plus strict à 130/80, un régime hypoprotidique et la restriction sodée. Si on synthétise les bilans des complications, étiologiques etc... qui sont nécessaire, il faut donc:
- créatininémie, urée, albuminurie/créatininurie (ils ne parlent trop de protéinurie/créatininurie), kaliémie, NFS, EAL, recherche de diabète, albuminémie, calcémie corrigée, phosphore, bicarbonates, PTH, vitamine D
- échographie urinaire et ECBU (pour la recherche d'hématurie et d'infection urinaire, mais probablement qu'une bandelette peut être suffisante dans certains cas)
Ils proposent un algorithme pour savoir quand orienter au néphrologue selon les facteurs de gravité, le DFG estimé selon CKD-EPI (dans les facteurs pronostics, le risque à 2 ans d'insuffisance rénale terminale est évaluée grâce à ce calculateur:
https://kidneyfailurerisk.com/ ) : (pour mémo les recos du NICE et de la HAS avaient été discutées
ici)

Alors que la
HAS venait de retirer l'âge de plus de 60 ans comme critère de dépistage de la maladie rénale chronique, une
étude
médico-économique concernant ce dépistage a été publié dans Annals of
internal medicine. Les auteurs trouvent, dans la population Américaine,
qu'un dépistage unique par recherche d'albuminurie à 55 ans était cout-efficace en réduisant
l'incidence des besoins de dialyse et les transplantations rénales. Il
est également coût efficace de réaliser un dépistage unique entre 35 à
75 ans ou un dépistage tous les 10 ans jusqu'à 75 ans. Bref, l'âge
pourrait revenir dans les critères de dépistage, avec 1 dépistage unique
à 55 ans en l'absence d'autres indication.
Un article du
BJGP a
mis en évidence chez des patients avec une insuffisance rénale, 4% qui
avaient un traitement contre-indiqué du fait de la fonction rénale, 15%
avaient un traitement à une posologie non adaptée et 24% un traitement
"à éviter" en cas d'insuffisance rénale. Pensons à réévaluer chaque
traitement chez les patients avec une insuffisance rénale.
Une étude du
Jama Internal medicine
critique le seuil de 60ml/min commun à tous les patients pour définir
l'insuffisance rénale chronique. En effet, dans leur cohorte de patient
en population générale, 75% avaient plus de 65 ans et avaient un DFG
entre 45 et 60mL/min sans augmentation du risque d'insuffisance rénale
sévère ou de mortalité par rapport aux patients avec un DFG
> 60ml/min du même âge.
Une étude du
NEJM revient
sur la validité des équations utilisées pour estimer le débit de
filtration glomérulaire. Les auteurs comparent différentes formules
utilisant la créatininémie et la cystatine-C. Les formules CKD-EPI
utilisant la créatininémie ou la cystatine sont moins performantes que
la formule European Kidney Function Consortium dite « EFKC » pour
estimer le DFG. En effet, la CKD-EPI a des différences de plus de
5ml/min avec le DFG mesuré chez les personnes d’âge moyens avec une
grande variation avant 35 ans et après 75 ans. La EFKC est plus stable
quel que soit l’âge avec un minime avantage pour la formule utilisant la
cystatine.
Au décours d'un article du
BJGP, je découvre que la formule CKD-EPI actuellement recommandée pour l'évaluation de la fonction rénale par la
HAS en 2011 (et pas toujours calculée par les labos...), la formule est déjà dépassée. Il faudrait préciser l'évaluation de la fonction rénale par une formule CKD-EPI avec une mesure de la cystatine C sanguine et non de la créatininémie. C'est d'ailleurs ce que recommande le
NICE Britannique pour les médecins généralistes anglais en cas de DFG estimé inférieur à 60ml/min, il faudrait confirmer l'insuffisance rénale avec le dosage de la cystatine C. Mais l'étude du BJGP montre que les labos britanniques ne sont pas prêts...
Une question que l'on se pose parfois est: que mesurer pour estimer
l'atteinte rénale dans les maladies cardio-vasculaire. Jusque là, la
microalbuminurie était réservée au diabétique. Cependant, d'après
cet article,
l'étude de l'albuminurie/créatininurie combiné à l'estimation du DFG
serait utile en terme de prédiction de risque cardio-vasculaire. Il
reste encore à connaitre les implications en pratique clinique...
La
Cochrane a mis à jour sa synthèse sur le sel dans l'insuffisance rénale
chronique (la précédente datant de 2015) avec un haut niveau de preuve
sur la diminution de la PA (- 6,91/3,91 mmHg) et de l'albuminurie à
court terme (les études à long terme sont toujours en cours).
On avait parlé d'
Empa-kidney
qui montrait l'efficacité de l'empagliflozine dans la maladie rénale
chronique (mais un peu moins efficace que la dapagliflozine). Les
patients ont été suivis après la fin de l'étude dans un "
post-trial".
Au cours de ce suivi, l'utilisation libre d'inhibiteur de SGLT2 était
similaire, égale à 40%, dans les 2 groupes (ex-empagliflozine et
ex-contrôle). Au cours des 3 ans du "post-trial", les patients du groupe
initialement sous empagliflozine avaient toujours un risque plus faible
de progression de néphropathie ou d'évènement cardiovasculaire. Mais
quand on regarde en détail, seule la 1ère année restait significative.
Cependant, cette fois ci, le risque de mortalité cardiovasculaire était
réduit de façon exploratoire.
Une des études attendues en néphrologie était
EMPA-Kidney
évaluant l'efficacité de l'empagliflozine chez les patients avec un DFG
entre 20 et 45ml/min ou entre 45 et 90ml/min avec une RAC > 200mg/g.
Notons que 50% étaient diabétiques et que 73% étaient en prévention
primaire. Après plus de 2 ans de suivi, le critère composite
(dégradation rénale et mortalité cardiovasculaires) était moins fréquent
dans le groupe empagliflozine que dans le groupe placebo (NNT= 48
patients par an). Cependant, il n'y avait pas de réduction des
évènements cardiovasculaires seuls ni de la mortalité globale (que la
dapagliflozine avait réussi à améliorer dans
DAPA-CKD)
On se pose parfois la question de la poursuite ou de l'arrêt des IEC chez les patients avec une insuffisance rénale sévère. Cet
essai randomisé
chez des patients avec un DFG < 30ml/min a évalué l'arrêt ou la
poursuite des IEC et ARAII à 3 ans. Les auteurs ne retrouvent pas de
différence de DFG entre les 2 groupes, ni d'insuffisance rénale
terminale, ni de mortalité globale. Ainsi, on pourrait se dire que ces
traitements ne sont pas utiles, mais il semblerait que le bénéfice
cardiovasculaire, non évalué ici, fasse pencher la balance vers une
poursuite du traitement comme nous l'avions vu
ici.
Un essai contrôlé randomisé publié dans le
Jama Internal Medicine a étudié l'association enalapril 20mg + acide folique 0,8mg versus enalapril 20mg en prévention de l'insuffisance rénale chez des patients de 45 à 75 ans hypertendus en prévention cardiovasculaire primaire. Les auteurs retrouvent une réduction significative du déclin de la fonction rénale dans le groupe "acide folique" à 4 ans, notamment chez les patients ayant une maladie rénale chronique préexistante ou un DFG initial estimé inférieur à 60ml/min. L'
étude princeps avait montré une diminution des AVC également avec l'ajout d'acide folique! Et vous allez me dire: pourquoi ne mettons pas de l'acide folique à tous ces patients étant donné qu'ils avaient des folates à 7 (Norme: 5-15)? Parce qu'heureusement, entre les lignes de l'étude princeps, on retrouve le dosage de la mutation génétique MTHFR C677T qui est impliqué dans le métabolisme de l'acide folique et présente à l'état homozygote chez 25% de la population chinoise contre 10% à peine en France: ce qui peut expliquer les résultats de l'étude. Moralité: même les belles études publiées dans les grandes revues et qui ont l'air applicables ne le sont pas forcément.
Il y a quelques temps, la finérénone (un antagoniste non stéroidien des
minéralo-corticoide) a fait son entrée dans les recos sur les
néphropathies (
ici et
là). Cet
article d'Annals
of internal medicine a poolé les résultats des différents essais
randomisés utilisant cette molécule, et étudié la réduction du risque
d'évènements cardiovasculaire selon la réduction de l'albuminurie. Avec
un RAC de 500mg/g (55mg/mmol) dans les 2 groupes, 53% des patients ont
obtenu une réduction de 30% du RAC dans le groupe finarenone et 27% dans
le groupe placebo. Les auteurs ont calculé que le bénéfice rénal était
lié à 64% à cette amélioration du RAC et que le bénéfice
cardiovasculaire y était lié à 24%.
La
Cochrane a
publié une revue concernant les traitements du prurit chez les patients
atteints de maladie rénale chronique. Les antihistaminiques sont le
traitement le plus courant malgré le manque de preuves. Les traitements
les plus efficaces sont les antiépileptiques comme la gabapentine et la
prégabaline. D'autres traitements comme le montélukast et le sulfate de
zinc pourraient avoir une efficacité de moindre ampleur.
Il y a longtemps, une
étude supposait
que l'allopurinol pouvait ralentir la progression de la maladie rénale
chronique, mais ce n'était pas très clair. Cet essai contrôlé randomisé
du
NEJM incluant
des patients avec un DFG moyen de 31ml/min n'a pas retrouvé de bénéfice
au traitement par allopurinol sur le déclin de la fonction rénale
évalué à 2 ans.
Chez les patients insuffisants rénaux, la prescription d'allopurinol se justifie en cas d'hyperuricémie. Mais il semblerait que l'allopurinol puisse également ralentir la progression de l'insuffisance rénale. Malheureusement, l'
article cite un regroupement d'autres articles significatifs dans son sens, mais les populations ne sont pas décrites. (et j'avoue ne pas avoir eu le courage cette semaine d'aller regarder les e-DFG dans chaque étude pour voir à quel stade d'insuffisance rénale ce pourrait être intéressant).
Cet
article
étudie l'amélioration de l'albuminurie chez les patients hypertendus
non diabétiques traitées par bloqueurs du système rénine angiotensine.
L'utilisation de l'Eplérénone en plus permet une amélioration du ration
albuminurie/créatininurie sans majoration de hyperkaliémies sévères. La
comparaison au placebo n'est pas justifiée car l'ajout d'un diurétique
thiazidique a déjà démontré une efficacité supérieure au placebo.
L'Eplerenone n'est clairement pas le premier diurétique que j'aurai
envie d'utiliser dans l'hypertension avec néphropathie.
Dans le traitement de la maladie rénale chronique, les antagonistes des
récepteurs de l'endothéline (ERA) sont en cours de développement. Dans
cet
essai randomisé,
le zibotentan a été associé à de la dapagliflozine chez des patients
avec albuminurie et un DFG > 20ml/min (le DFG moyen était de
45ml/min). L'amélioration de l'albuminurie était plus importante avec le
zibotentan, et les variations de DFG étaient sensiblement les mêmes. A
suivre sur des critères plus durs qu'une amélioration de l'albuminurie .
Voici un article concernant la dialyse.
Peu utile en médecine générale, mais la figure des différents schémas
peut être utile pour ré-expliquer au patient. Il n'y a pas de seuil
clair de DFG pour débuter (pas de différence de mortalité quand débuté
à 10-15ml/min vs 5-7ml/min), ce sont les symptômes, la fatigues et le
ionogramme qui vont déterminer le moment de l'initiation. Il faut bien
sur penser à éviter les traitements néphrotoxiques (notamment AINS) et
adapter les posologies des traitements. Les auteurs précisent que malgré
le risque cardiovasculaire plus élevé, il n'y a pas d'intérêt à
prescrire une statine en prévention primaire si dialyse en l'absence
d'autre indication (1 ECR, négatif, mais c'était avec rosuvastatine...).
Pour l'hypertension, la cible est de 130mmHg avant 65 ans, et 140mmHg
après, avec les IEC/ARAII et BB- non dialysables en 1ère intention et
inhibiteurs calciques en 3ème ligne, puis la spironolactone (très faible
niveau de preuve de tout ça). La vitamine D est recommandée pour
obtenir un équilibre calcique et métabolique, mais pas de différence sur
la survie. Enfin, concernant l'anémie, l'EPO ou le fer est indiqué si
Hb < 10g/dL.

Un algorithme issu du billet de
PU automne portant sur l'élévation de la créatininémie. Je vous encourage vivement à aller le lire !
On revient sur les IEC et ARAII seraient efficaces pour réduire la mortalité lorsqu'ils sont mis dans les suites d'un épisode d'insuffisance rénale d'après cette
étude du JAMA internal medicine. Cependant, les hospitalisations pour cause rénales étaient supérieures chez les patients traités (on ne peut exclure un biais dans la sélection des patients mis sous traitement car on n'est pas dans un essai randomisé). On note aussi que le bénéfice n'est présent que chez les patients avec une hypertension artérielle connue. Donc, les bloqueurs du système rénine angiotensine sont probablement à instaurer chez tout patient hypertendu ayant un épisode d'insuffisance rénale aigüe même après normalisation de la fonction rénale.
Petit détour néphrologique pour parler d'un article du Lancet sur l'insuffisance rénale aigüe. Bien que plutôt centré sur les pays "à bas PNB, toutes les régions du monde ont été étudiées. Il apparait que chez les pays faible PNB, l'insuffisance rénale aiguë soit liée à la déshydratation. Dans les pays à haut PNB, ce n'est pas le cas: l'hypotension est la première cause à 45%. (je sais, que les causes sont souvent plurielles, mais il ont du catégoriser dans l'étude...) Alors que l'été va arriver, attention à la iatrogénie qui est impliquée de cette situation aiguë associée à une mortalité à 7 jours de 10% dans les pays à haut PNB.
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2014: Dans la série des recommandations, on continue avec la prise en charge du
syndrome néphrotique de l'adulte. Bien que l'ensemble de la prise en charge soit spécialisée, la surveillance se fait en partie par le médecin généraliste avec une auto-surveillance de la protéinurie, et en cas de protéinurie:
- Créatininémie, ionogramme sanguin, albuminémie, exploration d’anomalies lipidiques, protéinurie des 24 heures, rapport protéinurie/créatininurie sur échantillon, ECBU, tous les 3 mois.
Le résumé à l'attention du généraliste est d'ailleurs appréciable.En dehors du cadre de cette pathologie sur-spécialisée, le bilan de suivi est, à mon avis, intéressant car reproductible sur un certain nombre de pathologies rénales chroniques.
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